Soucieux de se réconcilier avec Rabat, Paris s'apprête à distinguer Abdellatif Hammouchi, bien qu'il soit visé en France par des plaintes pour "torture". "Une honte", estime la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme.
Alors en visite au Maroc, le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a annoncé, samedi 14 février, que Paris décorerait prochainement Abdellatif Hammouchi, le chef du contre-espionnage marocain, pourtant visé en France par des plaintes pour "torture". Déjà chevalier de l'ordre de la Légion d'honneur depuis 2011, le patron de la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST) marocain sera élevé au rang d'officier, au nom de l'"estime" du gouvernement français.
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L'annonce de cette future distinction fait l'objet de vives critiques à Paris. Décorer Abdellatif Hammouchi dans ces circonstances "me paraît un véritable scandale, une honte pour la France", a clamé Me Patrick Baudouin, avocat d'un des plaignants et président d'honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH).
"Avilissant pour la France"
"C'est avilissant pour la France d'avoir cédé dans le cadre d'un deal passé avec les autorités marocaines pour permettre un rétablissement de la coopération militaire et sécuritaire. C'est une façon de perdre son âme", a estimé l'avocat. Avant d’ajouter : "Il est difficile d'apparaître ensuite comme un pays qui vante partout le respect des droits de l'Homme".
"Les deux pays ont un rôle particulier à jouer ensemble pour dire un non implacable au terrorisme et à l'intolérance", a pour sa part plaidé devant la presse, Bernard Cazeneuve, premier officiel français à se rendre au Maroc depuis la fin de la brouille.
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Le Maroc et la France viennent de se réconcilier après une année de brouille née justement du dépôt de plaintes à Paris contre Abdellatif Hammouchi. Des policiers français s'étaient rendus à la résidence de l'ambassadeur du Maroc près de Paris pour notifier à Abdellatif Hammouchi une demande d'audition de la justice française.
Rabat avait aussitôt suspendu la coopération judiciaire, qui n'a été rétablie que fin janvier, à la faveur d'un accord entre les deux gouvernements. La réconciliation a été scellée le 9 février 2015 à l'Élysée par le président François Hollande et le roi Mohammed VI, actuellement en France.
Avec AFP