
L’eurodéputé socialiste Guy Bono, pourfendeur de la loi contre le téléchargement illégal sur Internet au Parlement européen, assure que la France s’est mise "hors-la-loi" en adoptant un tel texte. Interview.
FRANCE 24 : La commissaire européenne en charge des Nouvelles technologies, Viviane Reding, ne voit rien dans le projet de loi français Hadopi qui contredise le droit européen. Est-ce, pour vous, un échec ?
Guy Bono : Non, pas du tout. Madame Reding est en campagne pour le renouvellement de son poste et elle ne veut pas se mettre à dos un État membre. Elle ne veut pas contrarier Monsieur Sarkozy. Je relève d'ailleurs, au passage, qu'elle n'a pas toujours eu cette position.
La France peut encore faire jouer la "clause de subsidiarité", une dérogation qui lui permettra d'appliquer la loi Hadopi au cas où l'Union la juge contraire au droit communautaire...
G. B. : Deux choses. D'abord, un article stipule que lorsque l’Union européenne légifère sur un dossier, les États membres doivent s’abstenir d'en faire autant sur le même sujet. C'est précisément ce que nous sommes en train de vivre, avec les votes du Paquet télécoms au niveau européen et de la loi Hadopi en France. Paris n'aurait donc pas dû faire voter cette loi.
Ensuite, un autre article précise que, dans un certain nombre de domaines - parmi lesquels la protection des consommateurs -, la loi européenne doit être appliquée immédiatement. Puisque la loi Hadopi n’est pas conforme au droit européen, la France ne peut pas l’appliquer pour le moment.
Quelle est la prochaine étape dans ce dossier ?
G. B. : La Commission européenne va être saisie et entamera une procédure d’infraction. Un juge européen décidera si l’accès à Internet est un droit fondamental ou non. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, mais je crois le contraire. Tous les juristes que j’ai consultés m’ont dit que le juge statuerait dans ce sens. La procédure prendra peut-être un an ou deux, mais la loi Hadopi ne pourra pas entrer en vigueur.