La France, qui tire environ 75 % de son électricité du nucléaire, s'est longtemps posée en championne de l'atome. Pourtant, à la COP21, personne n'évoque cette ressource comme possible alternative aux énergies fossiles. Explications.
La France a vu les choses en grand pour son pavillon à la COP21. Tous les aspects environnementaux, économiques et technologiques y sont représentés... à l’exception du nucléaire. Étonnant pour un pays qui est le deuxième plus grand producteur de cette énergie au monde derrière les États-Unis.
Tout se passe comme si la France et les autres participants à cette conférence parisienne ne voulaient pas mettre le nucléaire sur le tapis climatique. “Il est pourtant difficile de comprendre comment la France veut réussir à réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre sans se poser la question du recours au nucléaire”, affirme Sylvain David, un physicien du CNRS, qui ne voit pas pourquoi cette énergie est la grande absente de la COP21.
Le nucléaire pour rester sous les 2°C ?
Ce scientifique rappelle que le développement du nucléaire en France, dans les années 70, répondait à une volonté étatique de réduire la dépendance aux importations d’énergies fossiles très polluantes.
Mais le “nucléaire a toujours été une source d’énergie controversée”, souligne Loreta Stankeviciute, une économiste qui travaille pour l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Elle anime le stand de cette institution à la COP21 et reconnaît que la voix du secteur atomique peine à s’y faire entendre. Pourtant “l’énergie atomique a une faible intensité en émission de CO2 et peut faire partie de la solution pour rester sous le seuil des 2°C de hausse des températures d’ici à la fin du siècle”, affirme-t-elle.
Cette tentation de repeindre l’énergie atomique en vert irrite au plus haut point Jan Haverkamp, responsable de la réponse de Greenpeace aux affirmations du lobby atomique. “Il y a toute une série de scénarios qui permettent de se passer des énergies fossiles et qui ne font pas référence à au nucléaire”, affirme-t-il à France 24.
Le nucléaire plombé par Fukushima et le terrorisme
Cet activiste et spécialiste des questions énergétiques pour l’ONG de défense de l'environnement n’est, lui, pas étonné de l’absence de débat autour du nucléaire à la COP21. “Il n’y a plus beaucoup de pays qui pensent que l’énergie nucléaire a un avenir et ce n’est donc pas une question prioritaire pour la majorité des délégations”, explique Jan Haverkamp. Même des états qui continuent de miser dessus, comme la Chine et la France, investissent de plus en plus dans des alternatives", ajoute-t-il.
Pour lui, comme pour le physicien Sylvain David, le nucléaire est de toute façon en mauvaise posture économique. L’accident de Fukushima au Japon en 2011 et la menace terroriste ont mis une forte pression sur le secteur afin de construire des centrales toujours plus sûres. Des investissements sont donc nécessaires, qui rendent cette source d’énergie plus chère alors qu’en parallèle, les prix des renouvelables sont à la baisse grâce aux innovations technologiques, résume Sylvain David.
Que le nucléaire fasse ou non partie de la solution au rechauffement de la planète n’est donc même plus la question. Pour Sylvain David, l’époque est aux technologies qui permettent d’avoir un rapide retour sur investissement et le nucléaire nécessite un investissement initial important, ne devenant rentable qu'après plusieurs années.