logo

Les Afghans aux urnes pour le second tour de la présidentielle

Les électeurs afghans ont voté, samedi, pour désigner le successeur d’Hamid Karzaï à la tête de l’État. Ce second scrutin opposait l’ancien ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah à l’économiste Ashraf Ghani.

Les Afghans se sont rendus aux urnes, samedi 14 juin, pour élire le successeur d'Hamid Karzaï à la tête de l’État. Le second tour du scrutin, qui a mobilisé sept millions d'Afghans sur les 12 millions d'inscrits, opposait l'ex-ministre des Affaires étrangères Abdullah Abdullah, ancien conseiller du commandant Massoud, à Ashraf Ghani, anthropologue et économiste passé par la Banque mondiale.

L’Afghanistan s'apprête à vivre la première transition démocratique de son histoire, alors que l’insurrection s'intensifie, et que les Taliban entendent profiter du départ programmé des troupes étrangères. Lors de ce second tour, 46 personnes sont d'ailleurs mortes dans des attaques.

Au premier tour, le 5 avril, Abdullah Abdullah était arrivé en tête avec 45 % des voix, alors qu'Ashraf Ghani en avait récolté 31,6 %. Mais ce dernier, membre de l'ethnie pachtoune, pourrait combler tout ou une partie de son retard en ralliant les voix de la principale communauté du pays (45 % de la population est pachtoune), dispersées au premier tour entre plusieurs candidatures. Si Abdullah Abdullah est lui aussi en partie lié à la communauté pachtoune, son engagement dans l'Alliance du Nord du commandant Massoud le marque plus nettement parmi les Tadjiks.

Les observateurs internationaux déployés dans le pays craignent que le vote ne débouche sur un résultat serré, susceptible de fournir au candidat battu un prétexte pour contester la régularité du scrutin. Dans le pire des scénarios, les fractures ethniques de l'Afghanistan risqueraient de se rouvrir.

"Le pays est en crise et seul un leader fort peut le sauver", estime la parlementaire Shukria Barakzai. Le successeur de Karzaï devra notamment gérer le départ de l'essentiel des forces étrangères déployées en Afghanistan depuis la fin 2001.

Quelque 33 000 soldats américains sont aujourd'hui déployés sur le sol afghan, un contingent auquel s'ajoutent les 17 000 soldats détachés par d'autres pays sous le drapeau de l'Isaf, la Force internationale d'assistance à la sécurité sous commandement de l'Otan, dont la mission arrivera à son terme à la fin de l'année.

Au plus fort de la présence militaire américaine, en 2011, le contingent était de 100 000 soldats. Après le retrait programmé pour la fin de l'année, il ne devrait plus en rester que 9 800, qui seront chargés de former les forces afghanes et de mener des opérations de contre-terrorisme.

Les Taliban promettent de "rétablir l’ordre" si nécessaire

Au premier tour, le taux de participation élevé, proche de 60 %, a été interprété comme un revers pour les Taliban qui avaient promis de perturber le déroulement du scrutin. Mais les observateurs s'attendent à ce que les insurgés, désormais au plus fort de leur traditionnelle "offensive d'été" - plus de 350 "incidents" ont été recensés dans la dernière semaine de mai -, fassent tout pour troubler le second tour.

"Si la situation politique se dégrade du fait de cette mascarade électorale, nous avons la capacité de rétablir l'ordre, ainsi que nous l'avons prouvé lorsque nous gouvernions [de 1996 à 2001, NDLR]", a prévenu Zabihullah Mujahid, un porte-parole du mouvement taliban. "Nous ne laisserons pas notre pays plonger dans le chaos comme l'Irak."

Dans l'entre-deux tours, le 6 juin, Abdullah Abdullah est sorti indemne d'un attentat à la bombe à Kaboul, devant un hôtel où il venait de participer à une réunion publique. L'attaque a fait douze morts et une quarantaine de blessés.

Les autorités ont aussitôt renforcé le dispositif de sécurité. "Nous croyons fermement que rien ne dissuadera les électeurs d'aller voter samedi", a déclaré Sediq Sediqi, porte-parole du ministère de l'Intérieur.

Les premiers éléments de l'enquête, rendus publics par la présidence afghane dans un communiqué, disculpent les Taliban, qui n'ont du reste pas revendiqué l'attentat. Ils pointent en revanche les responsabilités d'"une agence de renseignement d'une puissance étrangère" (l'expression usuelle des autorités afghanes pour désigner le Pakistan) et du Lashkar-e-Taiba (LeT), un groupe armé basé au Pakistan déjà impliqué dans l'attaque commando de novembre 2008 à Bombay, en Inde, qui avait fait 166 morts.

L'Afghanistan compte 12 millions d'électeurs inscrits pour 6 365 bureaux de vote, dans un pays d'un peu moins de 30 millions d’habitants.

Avec Reuters