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Irak : quand la téléréalité confronte des jihadistes de l’EI à leurs victimes

Réalisée en étroite collaboration avec les forces anti-terroristes et les autorités judiciaires, une émission de la télévision irakienne revient sur les attentats commis en Irak. Sa particularité : filmer leurs auteurs sur les lieux des crimes et les confronter à leurs victimes.

La correspondante de France 24 en Irak, Anne-Sophie Le Mauff, a eu accès aux coulisses du tournage d’une émission de téléréalité irakienne unique en son genre. Intitulé "Aux prises avec la loi", ce programme phare de la télévision publique irakienne "Al Iraqiya" est diffusé chaque vendredi soir depuis neuf mois et rassemble plusieurs millions de téléspectateurs. Son concept : filmer des reconstitutions de scènes de crimes et d’attentats terroristes commis en Irak, un pays qui détient hélas de funestes records en la matière. Et ce, en présence de leurs auteurs qui sont confrontés à leurs victimes.

Des hommes, presque tous membres de l’organisation de l’État islamique (EI), récemment capturés et désormais aux mains de la justice. Les témoignages glaçants des terroristes et la colère des survivants sont les principaux ingrédients de cette émission choc.

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"À mes côtés, l’un des pires criminels de ce pays (…) qui se fait appeler Tahseen. Son vrai nom : Fahak Abadallah Radi. Le terroriste va m’expliquer l’une des opérations qu’il a commise dans ce lieu". C’est en ces termes qu'Ahmed Hassan lance son programme. Un magazine d'informations qu'il présente et réalise, en étroite collaboration avec les forces anti-terroristes et les autorités judiciaires. 

Tahseen, 26 ans, responsable militaire de l’est de Bagdad au sein de l’organisation de l’EI, est passé aux aveux, avec six de ses lieutenants. À son actif : plusieurs dizaines d’attentats à la voiture piégée, de bombes artisanales et d’assassinats au pistolet avec silencieux perpétrés sur une année. Un palmarès macabre qui lui a valu le titre d’émir. Il expose ses motivations à tuer autant d’Irakiens. "Le but était de détériorer la situation sécuritaire, pour avoir des répercussions dans les médias, explique-t-il. C’est le Prince de ma zone qui me l’a dit… ".

"S’il n’y avait pas tous ces gens, je te boufferais"

Lors du tournage de l’émission, placé sous protection policière, l'une de ses nombreuses victimes, qui porte encore les stigmates de l’attentat dans lequel il a été blessé, interpelle l'accusé sous l’œil des caméras. "Pourquoi ? Ne sommes-nous pas musulmans ? N’est-ce pas Dieu qui nous a faits ? Pourquoi nous faire exploser ? Quelle est notre faute ? N’avons-nous pas de familles, n’avons-nous pas de maisons ?"

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Quelques centaines de mètres plus loin, sur les lieux d’un autre attentat, les esprits s’échauffent. "S’il n’y avait pas tous ces gens, je te boufferais, je te jure que je te boufferais, dégueulasse !", hurle un habitant du quartier. Sur le toit de l’immeuble touché par l’explosion, un autre homme pleure de colère : "C’est lâche ce que tu as fait. Il a détruit nos vies, il a brûlé notre argent, c’est un bâtard. Bâtard ! Nos familles sont mortes, nos enfants sont morts, nos amis sont morts, c’est un bâtard !" La situation devient dangereuse, l’équipe du tournage ne s’attarde pas.

"Ça se passe toujours comme ça, c’est arrivé plus d’une fois, explique Ahmed Hassan. Tu sais ce que c’est quand les gens perdent leurs proches, leurs frères, leurs amis, leurs cousins…"

Arme de communication anti-terroriste, "Aux prises avec la loi" a pour objectif de rassurer la population sur l’efficacité des forces armées et sur le fait que des hommes comme Tahseen croupissent désormais en prison. Mais, sur le terrain, les attentats continuent de semer la terreur dans la capitale irakienne.

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