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Après les heurts qui ont opposé migrants et forces de l’ordre lundi soir, le démantèlement du camp de Calais a repris mardi. La majorité des migrants refusent néanmoins les solutions de relogement proposées.
Tente par tente, cabane par cabane, la zone sud du camp de Calais est évacuée, détruite, nettoyée. Après une soirée de tension, lundi 29 février, entre forces de l’ordre, migrants et activistes "no borders", suivie d'une nuit dans un calme précaire, le démantèlement du camp a repris son cours mardi matin, dès 8h30, pour une deuxième journée consécutive dans un climat un peu plus apaisé.
itUn important dispositif de sécurité a néanmoins été déployé mardi matin : une centaine de CRS environ, et plus d’une vingtaine de policiers, dont des agents de la police aux frontières (PAF), ont encerclé le site, rendu quasi inaccessible aux journalistes, repoussés par des cordons de sécurité au fur et à mesure de l’avancée de l’opération.
"De nouveaux incendies ont éclaté mardi en début de soirée – il y en a eu plusieurs au cours de cette journée. Le dernier incendie a été maîtrisé par les pompiers", témoigne Alexandra Renard, envoyée spéciale de France 24 sur le camp de Calais.
>> Sur France 24 : "La boue au ventre. Immersion dans le camp de migrants de Grande-Synthe"
La destruction du camp a semblé presque artisanale : la société privée qui gère le démantèlement détruit les habitations précaires avec des marteaux, des tractopelles, des scies, des pioches mais "surtout pas de bulldozers, ni de rouleaux compresseurs, beaucoup trop symboliques", selon Alexandra Renard, qui a néanmoins noté l’efficacité du procédé.
"Le démantèlement se déroule plus rapidement que lundi. En l’espace de quelques heures, il y a eu des dizaines de tentes et de cabanes détruites. Les migrants sont délogés au fur et à mesure de la destruction : certains quittent leur cabane avec leur matelas et trois affaires jetées dans un sac", témoignait la journaliste plus tôt dans la journée. Aussitôt après, le logement est détruit, les restes jetés ou brûlés – quand ils ne sont pas emportés par le vent, et les traces des habitants peu à peu effacées. En fin de journée lundi, 5 000 m² de la zone avaient ainsi été évacués. L’équivalent, ou plus, était attendu mardi soir.
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Une résistance majoritairement pacifique
Face à cette redoutable efficacité, orchestrée par la préfecture du Pas-de-Calais qui a balisé les opérations comme leur communication, la résistance a été pacifique, même si deux migrants ont été interpellés mardi matin. "Les deux hommes, perchés sur leur cabane, menaçaient les forces de l’ordre avec un couteau. Il fallait avant tout les protéger d’eux-mêmes", explique à France 24 Vincent Berton, sous-préfet du Pas-de-Calais.
Selon notre envoyée spéciale, la majorité des migrants qui refusaient de partir ne montraient cependant "aucune résistance physique". Alors que les vents et la pluie faisaient régner un froid glacial sur le site du nord de la France, les résistants se sont perchés sur leur cabane, enroulés dans des couvertures, et ils brandissaient des pancartes de protestation jusqu’à ce qu’ils soient obligés de céder aux injonctions de la préfecture.
Lundi soir, l’ambiance était autrement plus tendue. Quelque 150 migrants, armés pour certains de barres de fer, s'en sont pris à des véhicules en partance pour l'Angleterre avant d'être dispersés par la police à coup de gaz lacrymogènes. Onze policiers ont été légèrement blessés et trois personnes interpellées. "La situation migratoire à Calais appelle la responsabilité de chacun et l'union de tous ceux, pouvoirs publics et associations, qui œuvrent pour des solutions durables et humaines", a réagi le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve.
Les solutions de l’État boudées par les migrants
La préfecture se défend de vouloir passer en force, comme l’en accusent les associations, disant privilégier le dialogue et la persuasion aux méthodes musclées. "Nous faisons un travail de maraude pour inviter les gens à accepter les solutions de relogement. Nous avons la possibilité d’héberger tout le monde", a martelé le sous-préfet qui a estimé qu'il faudrait sûrement plusieurs semaines pour venir à bout des résistances et de l’opération.
Sur le camp de Calais, 1 300 personnes ont déjà été relogées dans des containers chauffés et électrifiés, mis à disposition depuis décembre. Selon la préfecture, il restait 200 places mardi matin. Il y avait également encore des places dans le camp fermé, réservé aux femmes et aux enfants, ainsi que dans celui réservé aux mineurs isolés, installé dans le centre de Calais. Les migrants peuvent aussi être dirigés vers l’un des centres d’accueil et d’orientation, dont une centaine au total sont disséminés dans toute la France.
Mais les migrants sont peu nombreux à accepter ces solutions. "La plupart des migrants à qui nous avons parlés ne veulent pas quitter ce camp. Ils veulent rester ici, à Calais, et ils rejoignent la partie nord du camp", explique Alexandra Renard. Sur les 800 à 1 000 migrants, selon le gouvernement - 3 450, selon les associations -, qui se trouvent dans la zone concernée par le démantèlement, seuls 50 ont accepté de monter dans les cars qui viennent, chaque matin, attendre à la sortie du camp les candidats au relogement.
Ils sont également peu nombreux à accepter d’emménager dans les containers-dortoirs, craignant d’être forcés à déposer une demande d’asile en France (des craintes non fondées - ils y sont encouragés mais non contraints). Malgré toutes les précautions prises par la Préfecture, le démantèlement du camp conforte les migrants dans leur objectif : quitter la France pour rejoindre l’Angleterre.