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envoyée spéciale à Rome – Des milliers de pèlerins ont vécu un dimanche historique lors de la canonisation de Jean-Paul II et Jean XXIII par le pape François, place Saint-Pierre, en présence de Benoît XVI. Plus de 800 000 personnes ont assisté à la cérémonie.

"Aujourd'hui il y a quatre papes place Saint-Pierre !", s'exclame Francesca. Venue de Naples pour assister à la canonisation, cette sexagénaire exprime le sentiment qui prévaut pour la plupart des pèlerins : une journée historique. Le très populaire pape François a proclamé saints, dimance 27 avril, ses prédecesseurs Jean XXIII et Jean-Paul II, en présence de Benoît XVI.

Une foule bigarrée a afflué dès la levée du jour vers la place Saint-Pierre. Alors que les rues adjacentes à la fameuse basilique sont habituellement désertes à cette heure matinale, il est quasi impossible de se frayer un passage. Venus du monde entier, les fidèles n'ont pas ménagé leur peine : certains progressent en fauteuil roulant ou munis d'un déambulateur. Par ailleurs, de nombreux pèlerins ont dormi sur les trottoirs et les pelouses avoisinants le Vatican pour vivre au plus près la canonisation de Jean-Paul et Jean XXIII, à défaut de pouvoir accèder à la place. "Ma fille aînée a voulu dormir avec ses amis sur la place Saint-Pierre", raconte Francesco venu de Milan avec femme et enfants. "Jean-Paul II a été présent toute ma vie, mon existence porte sa signature. Je ne pouvais pas ne pas être là", confie-t-il.

"Jean-Paul II était comme le Christ sur terre"

À l'instar de Francesco, de nombreux fidèles se sont déplacés pour le pape polonais Jean-Paul II dont la mort, en 2005, avait provoqué une grande émotion à travers le monde. "Santo Subito !" "Saint tout de suite !" avait d'ailleurs scandé la foule lors de ses obsèques . "Il faut dire ce qui est. Ici, à Rome, la plupart des gens sont venus pour Jean-Paul II", affirme le père Sylvain, arrivé du Congo Brazzaville. "Il était l'ami des jeunes, et des années après sa mort, il attire les foules", explique le religieux accompagné des sœurs Dora et Marie. Tous trois portent des vêtements à l'effigie des deus nouveaux saints, spécialement conçus pour l'occasion. "C'était important pour nous d'être là aussi pour représenter notre pays à cette célébration", ajoute sœur Dora.

Jean-Marie et Laura sont également venus en famille, de Madrid. "Nous sommes là vraiment pour Jean-Paul II", explique le père."J'ai même donné son nom à mon fils", confie-t-il en désignant le petit garçon dans une poussette. "Jean-Paul II est la personne la plus importante de notre vie. Il était comme le Christ sur terre" affirme l'homme, ému.

Mais c'est chez les Polonais que ce sentiment est le plus fort. Présents en très grand nombre à Rome, ils ressentent une grande fierté. "Nous les Polonais nous pensons depuis le début que Jean-Paul II est un saint, et nous prions pour lui", explique en riant Elizabeth, âgée d'une vingtaine d'années. "Aujourd'hui c'est un grand jour pour les cahtoliques, mais surtout pour la Pologne !"

Pour Michelle, qui a fait le voyage depuis Houston, au Texas, Jean-Paul II est "un exemple de paix". "Mes filles font partie de la génération Jean-Paul II, je voulais qu'elles assistent à cette journée, car nous prions souvent son intercession", explique-t-elle.

Linda et Peggy ont fait le voyage du Minnesota pour vivre ce grand rassemblement. "C'est incroyable de se dire que nous partageons notre foi avec tout ce monde réuni", s'exclame Linda en pleurant d'émotion. "Nous sommes tous réunis au nom de Jésus".

Le pape François salue le courage de "deux papes du XXe siècle"

En attendant le début de la cérémonie, beaucoup prient, malgré le brouhaha, ambiant ou récitent des chapelets. Les rues de la capitale italienne résonnent de chants dans toutes les langues. "Ce n'est pas un voyage, nous nous considérons vraiment en pèlerinage", explique pour sa part Christine, venue de Paris en famille. "En tant que catholiques, nous sommes tous appelés à suivre un chemin de sainteté et nous prions pour cela", poursuit-elle.

Rapidement, les écrans géants s'animent. Après un brève silence, la foule acclame l'arrivée du pape émérite Benoit XVI, qui avance aidé d'une canne. Puis la célébration commence par la litanie des saints. Chacun tend le cou pour voir au mieux. Ensuite, conformément à la tradition, le préfet de la Congrégation pour la Cause des Saints, le cardinal Angelo Amato demande au pape François de procéder à la canonisation de Jean XXIII et Jean-Paul II. Le Saint-Père prononce par trois fois la formule consacrée. Une quinzaine de minutes après le début de la célébration, Jean XXIII et Jean-Paul II sont officiellement saints. L'émotion de la foule est intense.

Floribeth Mora, miraculeusement guérie d'un anévrisme par l'intercession de Jean-Paul II, apporte une relique du pape polonais, un flacon de son sang. C’est un prêtre qui présente au pape François un morceau de peau, relique de Jean XXIII, père du concile Vatican II. Dimanche après-midi, la basilique Saint-Pierre  ouvre exceptionnellement ses portes pour permettre aux pèlerins de se recueillir devant les reliques. En prononçant l'homélie, le pape François a salué "deux hommes courageux" qui "ont connu des tragédies mais n’en ont pas été écrasés". Il a ajouté que les deux nouveaux saints n'ont pas eu peur de "regarder les plaies de Jésus, de les toucher", en référence au texte d'évangile lu en ce premier dimanche après Pâques. Le pape argentin, dont la personnalité n'est pas sans rappeler celles des de ces illustres prédecesseurs, a souligné leur action notamment dans la modernisation de l'Église. Ils ont su "collaborer avec l'Esprit Saint" pour rendre à l'Église sa physionomie d'origine.

Pour nombre de fidèles, ces deux nouveaux saints ont une place si particulière car ils les ont connus vivants et que leur action a influé sur leur vie. "Notre génération a de la chance d'avoir connu les trois derniers pape", estime ainsi Benoit avec un air songeur. "Jean-Paul II est allé chercher les brebis une par une à travers le monde entier", analyse le jeune breton. "Benoit XVI les a catéchisées et le pape François va se charger de les envoyer en mission", dit-il avec émotion. "La ferveur d'aujourd'hui montre qu'ils ont réussi et que la foi catholique est bien vivante."