Le mouvement de protestation des agriculteurs français prend de l'ampleur. Ulcérés par la faiblesse des cours, ils ont maintenu lundi la pression sur le gouvernement à quelques heures d'un Conseil européen sur la crise agricole à Bruxelles.
La mobilisation ne faiblit pas. Les agriculteurs français, en particulier les éleveurs de porcs et de bovins et les producteurs laitiers, protestent contre les cours trop bas de leurs productions. Lundi 15 février, ils ont maintenu la pression et poursuivi leurs manifestations à quelques heures d'un Conseil européen sur l'agriculture à Bruxelles.
La semaine dernière, le président François Hollande avait promis que "les choses allaient bouger" lors de cette réunion sur la crise agricole, où Paris compte notamment demander "un plan européen de stockage" pour désengorger le marché de la surproduction de lait et de porc.
La Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) dit attendre que le conseil "traite des conséquences de l'embargo russe, rende possible l'étiquetage généralisé sur l'origine des produits alimentaires et annonce des mesures fortes pour enrayer la crise actuelle, notamment par un relèvement du prix d'intervention sur les produits laitiers".
Pendant ce temps, plusieurs dizaines de tracteurs et leurs remorques ont bloqué les principaux accès à la ville de Vannes, dans le Morbihan. Des agriculteurs en colère, soutenus par des ostréiculteurs et un collectif anti-taxes ont dit vouloir maintenir ce blocus de la ville bretonne toute la journée. Une manifestation importante est également prévue à Rennes mercredi.
Pour se faire entendre, les agriculteurs français multiplient depuis des semaines les actions, en particulier dans l'ouest de la France. Mais le mouvement s'est également étendu dans le Sud-Est. Des agriculteurs bloquent ainsi depuis dimanche soir, avec tracteurs et remorques, les plateformes de distribution des grandes surfaces (Super U, Carrefour, Intermarché) en région Auvergne-Rhône-Alpes et particulièrement dans l'Ain. Ils empêchent l'approvisionnement de ces grandes surfaces en produits frais et entendaient étendre leur mouvement à l'Isère et à la Saône-et-Loire.
Les négociations sur les prix entre fournisseurs et distributeurs sont fixées au 29 février. "Nous demandons un rééquilibrage des négociations", explique Michel Joux, président de la Fédération régionale des syndicats d'exploitants agricoles (FRSEA) d'Auvergne-Rhône-Alpes. "Nous demandons à l'État français de prendre des dispositions législatives pour encadrer la répartition des marges."
Semaine décisive
Selon lui, les négociations en cours portent notamment sur des baisses de 5 % à 10 % des prix d'achat aux producteurs. "Ça ne peut plus durer", lance-t-il. "On estime dans ces conditions entre 20 % et 30 % le nombre d'exploitations qui pourraient mettre la clé sous la porte en 2016."
Les producteurs se disent prêts à inscrire leur mouvement dans la durée. "On veut faire tenir le blocus pendant plusieurs jours et même plusieurs semaines", explique Michel Joux.
Cette semaine s'annonce décisive pour l’executif français, qui tente d'apaiser un mouvement lancé en janvier. Le gouvernement a menacé vendredi la grande distribution et les industriels français de durcir la réglementation encadrant les négociations avec les producteurs agricoles si la campagne 2016 devait se traduire par des baisses de prix. La veille, François Hollande avait annoncé une baisse imminente des cotisations sociales pour l'ensemble des agriculteurs.
Le ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, a pour sa part envoyé à Bruxelles un mémorandum dans lequel Paris demande un relèvement temporaire du prix d'achat public par l'Union européenne (prix d'intervention) de la poudre de lait et la création d'aides aux producteurs qui ont réduit volontairement leur production en période de baisse des prix.
Le gouvernement français réclame également la prolongation de l'aide au stockage privé pour le porc, l'indication du pays d'origine de la viande dans les produits transformés, la création d'un outil de crédit européen à l'exportation et des aides financières pour les exploitations les plus endettées.
Le Premier ministre, Manuel Valls, a rendez-vous mercredi avec le président de la FNSEA, Xavier Beulin.
Avec AFP et Reuters