Les forces fédérales mexicaines ont investi, lundi, la ville d’Iguala, localité du sud du pays où 43 étudiants sont portés disparus depuis des heurts avec la police locale le 26 septembre dernier. L'armée a désarmé les policiers de la ville.
L’armée a pris le contrôle d’Iguala et procédé au désarmement des policiers municipaux dans le cadre d’un déploiement des forces fédérales ordonné, lundi 6 octobre, par le président mexicain Enrique Peña Nieto. Une mesure nécessaire pour accélérer l’enquête sur la disparition de 43 étudiants venus manifester dans la ville. Dimanche, deux narcotrafiquants ont avoué avoir abattu 17 étudiants et ont déclaré avoir été appelés par la police locale.
"Les policiers municipaux encore actifs ont été désarmés par le Secrétariat de la défense nationale", a expliqué aux médias le commissaire à la sécurité, Monte Alejandro Rubido.
Ils seront transférés vers une base militaire dans le centre du pays, pendant que leurs armes seront examinées pour vérifier si elles ont servi à commettre des délits, a-t-il précisé.
itUn nouveau corps spécial de gendarmerie, soutenu par l'armée, a été mis en place dans la foulée pour des "tâches de sécurité publique" dans cette commune de 140 000 habitants, a indiqué Monte Alejandro Rubido.
22 policiers municipaux déjà sous les verrous
Plus tôt dans l'après-midi, le président mexicain Enrique Peña Nieto avait assuré que les responsables de l'enlèvement des étudiants seraient punis.
"Dans l'État de droit il n'y a pas la moindre place [...] pour l'impunité", a-t-il déclaré dans un message diffusé en direct à la télévision depuis le palais présidentiel.
Ces faits sont "révoltants, douloureux et inacceptables", a ajouté le chef de l'État, assurant de sa pleine collaboration pour résoudre cette affaire. "Je regrette tout particulièrement la violence qui a été employée et surtout le fait qu'il s'agisse de jeunes étudiants."
Au total, 22 policiers de Iguala ont été arrêtés, accusés de travailler pour un gang du crime organisé, Guerreros Unidos, après la fusillade survenue le 26 septembre dernier contre des autobus transportant des étudiants, pour des raisons encore non élucidées.
Les étudiants, élèves à l'école normale d'Ayotzinapa, connue pour être un foyer de contestation, étaient venus avec des dizaines d'autres du même établissement à Iguala, à 100 km de distance, pour, selon leurs dires, récolter des fonds et manifester.
Ils s'étaient ensuite emparés de trois autobus des transports publics locaux pour rentrer chez eux.
Des policiers municipaux et des hommes armés non identifiés avaient tiré sur ces bus, faisant trois morts, et d'autres fusillades dans la soirée avaient fait trois autres morts.
Des témoins ont assuré avoir vu des dizaines d'étudiants être emmenés peu après dans des voitures de police vers une destination inconnue.
Deux membres présumés de Guerreros Unidos ont avoué avoir tué 17 des étudiants disparus, selon les autorités locales. Parallèlement, 28 corps ont été trouvés dans une fosse près d'Iguala.
Les proches gardent espoir
Les deux suspects ont indiqué avoir fait descendre les étudiants d'un autobus, "se sont emparés de 17 d'entre eux pour les transférer vers les hauteurs d'une colline de Pueblo Viejo [commune d'Iguala], où ils disent les avoir abattus", a rapporté le procureur de l'État de Guerrero, Iñaky Blanco.
"Dans les fosses localisées à Pueblo Viejo, ont été mis en place une couche de branches et des troncs sur lesquels ont été placés les corps des victimes, qu'ils ont arrosés d'une substance inflammable", a-t-il détaillé.
Des spécialistes argentins vont participer aux travaux d'identification des cadavres.
Mais ce travail risque de durer : "Les spécialistes considèrent que le processus [...] va osciller entre 15 jours et deux mois", a souligné le procureur.
Les proches des disparus continuent de les croire vivants. "Nous n'allons pas croire que ce sont nos enfants", a affirmé Manuel Martinez, porte-parole du comité des parents, à propos des corps trouvés dans des fosses, lors d'une conférence de presse donnée à l'intérieur de l'école des étudiants.
La participation du gouvernement fédéral à l'enquête "n'est pas une faveur, c'est une obligation de nous rendre nos enfants en vie le plus tôt possible", a dit de son côté la mère d'un des disparus.
S'il se confirmait que les corps sont ceux des étudiants disparus, il s'agirait de l'un des pires massacres au Mexique depuis le début de la guerre lancée en 2006 contre les narcotrafiquants et qui a fait plus de 80 000 morts.
Avec AFP