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En Syrie, la cessation des hostilités suspendue au bon vouloir des Russes et des rebelles

La mise en œuvre de l’accord de "cessation des hostilités" en Syrie pourrait permettre la reprise des pourparlers à Genève. Encore faudra-t-il que la Russie ainsi que les factions rebelles sur le terrain l’appliquent.

Le chemin à parcourir semble encore long, vendredi 12 février, avant que l’accord de "cessation des hostilités" en Syrie, conclu dans la nuit du 11 février, soit bel et bien mis en œuvre. Négocié principalement par les États-Unis et la Russie, cet accord passé au sein du Groupe international de soutien à la Syrie (ISSG) prévoit l’arrêt des combats "dans un délai d’une semaine" et un accès "immédiat" de l'aide humanitaire aux civils en détresse.

Mais moins de 24 heures après la conclusion de l’accord, des voix s’élèvent pour souligner le rôle clé que certains doivent encore jouer pour rendre possible son application.

L’accord suspendu au bon vouloir russe...

À cet égard, l’Allemagne, qui accueillait jeudi la réunion de l'ISSG à Munich, n’a pas manqué de souligner, dès vendredi, que les paroles doivent être suivis d’actes. "Le gouvernement allemand est d'avis que c'est à la Russie que revient la principale responsabilité. La Russie, du fait de son offensive militaire aux côtés du régime [de Bachar al-] Assad, a nettement mis en danger le processus politique", a déclaré une porte-parole du gouvernement, Christiane Wirtz. Ainsi l’Allemagne demande-t-elle que la période jusqu'à un cessez-le-feu ne soit pas utilisée pour une intensification des bombardements.

Même avertissement côté Français. Par la voix de son ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, Paris a prévenu vendredi que l'accord "peut permettre une amélioration de la situation (...) s'il inclut l'arrêt des bombardements russes et syriens indiscriminés". Le tout nouveau ministre des Affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, a lui aussi indiqué être "attentif à ce qui se fera". "Nous jugerons aux actes des uns et des autres", a-t-il prudemment conclu.

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En Syrie, la cessation des hostilités suspendue au bon vouloir des Russes et des rebelles

Le Secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a pour sa part rappelé que "la Russie s'en est prise essentiellement à des mouvements d'opposition et pas à l'EI", éstimant que les raids russes avaient nui aux efforts déployés pour parvenir à une solution négociée au conflit.

Selon des rebelles, des bombardements russes ont visé vendredi Tal Rifaat, dans le nord de la province d'Alep.

… et à l’approbation des factions rebelles

Quoiqu’indispensable, le bon vouloir russe pourrait d’ailleurs n’être pas suffisant : si l’ISSG rassemble bon nombre d’acteurs importants du conflit syrien, il exclut le régime de Bachar el-Assad et les groupes rebelles eux-mêmes. Ces derniers ont d’ores et déjà indiqué, par la voix de Georges Sabra, un représentant important du Haut comité des négociations (HCN) qui rassemble les principaux partis d'opposition et groupes rebelles, qu’il reviendra aux "factions rebelles sur le terrain" d’approuver ou non la cessation des hostilités.

Les rebelles armés sur le terrain "sont ceux qui décideront de la mise en œuvre de cette trêve", a-t-il indiqué. Le chef du HCN, Riad Hijab, a pour sa part souligné sur son compte Twitter que toute décision sur la mise en œuvre de cette trêve sera "conditionnée à l'accord des factions des fronts Nord et Sud".

A Alep, des groupes de combattants insurgés indiquaient, vendredi, avoir reçu de grandes quantités de missiles sol-sol de type Grad de leurs alliés étrangers pour faire face à l'offensive de l'armée syrienne. "C'est une excellente puissance de feu supplémentaire", a déclaré un chef militaire.

Une reprise des négociations à venir ?

Une cessation des hostilités pourrait permettre la reprise du processus de négociations. Les pourparlers ont en effet été interrompus début février, les parties rebelles syriennes estimant qu’il ne pouvait pas y avoir de discussion alors qu’elles subissaient de lourds bombardements russes dans la province d’Alep.

Mais la mise en œuvre de l’accord reste incertaine, comme le souligne le défenseur syrien des droits de l'Homme Mazen Darwish. Emprisonné pendant plus de trois ans par le régime de Damas, il a accueilli l'accord de Munich avec scepticisme.

"La guerre se poursuit à chaque minute, à chaque seconde. La communauté internationale a démontré son échec depuis cinq ans, et les décisions de Munich arrivent tardivement", a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse dans les locaux de la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) à Paris.

Avec AFP et Reuters