
Trois chefs d’État ouest-africains ont rencontré, mercredi à Ouagadougou, le nouvel homme fort du Burkina Faso, le lieutenant-colonel Zida. La délégation a plaidé pour une transition civile et le maintien des élections en novembre 2015.
Se dirige-t-on vers une transition civile dans 15 jours au Burkina Faso, comme l’a exigé l’Union africaine ? Les tractations entre acteurs de la crise politique se poursuivent à Ouagadougou. Mercredi 5 novembre, le nouvel homme fort du pays, le lieutenant-colonel Isaac Zida, et trois chefs d'État ouest-africains ont discuté des modalités d'un transfert du pouvoir aux civils, six jours après la chute de Blaise Compaoré. Cette rencontre, préparée par d’intenses tractations menées par les émissaires de la troïka (Union africaine, Nations unies et Cédéao) visait notamment à préparer un sommet extraordinaire de deux jours de la Cédéao largement consacré à la situation au Burkina Faso qui doit débuter jeudi au Ghana.
Le président ghanéen John Dramani Mahama, qui dirigeait à Ouagadougou la délégation de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a demandé le maintien de l'élection présidentielle à la date prévue de novembre 2015. "Des élections étaient prévues l'an prochain. Nous pensons que nous devons nous en tenir à cette date du mois de novembre prochain", a-t-il dit. "Cela signifie qu'il y aura un gouvernement de transition pendant un an et qu'un nouveau président sera élu." Les présidents nigérian et sénégalais, Goodluck Jonathan et Macky Sall, ont approuvé ce calendrier, a ajouté le chef de l'État ghanéen.
Discussions difficiles entre les acteurs potentiels de la transition
Outre le lieutenant-colonel Zida – qui a promis mardi de remettre le pouvoir à un gouvernement civil de transition –, le président ghanéen, dont le pays préside actuellement la Cédéao, a rencontré mercredi des dirigeants d'opposition, des partisans de Compaoré, des dignitaires religieux et des représentants de la société civile. Le président Mahama a déclaré que ces entretiens avaient dégagé un large consensus en faveur d'un gouvernement civil de transition. La troïka a précisé que les membres de l'autorité de transition ne devraient pas être autorisés à se porter candidats l'an prochain.
Les participants de la réunion ont été priés de sélectionner trois candidats pour la présidence intérimaire, avant une réunion plénière plus tard dans la journée. Dans la soirée, des représentants de la société civile et de l'opposition burkinabè ont menacé de rompre les négociations si l'ancienne majorité pro-Compaoré n'en est pas exclue. Ils sont sortis de la salle où ils étaient réunis avec les chefs d'État ouest-africains en criant "On ne veut pas de la présence de la majorité !". Les esprits s'échauffant, le service d'ordre a dû intervenir.
Arrestation du chef du parti de l’ex-président Compaoré
Alors que les médiateurs recherchent l’apaisement, la violente guerre des mots intervenue entre les différentes parties a laissé des traces. Assimi Kouanda, le chef du Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), parti du président burkinabè déchu Blaise Compaoré, a été arrêté mardi soir, ont indiqué des sources sécuritaires. Lui et Adama Zongo, président d'un mouvement pro-Compaoré, ont été "convoqués" par la gendarmerie "suite à des propos pouvant troubler l'ordre public et appelant à des manifestations", a déclaré à l'AFP un officier de gendarmerie. "Ils ont ensuite été arrêtés", a indiqué une autre source sécuritaire.
L'interpellation d’Assimi Kouanda serait en partie liée à des propos qu'il avait tenus fin octobre, à quelques jours de l'insurrection. "Si une seule case d'un militant de la majorité est enflammée, normalement dans vos communes, dans vos secteurs, on ne devrait plus trouver une case de responsables de l'opposition debout", avait-il lancé le 25 octobre à des responsables provinciaux du CDP réunis à Ouagadougou. "Si quelqu'un se hasarde à toucher à une de vos mamans ou de vos sœurs, un de vos papas ou de vos grand-frères, (...) cette personne-là ne touchera plus à personne", avait-il menacé.
Mardi, Amadou Dabo, un responsable du Front républicain, coalition de partis alliés au CDP, s'était plaint de "problèmes sécuritaires". "Beaucoup de nos responsables sont menacés, certains de leurs domiciles ont été saccagés", avait-il déploré.
Avec AFP et Reuters