![Meurtre du soldat Rigby : Facebook accusé d’avoir "du sang sur les mains" Meurtre du soldat Rigby : Facebook accusé d’avoir "du sang sur les mains"](/data/posts/2022/07/19/1658251118_Meurtre-du-soldat-Rigby-Facebook-accuse-d-avoir-du-sang-sur-les-mains.jpg)
Un récent rapport parlementaire britannique assure que Facebook détenait des informations, qui auraient permis au service de renseignement d’empêcher le meurtre du soldat Lee Rigby, âgé de 25 ans, par des islamistes radicaux en 2013.
"Facebook a le sang de mon frère sur ses mains", "Facebook nous a tous laissés tomber". Sara McLure et Ian Rigby, la sœur et le père du soldat britannique Lee Rigby, tué dans le sud de Londres par deux islamistes radicaux en mai 2013, ne décolèrent pas depuis deux jours. Le rapport parlementaire sur les circonstances de cet assassinat, publié mardi 25 novembre, laisse entendre qu’un site Internet détenait des informations qui auraient pu permettre d’éviter cette tragédie.
Les conclusions de l’enquête ne citent à aucun moment Facebook. Mais des fuites dans les médias britanniques ont pu établir qu’il s’agissait du roi des réseaux sociaux.
L’un des meurtriers de Lee Rigby, Michael Adebowale, avait fait état, en décembre 2012, sur le site de son intention de "tuer un soldat britannique", soit six mois avant les faits. Il s’était confié lors d’une discussion avec un certain "Foxtrot", identifié comme étant un internaute yéménite, qui l’a encouragé à passer à l’action. Michael Adebowale a, d’après le rapport, ajouté à ses dires des “images explicites” qui ne laissaient que peu de doutes sur le traitement qu’il comptait infliger à sa victime.
"Un havre de tranquillité pour les terroristes"
Si Facebook avait remis aux autorités britanniques cette conversation, "le MI5 [l’agence de sécurité nationale britannique, NDLR] aurait pu éviter l’attaque", a estimé Malcolm Rifkind, le président du comité parlementaire pour la Sécurité et le Renseignement. Pour ce responsable politique, ce raté prouve que Facebook "fournit, même si ce n’est pas intentionnel, un havre de tranquillité pour les terroristes".
Une attaque ciblée qui n’a pas manqué de soulever une vive polémique au Royaume-Uni. D’autant plus qu’elle tombe à un moment politiquement sensible pour les géants américains du Net. Elle intervient après les déclarations incendiaires de Robert Hannigan, le nouveau directeur du GCHQ - l’équivalent britannique de la NSA américaine. Il avait accusé, début novembre, les Google, Facebook & Co. de naïveté coupable à l’égard de l’utilisation de leurs outils par les terroristes islamistes. Le chef des cyberespions au service de sa majesté visait, à l’époque, les efforts des grands groupes américains pour rendre leurs produits moins perméables aux techniques d’espionnage électronique.
Un ancien chef du contre-terrorisme britannique à la rescousse de Facebook
Avec l’affaire Rigby, on est passé du discours théorique au cas pratique reliant directement l'un de ces mastodontes de l’Internet à une tragédie qui a ému tout le pays. Il n’en a pas fallu plus pour que le Premier ministre David Cameron s’empare de l’affaire. Le chef du gouvernement a appelé Facebook à faire davantage pour lutter contre la propagande terroriste en ligne et il a accepté de rencontrer la famille de Lee Rigby.
Entre l’émoi et la colère des proches du militaire et la montée au créneau de David Cameron, Facebook et ses défenseurs connaissent des temps difficiles au Royaume-Uni. Le roi des réseaux sociaux s’est contenté de déclaré : “Nous ne commentons pas les cas particuliers, mais notre position est claire : nous ne permettons pas la publication de contenus terroristes sur notre site et prenons les mesures nécessaires pour empêcher que notre service soit utilisé à ces fins”.
Le réseau social dispose d’un outil pour traquer les messages de propagande terroriste et les effacer. Mais, dans ce cas précis, "il n’a repéré la discussion citée dans le rapport qu’après les faits", rappelle le site du quotidien "The Guardian".
Facebook a, en fait, laissé à d’autres le soin de le défendre. Liberty, un groupe de défense des droits individuels, a condamné la "tentative [du rapport] de rejeter la faute sur les groupes de télécommunication à qui on demande de faire le travail que les services de renseignement n’ont pas su faire".
Un ancien chef du contre-terrorisme britannique, Richard Barrett, a aussi jugé que les attaques contre Facebook n’étaient pas justifiées. Il a rappelé à la BBC que demander au réseau social d’aider les services de renseignement en vertu d’une "responsabilité civile" ouvrait une porte dangereuse. Cela signifierait, d’après lui, que d’autres pays, au régime plus autoritaire, pourraient légitimement exiger le même niveau de coopération. Ce qu’il ne juge pas souhaitable si on veut défendre les droits des individus dans ces États.