Plus de 40 000 habitants de la vallée de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, ont fui les violents combats entre les Taliban et l'armée pakistanaise, ces dernières 24 heures. La région risque de sombrer dans une grave crise humanitaire.
AFP - Plus de 40.000 personnes avaient fui mercredi Mingora, le chef-lieu du district de Swat, dans le nord-ouest du Pakistan, où l'armée et les talibans s'affrontent, mettant en péril un accord de cessez-le-feu controversé, selon les autorités locales.
Depuis dix jours, les militaires ont lancé une offensive contre les combattants islamistes liés à Al-Qaïda dans les districts voisins de Buner et Lower Dir, après que ces derniers eurent profité de l'accord de cessez-le-feu signé mi-février pour gagner du terrain au-delà de Swat, à une centaine de kilomètres seulement au nord-ouest d'Islamabad.
Et depuis quelques jours, des combats sporadiques éclatent dans la vallée de Swat, autrefois le site le plus touristique du pays, dont les talibans avaient pris le contrôle il y a près de deux ans.
Alors que l'accord de Swat apparaît plus que jamais compromis, un mini-sommet doit réunir mercredi à Washington les présidents pakistanais et afghan, Asif Ali Zardari et Hamid Karzaï, et leur homologue américain Barack Obama.
La récente progression des talibans a suscité l'inquiétude des Etats-Unis, qui ont multiplié les pressions sur le Pakistan et ont chaudement salué le lancement de l'offensive militaire.
"Plus de 40.000 personnes ont fui Mingora depuis mardi après-midi", a déclaré au téléphone à l'AFP Khushhal Khan, un haut responsable de l'administration du district.
"40.000, c'est un minimum, et le chiffre est sans doute plus élevé", a confirmé un officier des forces de sécurité sur place, sous couvert de l'anonymat.
Mardi, les autorités provinciales avaient assuré avoir préparé des abris pour environ 500.000 personnes susceptibles de fuir Swat.
Cette contre-attaque des militaires aux portes de Swat et le retour des talibans dans les rues de Mingora dès le week-end dernier laissaient déjà penser que l'accord de paix signé avec le gouvernement aura bientôt fait long feu.
Cet accord avait été dénoncé comme une "abdication" par Washington, qui redoute la progression des talibans hors de leur fief des zones tribales, frontalières avec l'Afghanistan.
Après avoir fait régner pendant presque deux ans la terreur dans la vallée de Swat, les talibans avaient négocié avec le gouvernement, mi-février, un cessez-le-feu en échange de l'instauration de tribunaux islamiques à Swat et dans six districts voisins.
Mais ils ont depuis refusé de déposer les armes et progressé au-delà de Swat, notamment à Buner et dans le Lower Dir.
Barack Obama a fait de la lutte contre les talibans dans le nord-ouest du Pakistan l'une de ses priorités pour la stabilisation de l'Afghanistan, où 21.000 soldats américains doivent prochainement venir renforcer les 38.000 qui y combattent déjà les insurgés.
Les Etats-Unis, dont les missiles ciblent régulièrement des cadres présumés d'Al-Qaïda dans les zones tribales pakistanaises, considèrent que le réseau d'Oussama ben Laden a reconstitué ses forces dans le nord-ouest pakistanais, d'où il menace de nouveau, selon Washington, les pays occidentaux.
Mais le Pakistan paye également un lourd tribut à la "guerre contre le terrorisme": outre plus de 2.000 soldats tombés dans le nord-ouest depuis 2002, plus de 1.800 Pakistanais ont été tués par des attentats dans tout le pays en moins de deux ans.
A l'été 2007, les talibans pakistanais et le chef du réseau Al-Qaïda Oussama Ben Laden avaient décrété le "jihad" contre Islamabad pour son alliance avec Washington.