
Notifications des grands médias, suivi des événements en direct, photos et vidéos amateurs : comme lors des attentats de Paris le 13 novembre 2015, les explosions de Bruxelles ont instantanément été relayées et commentées sur les médias sociaux.
Après une double explosion à l'aéroport de Bruxelles et plusieurs déflagrations dans trois stations de métro, la Belgique est passée au niveau d'alerte antiterroriste, ce mardi 22 mars.
Temps de crise
Un attentat est une crise, au sens d"un moment crucial dans la vie des individus, des groupes et des populations, qui marque une rupture de continuité et une incertitude quant à l’évolution des évènements, qui comporte une menace pour les valeurs, les objectifs et le fonctionnement de ces individus et groupes, et qui découvre des enjeux majeurs pour leur liberté, leur intégrité voire leur survie", pour l'Observatoire international des crises.
Avant, il y avait "le temps de l'alerte, le temps de la mobilisation, le temps de la réponse et le temps du retour d'expérience"
Et plus que jamais en temps de crise, Internet et son pouvoir d'instantanéité supplantent les médias traditionnels (la radio, la télévision et la presse écrite).
Le réflexe est partagé par la majorité des internautes : pour avoir des images des événements, c'est Twitter ; pour savoir si les amis vont bien, c'est le Safety Check de Facebook ; pour suivre le déroulé des opérations, c'est le fil en direct des sites d'information. Ces différents outils numériques permettent à chaque internaute de consommer l'information à travers sa propre veille.
Nouvelle temporalité
Le fait que chacun puisse avoir recours à ce nouveau flux de données, mais aussi participer à le construire (commentaires postés sur les réseaux, vidéos relayées, etc.) change tout à notre perception de l'actualité.
"Dans le schéma théorique, une crise se développe dans le temps, même avec une cinétique rapide, en respectant un certain nombre d'étapes : pour simplifier, il y a traditionnellement le temps de l'alerte, le temps de la mobilisation, le temps de la réponse et le temps du retour d'expérience", rappelle Charles-Edouard Anfray dans le Magazine de la communication de crise et sensible. "Mais aujourd'hui ces schémas sont bousculés par la réalité. La crise se crée, se développe et meurt à la vitesse de la lumière, sans donner le temps aux organisations humaines de réagir en temps adapté."
VOIR AUSSI : Les images amateurs des attentats de Bruxelles
Le fait que chacun d'entre nous puisse désormais livrer une information sur la place publique pose de lourdes questions, que trop souvent l'urgence et la précipitation balaient : quelle frontière entre la nouvelle et le voyeurisme ? Quelle légitimité attribuer à telle ou telle source ?
Ce mardi 22 mars au matin, des directs sur Periscope sont apparus sans qu'on ne soit vraiment certains qu'ils nous apportent plus d'informations. Pendant ce temps-là, certains médias n'ont pas hésité à publier des photos de morts.
Les médias sociaux : de nouvelles possibilités qui ne doivent pas empêcher l'esprit critique
Il est parfois difficile de prendre les bonnes décisions sans temps de réflexion. Bien sûr, il faut admettre que l'hyperconnexion de notre société permet d'agréger de plus en plus d'informations en un temps record. Les journalistes d'aujourd'hui travaillent beaucoup avec cette nouvelle arène que sont les réseaux sociaux et les témoins transformés en producteurs de contenus grâce aux smartphones.
Mais être beaucoup informé, est-ce être bien informé ? À chaque événement son lot de fausses informations. Ce mardi n'échappe pas à la règle : une vidéo tournée en 2011 à Moscou a par exemple été attribuée aux explosions de l'aéroport de Bruxelles.
Sans compter que cette hyperconnexion a également quelques effets pervers. Elle peut créer des mouvements de panique (comme https://twitter.com/firstdraftnews/status/712215831594319872 Sans compter que cette hyperconnexion a également quelques effets pervers. Elle peut créer des mouvements de panique (comme cette fausse alerte de fusillades dans un autre quartier de Bruxelles, auSablon, finalement démentie par plusieurs médias belges). Ou encore tellement nous accoutumer à avoir des nouvelles en direct que la moindre absence de notification Safety Check par un contact sur Facebook peut se transformer en inquiétudes et sueurs froides. En modifiant notre rapport au temps (avoir des nouvelles instantanées) et à la proximité (voir les événements comme si on y était), les médias sociaux ont également modifié nos pratiques. Mais pour continuer à pouvoir dire que ces nouveaux outils nous informent, il faudra aussi réfléchir à comment on les aborde." target="_blank">cette fausse alerte de fusillades dans un autre quartier de Bruxelles, au Sablon, finalement démentie par plusieurs médias belges). Ou encore tellement nous accoutumer à avoir des nouvelles en direct que la moindre absence de notification Safety Check par un contact sur Facebook peut se transformer en inquiétudes et sueurs froides.
VOIR AUSSI : Attentats de Bruxelles : Facebook active enfin le Safety Check et se fait tacler pour son retard
En modifiant notre rapport au temps (avoir des nouvelles instantanées) et à la proximité (voir les événements comme si on y était), les médias sociaux ont également modifié nos pratiques. Mais pour continuer à pouvoir dire que ces nouveaux outils nous informent, il faudra aussi réfléchir à comment on les aborde.
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