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Présidentielle avancée : le coup de poker du gouvernement grec

Après la décision de la zone euro de prolonger de deux mois son programme d'aide, le gouvernement grec a décidé de tenter un coup en avançant de deux mois son élection présidentielle au 17 décembre. Le Premier ministre Samaras joue son avenir.

Le gouvernement grec, fragilisé par le blocage des négociations avec la troïka, va devoir jouer à quitte ou double : accélérer la procédure d'élection du président de la République en espérant le succès de son candidat, avec le risque d'un échec qui entraînerait des législatives anticipées difficiles.

Tout va se jouer autour de Noël : l'exécutif a annoncé, lundi 8 décembre, un premier tour le 17 décembre pour que les 300 députés se prononcent sur le successeur du chef d'État sortant Karolos Papoulias. Deux autres tours sont prévus, le cas échéant, les 22 et 27 décembre.

Cette accélération du calendrier pour une élection qui devait se tenir en février ou en mars a été provoquée par la décision de la zone euro de prolonger de deux mois le programme d'aide de 240 milliards d'euros dont bénéficie la Grèce depuis 2010 et qui arrive à échéance le 31 décembre.

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Cette prolongation semblait inévitable en l'absence d'accord entre Athènes et la troïka sur les conditions permettant le versement d'une dernière enveloppe de 1,8 milliard d'euros et la mise à disposition d'une ligne de crédit de précaution pour accompagner le retour de la Grèce sur les marchés.

"La période à venir est essentielle pour trouver un accord, régler les questions comme celle de la dette, et la Grèce doit être pleinement en capacité de mobiliser ses forces dans un climat de rassemblement national et de stabilité politique", écrit le gouvernement d'Antonis Samaras dans un communiqué.

L'ancien commissaire européen Stavros Dimas candidat

Ce dernier estime que ces conditions ne sont pas réunies actuellement et en rejette la responsabilité sur Syriza (gauche radicale), principal parti d'opposition, clairement en tête des sondages, et accusé "d'intriguer ouvertement pour empêcher l'élection du président de la République" et de "transmettre des messages d'incertitude sur les marchés".

La décision du gouvernement grec d'avancer de deux mois la date de l'élection présidentielle laisse penser que le Premier ministre Antonis Samaras croit davantage en la possibilité de rallier suffisamment de députés derrière un candidat, ce qui permettrait d'éviter des législatives anticipées, déclarent certains analystes.

Un candidat doit en effet rallier les suffrages d'au moins 180 des 300 élus de la Vouli, le Parlement monocaméral grec. Or, le gouvernement de coalition grec ne peut en l'état compter que sur 155 députés.

Pour réussir son coup de poker, Antonis Samaras a annoncé, mardi 9 décembre, que l'ancien commissaire européen à l'Environnement Stavros Dimas avait été choisi comme candidat à la présidence par la coalition de gouvernement.

"Lorsque l'actuel parlement élira le président à la fin du mois, les nuages se dissiperont et le pays sera prêt à entrer officiellement dans l'ère de l'après plan de renflouement", a affirmé Antonis Samaras dans une allocution télévisée.

Avocat de 73 ans, Stavros Dimas, qui s'est fait élire député pour la première fois en 1977, est une figure de la Nouvelle démocratie (ND), le parti conservateur d'Antonis Samaras, dont il est vice-président depuis 2010. Commissaire européen à l'Environnement de 2004 à 2009, il a détenu plusieurs portefeuilles, dont celui de ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de techniciens au pouvoir à l'apogée de la crise grecque en 2011-2012.

"Un chantage au vote des députés

Le calendrier du marathon électoral grec va ainsi se superposer avec la course de fond engagée pour résoudre les différends avec les bailleurs de fond du pays.

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"Le gouvernement va pouvoir poser un dilemme aux indécis : ‘élisez le président pour permettre à la négociation avec la troïka d'arriver à son terme’", juge le politologue Ilias Nikolakopoulos. "Le piège est double pour Syriza qui, s'il arrive au pouvoir en février, n'aura aucune marge de temps pour négocier avec la troïka", ajoute-t-il.

Le parti Syriza et son dirigeant Alexis Tsipras voient les choses autrement, assurant que le vote du budget, dimanche soir, par 155 voix pour, "a montré qu'il n'existe aucune majorité de 180 voix pour le gouvernement".

"La décision - prise avec la troïka - d'accélérer l'élection présidentielle est une tentative désespérée de dissimuler les nouvelles mesures (d'austérité, NDLR) et un chantage au vote des députés", dénonce le parti d'opposition.

Avec AFP et Reuters