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Sahara occidental : la brouille s'envenime entre le Maroc et l'ONU

Le Conseil de sécurité se réunit jeudi pour tenter de dissiper le "malentendu" entre le Maroc et Ban Ki-moon, accusé d'avoir dérapé sur le dossier du Sahara occidental. Rabat exige que l'ONU évacue certains de ses membres de la région.

Plus que jamais remonté contre Ban Ki-moon, Rabat ne décolère pas. À la suite de propos jugés inacceptables tenus par le secrétaire général de l'Onu sur la question ultrasensible du Sahara occidental, la semaine dernière, le Maroc demande que des membres de l'ONU stationnés dans la région soient évacués, selon l'agence Reuters. Une nouvelle escalade dans un dossier qui empoisonne les relations entre Rabat et les Nations unies.

Rabat reproche au secrétaire général de l'Onu d'avoir manqué à son devoir de neutralité lors d'une visite début mars dans un camp de réfugiés sahraouis à Tindouf (Algérie). À cette occasion, Ban Ki-moon avait fortement irrité le royaume chérifien en parlant "d'occupation" à propos du statut de ce territoire annexé par le Maroc en 1975 et revendiqué par des indépendantistes (le Polisario). Il avait déploré que Rabat et le Polisario n’avaient fait "aucun progrès réel dans les négociations devant aboutir à une solution juste et acceptable par tous, fondée sur l'autodétermination du peuple du Sahara occidental".

Dans son communiqué, Rabat a également annoncé l'"annulation de la contribution volontaire qu'accorde le Maroc au fonctionnement de la Minurso" et l'"examen des modalités de retrait des contingents marocains engagés dans les Opérations de Maintien de la Paix".

Réunion du Conseil de sécurité ce jeudi

L'ONU a déploré mercredi la décision du Maroc et a indiqué "prendre des mesures pour en atténuer les effets". Toutefois, le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric a indiqué que Ban Ki-moon maintenait ses déclarations à l’origine du courroux marocain, et qu'il a renoncé à se rendre à Rabat vu le climat ambiant. "Il n'a pas de visite prévue pour l'instant", a-t-il précisé. "Il n'est pas non plus question de retirer la Minurso", a-t-il assuré.

Signe de de la gravité de la crise, le Conseil de sécurité se réunit jeudi après-midi pour tenter de dissiper le "malentendu" avec le gouvernement marocain, a indiqué le président du Conseil. "Il y a un léger malentendu entre l'ONU et le gouvernement marocain", a estimé l'ambassadeur angolais Ismael Gaspar Martins qui préside le Conseil en mars. "Nous devons trouver une forme de rapprochement (...) nous allons avoir des consultations à ce sujet".

Il a souligné que la mission de l'ONU au Sahara occidental (Minurso) "avait été déployée par le Conseil". "Si quelque chose arrive à cette mission, a-t-il expliqué, nous devons trouver les moyens de le résoudre".

L'ONU espère que son médiateur Christopher Ross va pouvoir continuer ses efforts et que "ce n'est pas la fin du processus politique". Et d’affirmer : "la population du Sahara occidental mérite de voir une lumière au bout du tunnel". La décision marocaine, communiquée lundi à Ban Ki-moon par le ministre marocain des affaires étrangères Salaheddine Mezouar, "a été une surprise", a-t-il confié.

"Nous regrettons évidemment cette décision", a-t-il dit, "et nous espérons progresser vers une relation plus constructive et positive avec le Maroc", avec lequel des contacts sont maintenus.

Ban Ki-moon déplore un "manque de respect" du Maroc

Les services qui s'occupent des missions de l'ONU "vont prendre les mesures nécessaires pour garantir que la Minurso puisse continuer à remplir son mandat". Il faut notamment remplacer quelque 3 millions de dollars que le Maroc versait pour assurer le logement et la nourriture des Casques bleus.

Quant à la menace brandie par le Maroc de remettre en cause sa participation à d'autres opérations de maintien de la paix, le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric a déclaré "attendre encore des détails". Le Maroc fournit quelque 2 300 Casques bleus, notamment à la Monusco (mission de l'ONU en République démocratique du Congo).

Ban Ki-moon s'était plaint amèrement lundi d'un "manque de respect" du Maroc envers sa personne et l'ONU, en recevant M. Mezouar. Selon un communiqué de l'ONU, M. Ban avait exprimé au ministre "sa profonde déception et sa colère" à la suite d'une manifestation monstre à Rabat "qui l'avait pris pour cible personnellement".

Le Maroc a pris le contrôle de la majeure partie du Sahara occidental en 1975 lorsque la puissance coloniale, l'Espagne, s'en est retirée, ce qui a poussé le Polisario à mener une guérilla jusqu'en 1991, année où l'Onu a réussi à obtenir un cessez-le-feu et a déployé la Minurso.

Rabat propose une large autonomie sous sa souveraineté pour ce vaste territoire peu peuplé mais riche en minéraux, tandis que le Polisario, soutenu par Alger, réclame un référendum d'autodétermination.

Avec AFP et Reuters