La SNCF a été condamnée lundi pour discrimination envers plusieurs centaines de chibanis marocains embauchés au début des années 1970. La société française "se laisse le temps de l'analyse avant de faire éventuellement appel".
Le Conseil des Prud'hommes de Paris a condamné, lundi 21 septembre, la SNCF pour discrimination envers plusieurs centaines de chibanis marocains, embauchés au début des années 1970.
Ils sont plus de 800 cheminots de nationalité ou d'origine marocaine à avoir déposé des recours affirmant avoir été bloqués dans leur carrière et lésés à la retraite. Selon un conseiller prudhommal, la SNCF a été condamnée dans neuf dossiers sur dix.
L'avocate des plaignants Clélie de Lesquen a salué de "très belles décisions". La société française est condamnée pour "discrimination dans l'exécution du contrat de travail" et "dans les droits à la retraite", selon un jugement consulté par l'AFP. La fourchette des dommages et intérêts va de "150 000 à 230 000 euros", selon Abdelkader Bendali, professeur marocain au côté des plaignants.
Ces derniers, travailleurs immigrés venus du Maroc au début des années 1970, réclamaient chacun en moyenne 400 000 euros de dommages et intérêts.
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Après avoir ouvert un premier jugement parmi les 800, l'avocate s'est tournée vers les quelque 150 personnes présentes en relevant les poings. Le silence a laissé place aux applaudissements et quelques cris : "Vive la République, vive la France, vive la justice !"
Ahmed Katim, recruté en 1972 comme contractuel, était en larmes : "C'est une énorme satisfaction, la dignité pour les Marocains" et "la fin d'un combat de 15 ans", a-t-il déclaré.
Une facture qui pourrait s'élever à 150 millions d'euros pour la SNCF
La facture de la décision du Conseil des Prud'hommes pourrait s'élever à environ 150 millions d'euros pour la SNCF, au vu des dommages et intérêts prononcés. Elle a un mois pour faire appel après la notification des décisions, fin octobre.
"On se laisse le temps de l'analyse avant de faire éventuellement appel", a réagi Christophe Piednoël, responsable de la communication du groupe. "Nos avocats sont partis avec des cartons de dossiers, on va les regarder au cas par cas".
Dans un communiqué, la SNCF précise par ailleurs avoir "respecté les dispositions légales en vigueur" qui "excluent, aujourd'hui encore, l'embauche au statut SNCF de ressortissants de pays non membres de l'Union européenne".
Embauchés comme contractuels, donc avec un CDI de droit privé, ces agents à la retraite, ou proches de l'être, ne relèvent pour la plupart pas du statut particulier des cheminots, plus avantageux, réservé aux ressortissants européens et aux jeunes embauchés.
Les chibanis, littéralement "cheveux blancs" en arabe dialectal, représentent environ 235 000 personnes, majoritairement des hommes âgés de plus de 65 ans. Ils ont quitté l’Algérie, le Maroc et la Tunisie alors qu’ils étaient de jeunes adultes, voire adolescents pour certains, dans l’espoir de construire un avenir meilleur en France durant les Trente Glorieuses.
Avec AFP