Alors que des manifestants ont demandé samedi à Columbia le retrait du drapeau confédéré, la police enquête sur Dylann Roof, auteur de la tuerie de Charleston. Elle examine notamment un site internet où a été publié un manifeste raciste.
Plusieurs milliers de manifestants se sont rassemblés, samedi 20 juin, en Caroline du Sud pour exiger le retrait du drapeau confédéré, symbole controversé du Sud des États-Unis, trois jours après la mort de neuf Noirs à Charleston, abattus par un Blanc.
"Descendez-le", a scandé la foule jeune et métissée réunie devant le Parlement local à Columbia, la capitale de la Caroline du Sud, où le drapeau polémique continue de flotter. Les manifestants ont aussi entonné "We Shall Overcome" ("Nous triompherons"), un chant emblématique des marches pour les droits civiques des Noirs aux États-Unis, et brandi des pancartes exigeant le retrait du drapeau confédéré, décision qui est du ressort du Parlement local.
"Nous ne pouvons plus tolérer" que le drapeau continue d'être un flambeau pour ceux qui ont de "mauvaises opinions", a déclaré l'avocate et militante Sarah Leverette, 95 ans, recueillant les applaudissements de la foule.
Le débat sur le drapeau confédéré, symbole durable de la fierté et de l'héritage du Sud pour ses partisans, celui du racisme et de la théorie de la suprématie blanche pour ses détracteurs, est relancé depuis la tuerie raciste dans la ville historique et touristique de Charleston mercredi, l'une des pires de l'histoire récente des États-Unis.
Les armes dans le viseur d'Obama
Une pétition nationale a rassemblé plus de 370 000 signatures sur le site MoveOn.org, dénonçant le drapeau confédéré comme un "symbole de la rébellion et du racisme" et appelant à "de meilleurs États-Unis d'Amérique".
Pour le président Barack Obama, cité par son porte-parole Eric Schultz, "le drapeau confédéré appartient au musée". Mitt Romney, ancien candidat républicain à la Maison Blanche, a tweeté : "Descendez le drapeau confédéré du parlement de Caroline du Sud. Pour beaucoup, c'est un symbole de la haine raciale. Retirez-le maintenant, en hommage aux victimes de #Charleston."
"Bonne remarque, Mitt", lui a répondu Barack Obama sur Twitter.
Good point, Mitt. https://t.co/Ryusfp8Xbh
— President Obama (@POTUS) 21 Juin 2015Vendredi soir à San Francisco, le président américain a aussi accusé le Congrès à Washington, aux mains des Républicains, de ne pas avoir légiféré plus sévèrement sur les armes à feu. "Nous ne savons pas si cela aurait évité Charleston, mais il y aurait quelques Américains de plus avec nous", a-t-il tonné.
Le massacre a eu lieu mercredi soir à Charleston, lorsque Dylann Roof, 21 ans, a pu s'introduire dans une soirée de lecture biblique de l'église. Après avoir sagement assisté à une heure d'étude, le jeune homme à la coupe au bol s'est levé et a ouvert le feu, touchant à plusieurs reprises ses victimes.
Un blog raciste découvert
Avant de passer à l'acte, il aurait dit, selon une survivante : "Vous avez violé nos femmes, et vous prenez le contrôle du pays. Je dois faire ce que j'ai à faire". Dylann Roof a été inculpé vendredi pour les neufs meurtres et pour "détention d'arme à feu dans le cadre d'un crime violent". Il est maintenu en détention.
Les enquêteurs cherchent toujours à en savoir plus sur son mobile et sa personnalité, ce qui pourrait permettre à la justice fédérale, qui étudie la piste d'un acte de "terrorisme intérieur", de requalifier les faits.
Ils examinent notamment un site internet raciste découvert après la tuerie. Ce blog, semblant appartenir à Dylann Roof, montre des dizaines de photos du jeune homme, armé, brûlant le drapeau fédéral américain, brandissant au contraire le drapeau confédéré et justifiant a priori, dans un texte raciste, son crime par sa haine des Noirs. Le FBI a dit prendre des mesures pour "vérifier l'authenticité" de ce site.
À cet égard, son apparente nostalgie de l'apartheid en Afrique du Sud, les témoignages de ses amis et la découverte de son blog raciste et suprématiste - s'il est authentifié - donnent de premiers éléments.
"Je n'ai pas le choix (...) J'ai choisi Charleston parce que c'est la ville historique de mon État et qui a eu à un moment le ratio le plus élevé de Noirs par rapport aux Blancs dans le pays", selon le manifeste du site internet ouvert, selon des médias américains, en février au nom de Dylann Roof.
"Nous n'avons pas de skinheads, pas de véritable KKK [Ku Klux Klan, NDLR], personne ne fait rien d'autre que de parler sur Internet. Quelqu'un doit avoir le courage de le faire dans le monde réel et j'imagine que cela doit être moi", ajoute l'auteur avant de se lancer dans une série de diatribes racistes contre les Noirs "stupides et violents".
Le jeune homme, vite déscolarisé et chômeur, vivait dans une petite ville rurale. Il faisait également partie de ces Américains sudistes qui s'identifient encore au drapeau confédéré à treize étoiles rouge, blanc et bleu. Sur le site du manifeste, on peut voir plusieurs photos de lui, toujours seul, brandissant un drapeau des confédérés.
Avec AFP