
La Russie a commencé, jeudi, à détruire des dizaines de tonnes de produits alimentaires européens et américains sous embargo, conformément à un décret. Un gaspillage que dénoncent des personnalités de tous horizons politiques.
Pour se venger des sanctions dont elle fait l'objet, la Russie s'en prend à la nourriture. Conformément à un décret du Kremlin, la destruction des produits alimentaires européens et américains placés sous embargo a débuté dans le pays, jeudi 6 août. Ces produits, qui étaient jusqu'à présent simplement réexpédiés dans leur pays d'origine par les douanes, seront désormais détruits sur place par les autorités, qu'ils soient saisis à la frontière ou dans les magasins.
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L'agence sanitaire russe Rosselkhoznadzor a ainsi annoncé, jeudi matin, une première saisie de 73 tonnes de pêches et de nectarines, à la frontière bélarusse, qui transitaient sous un faux certificat turc et seront par conséquent détruites. Un autre chauffeur, transportant 1,5 tonne de tomates sans certificat et contrôlé à la même frontière, a quant à lui pris peur et détourné son camion du poste-frontière pour retourner au Bélarus, selon l'agence Ria Novosti.
Une première destruction de 114 tonnes de viande de porc européenne sous embargo avait déjà eu lieu, mardi, à Samara (centre) comme démonstration de la détermination des autorités.
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Depuis près d'un an, la Russie interdit l'importation de la plupart des produits alimentaires des pays qui la sanctionnent pour son rôle présumé dans la crise ukrainienne, une décision qui affecte particulièrement le secteur agricole européen - à titre d'exemple, les agriculteurs allemands ont enregistré depuis 2014 un manque à gagner allant jusqu’à un milliard d'euros par an. L'embargo, qui avait été décrété pour une année et devait expirer début août, a d'ailleurs été prolongé d'une année fin juin par les autorités russes.
"Barbarie ostentatoire"
La décision radicale de détruire des produits alimentaires a créé une levée de boucliers parmi des personnalités de tous horizons politiques, appelant à stopper ce gaspillage massif et à redistribuer les produits aux nécessiteux.
Le chef du Parti communiste russe, Guennadi Ziouganov, a notamment regretté une "mesure extrême", tandis que l'avocat Evguéni Bobrov, membre du Conseil des droits de l'Homme du Kremlin, a dénoncé "une proposition arbitraire".
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Une pétition signée par plus de 250 000 personnes sur le site internet Change.org réclame, elle aussi, que la nourriture saisie soit donnée "aux anciens combattants, aux handicapés, aux familles nombreuses et à ceux qui ont souffert des récents désastres naturels".
Le quotidien russe Vedomosti a dénoncé, pour sa part, dans un éditorial, jeudi, une "barbarie ostentatoire" et une "guerre absurde contre la nourriture en période de crise économique".
"Je ne comprends pas comment un pays qui a connu de terribles famines pendant la guerre ou après la révolution peut détruire de la nourriture", a quant à lui réagi sur Twitter Vladimir Soloviov, célèbre présentateur d'une chaîne publique de télévision russe considéré comme un soutien du pouvoir.
La Russie accuse de nombreux pays, dont le Bélarus et l'Ukraine, d'introduire sur son territoire des produits européens sous embargo en les faisant passer pour des produits locaux. Moscou espère que ces quelque cas de destruction ostentatoire suffiront à décourager les personnes tentées d'enfreindre l'embargo.
Avec AFP