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Les Pays-Bas sont rentrés, mercredi, dans l’histoire de la lutte contre le réchauffement climatique. La justice néerlandaise a reconnu le gouvernement coupable de ne pas faire assez d'effort pour limiter les émissions de gaz à effet de serre.

Les Pays-Bas coupables de ne pas en faire assez pour lutter contre le réchauffement climatique. Ce ne sont pas des associations ou des scientifiques qui mettent le gouvernement néerlandais en cause, mais la justice locale. Un tribunal a, pour la première fois, condamné un État pour sa politique environnementale. Un geste fort à quelques mois du sommet international sur le climat qui doit se tenir à Paris en décembre.

Le jugement, rendu mercredi 24 juin, “ordonne à l’État de limiter son volume total de gaz à effet de serre de manière à le réduire d’au moins 25 % en 2020 par rapport à 1990”. Cette décision est une victoire pour près de 900 citoyens néerlandais, soutenus par l’ONG de défense de l’environnement Urgenda, qui ont assigné le gouvernement en justice en avril 2015.

Les Pays-Bas, mauvais élèves

Le juge a repris à son compte l’argumentaire des plaignants assurant que “sur la base de la politique actuelle de l'État, les Pays-Bas auront réduit leurs émissions de 17 % en 2020 : c'est sous la norme de 25 à 40 % que les scientifiques et les politiques internationales estiment nécessaire pour les pays industrialisés". Le magistrat a estimé que ce manquement des autorités à ses engagements pouvait être assimilé à une mise en danger d’autrui.

Marjan Minnesma, directrice d'Urgenda, a qualifié cette décision de "première mondiale. (...) Cela a créé un précédent", a-t-elle déclaré aux journalistes présents au tribunal. "J'espère qu'il sera suivi à travers le monde", a-t-elle ajouté.

Cette décision rappelle douloureusement aux autorités néerlandaises qu’ils sont loin d’être des exemples dans la lutte contre le réchauffement climatique. “Dans l’imaginaire collectif, on a l’impression que les États d’Europe du Nord sont particulièrement soucieux de l’environnement, mais ce n’est pas le cas des Pays-Bas. Ils sont parmi les trois nations européennes les plus en retard sur les énergies renouvelables et leur secteur agricole très intensif est un important producteur de gaz à effet de serre”, souligne auprès de France 24 Stéphen Kerckhove, délégué général de l’ONG Agir pour l’environnement.

"Victoire symbolique"

Cet activiste se dit, certes, satisfait de voir pour la première fois un tribunal prendre position contre un État sur la question du réchauffement climatique. Mais il regrette que l’on en soit arrivé là. “C’est un énième signal pour obliger les responsables à agir, et c’est aussi un aveu d’échec de se dire que la justice doit intervenir sur ces questions”, explique-t-il.

L’urgence climatique est, aujourd’hui, une priorité globalement reconnue par l’ensemble de la communauté internationale et, pour Stéphen Kerckhove, “il est assez sidérant de constater que c’est un tribunal qui doit rappeler à un gouvernement de mener une politique à long terme en matière de protection de l’environnement”.

Il espère donc que les associatifs ne soient pas obligés d'écumer les salles d’audience pour amener les États à intensifier leurs efforts. Surtout que le verdict néerlandais est avant tout “une victoire symbolique” : le message est fort, mais la décision ne prévoit pas de sanction à l’encontre de l’État néerlandais, si ce n’est de rembourser les frais de justice des plaignants.

Le gouvernement, de son côté, n’a pas encore décidé s’il comptait faire appel du jugement. Les autorités ont, d’ailleurs, fait savoir qu’elles ne savaient pas comment interpréter cette décision inédite. “Nous allons étudier ce qu’il implique pour l’État”, a indiqué la ministre néerlandaise de l’Environnement, Wilma Mansveld.