Un an jour pour jour après la destitution du président islamiste Mohamed Morsi, certains Égyptiens déchantent. La plupart des Frères musulmans se cachent ou sont en prison et les jeunes révolutionnaires laïques sont la cible du pouvoir.
Le 30 juin 2013, des dizaines de millions d'Égyptiens défilaient dans les rues pour réclamer le départ des Frères musulmans. Une mobilisation sans précédent, suivie le 3 juillet par l’annonce de la destitution de Mohamed Morsi, en direct à la télévision, par l'ancien ministre de la Défense Abdel Fattah al-Sisi, actuel président d'Égypte. Depuis, la chute des islamistes a été suivie d'une répression sanglante, ayant durement frappé la confrérie des Frères musulmans.
"De nombreux Égyptiens sont prêts à fermer les yeux sur la répression, explique Sonia Dridi, correspondante de FRANCE 24 au Caire. "Car pour beaucoup, la priorité c'est la sécurité. Depuis la destitution du président islamiste l'été dernier, les attentats contre les forces de l'ordre sont quasi-quotidiens dans le pays. La plupart a été revendiquée par des groupes djihadistes basés dans le Sinaï mais les autorités accusent les Frères musulmans d'être derrière ces attaques."
Amr est directeur d'un tour opérateur spécialisé dans le luxe, il a participé à la manifestation du 30 juin 2013 pour réclamer le départ du pouvoir des Frères musulmans. La chute du président Mohamed Morsi a été pour lui un immense soulagement. "J'ai eu l'impression que c'était une renaissance. Cette journée était vraiment extraordinaire et révélatrice. Dieu merci, l'armée est intervenue et a soutenu le peuple", raconte l’homme d’affaires à FRANCE 24.
Comme une grande partie de la population, Amr refuse de parler de Coup d'État. "C'était la volonté collective des Égyptiens, c'est pourquoi ils sont très ennuyés quand ils entendent cette expression. Ils se sentent offensés", explique-t-il.
La répression se poursuit
Mais depuis la destitution du président islamiste par Abdel Fattah al-Sisi, l'ancien chef militaire récemment élu président, certains Égyptiens ont déchanté.
Alfred Raouf, membre du parti libéral "Al-Dostour", avait manifesté contre les Frères musulmans. Mais le jeune homme dénonce aujourd'hui la prise de pouvoir par l'armée, et la sévère répression envers les islamistes et les activistes laïques. "Nous espérions un autre scénario après le 3 juillet. Il y a de nombreux activistes, certains sont des amis, qui ont été détenus, ou emprisonnés avec des verdicts très étranges et inexplicables", raconte Alfred Raouf.
Pour les défenseurs des droits de l'Homme, la répression qui se poursuit sans faiblir depuis juillet 2013 est la plus sanglante qu'ait connu l’Égypte depuis plusieurs décennies. C'est une bataille judiciaire qui se joue en Égypte, où des tribunaux condamnent régulièrement des dizaines d'opposants, notamment en vertu d'une loi décrétant "illégale" toute manifestation n'ayant pas obtenu au préalable l'autorisation du puissant ministère de l'Intérieur.