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Attendu depuis des mois, un rapport parlementaire sur les méthodes de torture utilisées par la CIA après les attentats du 11-Septembre sera rendu public, mardi. Un document de 500 pages, qui aura coûté, selon les républicains, 40 millions de dollars.

Le sénat américain s'apprête à rendre public, mardi 9 novembre, un rapport parlementaire sur les méthodes de torture utilisées par la CIA après les attentats du 11 septembre 2001. Fruit de plus de trois ans d'enquête - de 2009 à 2012 -, ce document vise à faire la lumière sur le programme créé en secret par l’agence de renseignement américaine pour interroger des détenus soupçonnés de liens avec Al-Qaïda, notamment par simulation de noyade ou privation de sommeil. L'une des questions récurrentes est de savoir si ces méthodes ont permis d'obtenir des renseignements cruciaux.

"Le président pense qu'il est important qu'il soit publié pour que les gens aux États-Unis et à travers le monde comprennent exactement ce qu'il s'est passé", a expliqué Josh Earnest, porte-parole de Barack Obama.

Le locataire de la Maison Blanche a mis fin à ce programme dès son arrivée au pouvoir en janvier 2009. Tout en reconnaissant qu'il n'existait pas de "bon moment" pour publier un tel document, Josh Earnest a jugé cela indispensable pour s'assurer que "cela ne se reproduise jamais".

Steve Warren, porte-parole du Pentagone, a indiqué que les centres de commandement régionaux ont été informés de la "publication imminente" du rapport. Face à la crainte de possibles réactions violentes à travers le monde, ils ont reçu l'ordre de "prendre les mesures de protection adéquates" autour des installations diplomatiques et des bases militaires américaines.

Un résumé de 500 pages

Le rapport d'enquête confidentiel a été approuvé par la commission du renseignement du Sénat en décembre 2012, et ses membres ont voté en avril la publication d'un résumé d'environ 500 pages, expurgé des informations les plus sensibles. Mais le processus s'est cependant poursuivi pendant huit mois : les sénateurs et la Maison Blanche étaient en désaccord sur le volume d'informations à ne pas divulguer, comme les noms de code des agents de la CIA, ou les pays ayant coopéré avec le programme secret.

Lundi 8 décembre, Dianne Feinstein, présidente de la Commission du renseignement, a jugé que cette procédure était salutaire pour "une société juste qui s'appuie sur le droit". "Quand nous commettons des erreurs, nous les admettons et nous allons de l'avant", a ajouté la sénatrice. Cette dernière s'est battue avec acharnement pour que la version déclassifiée du rapport ne soit pas trop rabotée.

Opposition des républicains

De nombreux républicains ont dénoncé par avance la publication d'une enquête qu'ils jugent biaisée et dont la réalisation aura coûté, soulignent-ils, 40 millions de dollars au contribuable américain. L'ancien vice-président Dick Cheney (sous la présidence de George W. Bush) a vigoureusement défendu ces techniques d'interrogatoire, jugeant qu'elles étaient "totalement justifiées". "Le programme a été autorisé [...] et il a été examiné d'un point de vue légal par le ministère de la Justice", a-t-il déclaré au "New York Times". Évoquant les agents de la CIA qui ont mené à bien ce programme, il a jugé qu'ils "devraient être décorés plutôt que d'être critiqués".

Dans une tribune publiée dans le "Washinston Post", Jose Rodriguez, ancien responsable de ce programme au sein de la CIA, a pour sa part dénoncé la "grande hypocrisie" des politiques sur ce dossier. "Nous avons fait ce qui nous a été demandé [...] et nous savons que cela a été efficace", a-t-il plaidé. "Une décennie plus tard, en guise de récompense nous entendons certains de ces mêmes politiques faire part de leur indignation et - pire - déformer les faits et minimiser les succès obtenus".

Début août, Barack Obama s'était longuement exprimé sur ces techniques d'interrogatoire "que toute personne honnête devrait considérer comme de la torture", jugeant que les États-Unis avaient "franchi une ligne". Mais s'il avait dénoncé les méthodes, le président américain avait aussi appelé – à la surprise de certains démocrates - à mettre les événements en perspective. "Il est important de se souvenir combien les gens avaient peur", avait-il argumenté. "Ils ne savaient pas si d'autres attaques étaient imminentes. Il y avait une énorme pression sur les épaules des forces de sécurité."

Avec AFP