Le Premier ministre Manuel Valls a clairement rejeté mardi l'idée d'un "Patriot Act à la française", appelant à des mesures spécifiques pour lutter contre le terrorisme dans le respect de la "démocratie", du "droit" et de la "liberté".
Manuel Valls a estimé, mardi 13 janvier, devant l'Assemblée nationale que, face au terrorisme, il fallait prendre "des mesures exceptionnelles", mais "jamais des mesures d'exception" mettant en danger l'État de droit, rejetant ainsi clairement l’idée émise par certaines voix à droite d’un "Patriot Act à la française".
"À une situation exceptionnelle doivent répondre des mesures exceptionnelles. Mais je le dis avec la même force : jamais des mesures d'exception qui dérogeraient au principe du droit et des valeurs", a déclaré le Premier ministre devant les députés, lors de l'hommage aux victimes des attentats de la semaine dernière.
"La meilleure des réponses au terrorisme qui veut précisément briser ce que nous sommes, c'est-à-dire une grande démocratie, c'est le droit, c'est la démocratie, c'est la liberté et c'est le peuple français", a-t-il lancé.
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"Avec détermination, avec sang-froid, la République va apporter la plus forte des réponses au terrorisme : la fermeté implacable dans le respect de ce que nous sommes, un État de droit", a martelé Manuel Valls, qui a assuré que le gouvernement venait devant les parlementaires "avec la volonté d'écouter et d'examiner toutes les réponses possibles, techniques, réglementaires, législatives, budgétaires".
"Sommes-nous en guerre ? La question a, en réalité, peu d'importance, car les terroristes jihadistes en nous frappant trois jours consécutifs y ont apporté, une nouvelle fois, la plus cruelle des réponses. Il faut toujours dire les choses clairement : oui, la France est en guerre contre le terrorisme, le jihadisme et l'islamisme radical", a-t-il estimé.
"La France n'est pas en guerre contre une religion. La France n'est pas en guerre contre l'islam et les musulmans. La France protégera (...) comme elle l'a toujours fait, tous ses concitoyens : ceux qui croient comme ceux qui ne croient pas", a poursuivi le chef du gouvernement.
Internet contrôlé, fichier de terroristes présumés
Pour cela, le Premier ministre a affirmé qu'était venu "le temps de la lucidité et de l'action", énumérant une liste de mesures pour améliorer la lutte antiterroriste et appelant les députés à répondre "avec détermination" et "sérénité" aux questions ouvertes par les sanglants attentats de la semaine dernière, "sans jamais céder à la précipitation".
Manuel Valls a notamment souligné la nécessité de "régulièrement renforcer" les "services en charge du renseignement intérieur et la juridiction antiterroriste". "Tirer des leçons" des attentats de la semaine dernière, "c'est d'abord prendre conscience que la situation change en permanence et que les services en charge du renseignement intérieur et la juridiction anti-terroriste doivent être régulièrement renforcés", a affirmé le Premier ministre.
Parmi les mesures présentées, le chef du gouvernement a annoncé la création "avant la fin de l'année" de "quartiers spécifiques" en prison pour les détenus "considérés comme radicalisés". Il a par ailleurs souligné "la nécessité de créer, au sein de la direction de la Protection judiciaire de la jeunesse, une unité de renseignement, à l'instar de ce qui est fait dans l'administration pénitentiaire".
Manuel Valls a également demandé au ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve des propositions "dans les huit jours" concernant le contrôle d'Internet. "Elles devront concerner notamment Internet et les réseaux sociaux, plus que jamais utilisés pour l'embrigadement, la mise en contact et l'acquisition de techniques permettant de passer à l'acte."
Le Premier ministre a aussi souhaité la mise en place d'un "nouveau fichier" recensant les personnes condamnées pour terrorisme ou "membres d'un groupe de combat". "Il obligera les personnes condamnées à des faits de terrorisme ou ayant intégré des groupes de combat terroristes à déclarer leur domicile et à se soumettre à des obligations de contrôle", a-t-il précisé.
Manuel Valls a enfin annoncé que le dispositif français en vue de la mise en place d'un système européen sur les échanges de données des passagers européens du transport aérien PNR (Passenger name record, données des dossiers passagers) serait prêt en septembre 2015. Ce système est actuellement gelé au Parlement européen.
Avec AFP