
Manuel Valls, connu pour sa passion le Barça, le club phare de sa Catalogne natale, est au centre d’une polémique, après son voyage en avion gouvernemental à Berlin, pour assister, avec deux de ses enfants, à la finale de la Ligue des Champions.
Le voyage en Falcon gouvernemental de Manuel Valls à Berlin, pour assister à la finale de la Ligue des Champions, le 6 juin, ne cesse de défrayer la chronique. Ce déplacement aux frais du contribuable, effectué en plein milieu du congrès du PS, est-il justifié, sachant qu’aucun club français n’y participait ? Le chef du gouvernement, connu pour sa passion pour le football et en particulier pour le FC Barcelone, club de sa ville natale, a-t-il commis un écart à la règle d'exemplarité qu'il affectionne tant ? Était-ce un voyage officiel ou une escapade privée aux frais de l'État ?
Michel Platini : J'avais dit à Manuel Valls que je l'inviterai à Berlin si le FC Barcelone était en finale"
L’affaire a pris une nouvelle tournure mardi l'entourage du Premier ministre a confirmé une information de BFM TV, selona laquelle Manuel Valls était accompagné par deux de ses fils lors de son aller-retour à Berlin. "La présence des enfants dans l'avion n'ajoute strictement rien au coût de l'affrètement" de l'appareil, a assuré à l'AFP l'entourage du Premier ministre. Selon la rédaction de France 2, ce voyage a coûté 19 000 euros. Matignon a estimé de son côté le déplacement autour de 12 000 à 15 000 euros, "même si c'est difficile de chiffrer précisément" le coût d'un voyage en Falcon.
"Je travaille beaucoup"
Pour se défendre, le Premier ministre, qui a également assisté à la finale de Roland Garros dimanche, a choisi dans un premier temps la contre-attaque, non sans maladresse. "Je travaille beaucoup, je m'engage beaucoup. Et puis de temps en temps, il y a aussi un moment de détente, même s'il y a de la tension et de la passion dans le sport", a-t-il glissé pendant le tournoi de tennis.
La veille, il s’était déjà montré passablement agacé. "Je suis Premier ministre. Je me déplace avec les moyens que vous connaissez. N'essayez pas de créer des faux débats", avait-il sèchement répondu aux journalistes à Poitiers, lors du congrès du PS. Puis, lundi, il a évoqué sa "passion" pour le sport et le football, à l'occasion d'une réception à Matignon d'acteurs du monde sportif. "Et parfois, en France, être passionné ça gêne", a-t-il taclé, visiblement agacé par la tournure des évènements.
Officiellement, pour justifier le déplacement de Manuel Valls en avion de la République, Matignon a affirmé lundi auprès de l'AFP que le voyage à Berlin était "institutionnel et officiel", pour apporter notamment un "signal de soutien" à Michel Platini, au moment où la Fifa croule sous les scandales. Le Premier ministre était l'invité du président de l'UEFA, pour évoquer également l'organisation de l'Euro-2016 en France, selon Matignon.
Ces questions ont été abordées lors d'une rencontre avec l’ancienne gloire du football français, avant le match, vers 19 h. Mardi, l’UEFA a confirmé de son côté que Manuel Valls s’était rendu à la finale Barça-Juve sur invitation de Michel Platini, afin "de parler de l'Euro 2016". Lors de leurs discussions, ils ont été rejoints par Jacques Lambert, le président du comité d'organisation de cette compétition, a précisé un porte-parole de l'instance européenne du football.
"Qui paie tous ces déplacements ?"
Toujours est-il que ce rendez-vous avec le patron de l’UEFA ne figurait pas à l'agenda officiel de Manuel Valls, et qu'une rencontre entre Michel Platini et François Hollande est programmée pour mercredi. En outre, aucune image ni aucune photo ne sont venues confirmer cette réunion.
Lundi, le président en personne a pris la défense de Manuel Valls. "Le Premier ministre avait une réunion avec l'UEFA", au sujet de l'Euro-2016 ou des scandales de corruption de la Fifa, a justifié François Hollande depuis le sommet du G7 en Bavière.
Si rien n'interdit au président de la République et au Premier ministre d'utiliser les avions du gouvernement à titre privé, ils doivent cependant alors rembourser à l'État "une somme forfaitaire", a expliqué lundi le député PS René Dosière, spécialiste des questions d'éthique financière des élus.
Depuis dimanche, l'opposition n'a cessé de s'en prendre à Manuel Valls, en l’accusant de mélange des genres et de ne rater aucun "évènement people". "C'est le spectacle d'un Premier ministre sans lien avec la réalité. Il ne touche plus le sol. Qui paie tous ces déplacements ? Quand est ce qu'il a le temps de s'occuper des problèmes des Français ?", a taclé lundi matin l'un des porte-parole du parti Les Républicains, Sébastien Huyghe.
"Une faute politique"
"Parfois, les hommes politiques en fonction perdent le sens des réalités", a accusé l'ancien dirigeant du MoDem François Bayrou. Il a déploré que Manuel Valls ne se soit pas "rendu compte du fait que ça choquerait beaucoup de gens que l'argent public prenne en charge un moment de détente et de passion pour le Premier ministre".
"C'est une faute politique et c'est une faute morale. Il faut qu'il rembourse ce déplacement privé. Rendez l'argent à l'État M. Valls", a pour sa part accusé le député européen et ex-ministre Renaud Muselier (Les Républicains).
Enfin, le député Benoist Apparu (Les Républicains), qui n'avait d'abord pas trouvé à redire à la présence du Premier ministre à Berlin, a estimé mardi que ça commençait "à sentir un peu le roussi". "J'avoue que la nouvelle du jour avec ses deux enfants, si elle se vérifie, si elle est confirmée, je trouve que ca commence à faire beaucoup, qui plus est quand on nous donne en permanence des leçons de morale", a-t-il asséné sur France 3.
Avec AFP et Reuters