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Athlétisme : l’Agence mondiale antidopage demande de suspendre la fédération russe

La Fédération russe d'athlétisme est dans le viseur de l'Agence mondiale antidopage (AMA) qui l'accuse d'avoir dissimulé des cas de dopage. L'AMA a recommandé, lundi, d'exclure les athlètes russes de toute compétition.

Une commission indépendante de l’Agence mondiale antidopage (AMA) a recommandé, lundi 9 novembre dans un rapport, la suspension de la fédération russe d’athlétisme. Cette dernière est soupçonnée de multiples infractions liées au dopage.

La commission dit avoir "identifié des défaillances systémiques au sein de l’IAAF (Fédération internationale d’athlétisme) et de la Russie" empêchant ou restreignant la mise en œuvre d’un programme antidopage efficace.

Selon ce document, il existe dans le monde sportif russe "une culture profondément enracinée de la tricherie". "L'enquête montre que l'acceptation de la triche à tous les niveaux étaient étendue et de longue date", explique le texte, accusant en premier lieu les entraîneurs "qui eux-mêmes étaient auparavant des athlètes et qui travaillent en relation avec le personnel médical. Cette mentalité de victoire à tout prix a ensuite été transmise aux athlètes actuels".

Une telle suspension, si elle était adoptée par l’IAAF, empêcherait les athlètes russes de participer à toutes les compétitions homologuées par l’IAAF telles que les Jeux olympiques ou les championnats du monde et d’Europe d’athlétisme.

L'IAAF lance une procédure d'application de ces sanctions

En réponse, la fédération internationale va lancer une procédure d’application des sanctions demandées contre la Russie. "Les informations révélées par la commission d'enquête indépendante de l'AMA sont alarmantes. Nous avons besoin de temps pour les digérer et en comprendre tous les détails. J'ai cependant demandé au Conseil de l'IAAF de lancer la procédure relative aux sanctions proposées contre l'Araf (la Fédération russe d'athlétisme)", a réagi le président de l'IAAF Sebastian Coe dans un communiqué. Il a donné à la Russie jusqu’à la fin de la semaine pour répondre à ces accusations.

Cette enquête faisait suite à la diffusion de reportages de plusieurs médias sur les pratiques douteuses d'athlètes russes. L'AMA recommande d'ailleurs l'exclusion à vie de cinq sportifs du pays dont la championne olympique en titre du 800 m Maryia Savinova.

L'agence juge que les JO de 2012 à Londres ont été "sabotés" par la présence de ces athlètes dopés. Elle estime aussi que ce système organisé de dopage n'aurait "pas pu exister" sans l'assentiment du gouvernement russe.

Ces accusations sont rejetées par l’Agence russe antidopage qui les jugent "infondées". "Concernant la destruction des échantillons (pour le contrôle antidopage), je ne vois rien de probant dans le rapport mais seulement des déclarations étayées par aucune preuve", a réagi le numéro 2 de l'agence Nikita Kamaïev, cité par l'agence TASS. "Même chose pour les accusations de pots-de-vin payés par les sportifs", a-t-il conclu.

Mardi, le Kremlin a également jugé ces accusations "infondées". Son porte-parole, Dmitri Peskov, a déclaré à la presse : "S'ils profèrent une telle accusation, alors celle-ci doit être étayée par des preuves. Jusqu'à présent, il n'y en a pas eu et il est difficile de comprendre quelles sont les accusations" portées contre la Russie.

Comme l'avaient annoncé ces derniers jours les co-auteurs de ce rapport, ce scandale est donc encore bien plus important que celui qui a frappé récemment la Fifa. Le rapport rendu public ce lundi se concentre uniquement sur la Russie et l'athlétisme, mais le "dopage organisé" concerne d'autres pays et d'autres sports, insiste l'AMA.

Une enquête mondiale d'Interpol

Pour preuve de l'importance de ces révélations, l'organisation internationale de police Interpol a annoncé qu'elle allait coordonner l'enquête mondiale sur cette affaire de corruption présumée. De responsables de la Fédération internationale d'athlétisme sont en effet soupçonnés d'avoir couvert ces agissements et d'avoir reçu des sommes d'argent en contrepartie.

L'ancien président de l'IAAF, le Sénégalais Lamine Diack, a déjà été mis en examen la semaine dernière par la justice française pour corruption passive et blanchiment d’argent. La Commission d'éthique du CIO a également demandé sa suspension provisoire comme membre honoraire.

Son conseiller juridique Habib Cissé, ainsi que l’ancien médecin responsable de la lutte antidopage à l’IAAF Gabriel Dollé, ont aussi été mis en examen pour corruption passive. D’après Mediapart et Lyon Capitale, qui ont pu avoir accès aux conclusions du rapport, deux des fils de Lamine Diack sont également impliqués.

>> À lire sur France 24 : "Athlétisme : la Fédération internationale aurait étouffé une étude sur le dopage"

"Rebâtir la confiance dans notre sport"

Pour tenter de sauver les apparences, la Fédération internationale a déjà annoncé que quatre procédures disciplinaires avaient été ouvertes à l'encontre de Gabriel Dollé, Pape Massata Diack, un des fils de Lamine Diack, Valentin Balakhnichev, ancien trésorier de l'IAAF et ex-président de la Fédération russe, ainsi que son compatriote russe Alexei Melnikov, ancien entraîneur national de la marche.

Le successeur de l’ancien responsable de l’IAAF, le Britannique Sebastian Coe, a déjà annoncé que la tâche qui l’attend pour sortir de ce scandale est immense : "Mon travail est désormais très simple et sans ambiguïté. Il faut rebâtir la confiance dans notre sport."

Avec AFP et Reuters