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Les Algériens de France ont commencé à voter, samedi, pour l’élection présidentielle algérienne. Reportage dans le bureau de vote du XIXe arrondissement de Paris, l'un des deux de la capitale.

Les Algériens de France ont commencé à voter, samedi 12 avril, soit cinq jours avant  le scrutin présidentiel organisé le 17 avril en Algérie. Plus de 800 000 Algériens et binationaux sont inscrits sur les listes électorales des consulats algériens de France.

Six candidats briguent la présidence de la République algérienne. Le président sortant, Abdelaziz Bouteflika, au pouvoir depuis 15 ans, brigue un quatrième mandat mais sa candidature est très critiquée en raison de son état de santé précaire.

En 2004, seulement 33 % des Algériens inscrits sur les listes électorales en France avaient participé au scrutin présidentiel. Samedi matin, à l’École internationale algérienne de la rue Bouret dans le XIXe arrondissement de Paris, où se trouve un des deux bureaux de vote de la capitale, il n'y avait pas foule. France24.com est allé à la rencontre des premiers votants et des abstentionnistes qui organisaient un rassemblement non loin de là.

Mohamed, 69 ans : "Le mandat de trop pour Bouteflika"

"Sincèrement, je suis venu voter car j’habite à côté. Oui, c’est un mandat de trop pour Bouteflika. Il ne devrait pas se représenter. Je ne sais pas s’il va gagner, la loi des urnes le dira. De toute façon, nous les Algériens de France ne sommes qu’une goutte d’eau face aux millions d’Algériens d’Algérie. Mais je voulais donner mon avis car même si je ne vis pas là-bas c’est mon pays, j’y ai mes racines et ma famille. Je ne veux pas que ça brûle." 

Leïla, 50 ans : "Personne d’autre que Bouteflika ne peut gouverner"

"Bouteflika est malade, c'est vrai, mais je l’aime bien et après tout, c’est la tête qui gouverne, pas les pieds. J’ai voté pour lui car il a tout fait pour l’Algérie où j’étais encore il y a quinze jours. Je ne vois pas quelqu’un d’autre que lui gouverner. Je suis sûre et certaine qu’il va être réélu et s’il se présente pour un cinquième mandat, je voterai encore pour lui."

Sebti, 66 ans : "C’est l’entourage de Bouteflika qui veut le garder au pouvoir"

"Bouteflika est malade et vieux. Il ne peut même plus s’exprimer, c’est une honte de faire parler quelqu’un à sa place. Mais c’est son entourage qui veut le garder au pouvoir. J’ai voté pour Abdelaziz Belaïd, un jeune de 50 ans. Mais à mon avis il n’y a pas d’alternative crédible à Bouteflika actuellement. En fait, il faudrait changer tout le système. J’étais encore en Algérie l’an dernier et ce pays n’est pas aussi riche qu’il devrait l’être." 

Abderrahmane, 52 ans : "Bouteflika a fait de l'Algérie le paradis de l'Afrique"

"Je suis venu avec mes enfants pour qu’ils voient comment ça se passe et puissent ensuite faire pareil. J’ai voté Bouteflika comme la dernière fois. Dans ma famille, il n’y a pas d’abstention et on vote à 100 % pour Bouteflika. Président, ce n’est pas un poste pour un stagiaire et si Bouteflika n’a plus la force de gouverner, on pourra mettre un vice-président. L’Algérie fête ses 52 ans d’indépendance et c’est le paradis de l’Afrique. Il y a une autoroute, un nouvel aéroport, de l’eau, tout ça c’est grâce à Bouteflika ! Je lui tire mon chapeau." 

Nabil, 35 ans : "J’espère la paix avant tout"

"Je suis né en Algérie mais j'habite en France depuis douze ans. Je ne comprends pas ceux qui ne vont pas voter. Mis à part Bouteflika, personne n’a la stature pour diriger l’Algérie. Il y a un conflit entre l’ancienne et la nouvelle génération. Mais ça me rassure que les jeunes soient moins nombreux à voter car ils feraient le mauvais choix. L’Algérie c’est ma patrie et j’espère la paix avant tout. Je ne veux pas faire de pronostic, l’essentiel est que celui que j’ai élu passe, c’est tout ce qui compte." 

Saïd, 28 ans, militant du RCD : "C’est toujours la fraude qui l’emporte"

"Je n’irai pas voter. Il faut une transition démocratique en Algérie et elle ne peut pas passer par les urnes car c’est toujours la fraude qui l’emporte. Bouteflika sera le chef de l’État, pas le président car un président est élu. Ceux qui votent pour lui, ce sont les maquisards qui touchent des pensions qu’ils ont peur que le régime leur retire. Le changement en Algérie viendra par consentement ou par la violence. Si on est obligés de l'obtenir par la force, on le fera. La richesse nationale est accaparée par un petit nombre qui tient entre ses mains le destin de tout un peuple. Ce régime, c’est 52 ans de terreur, de discrimination, d’assassinats politiques. L’Algérie mérite mieux."

Khadija, 45 ans : "Ce pouvoir est un ramassis de mafieux"

"C’est une mascarade. Les élections sont déjà jouées d’avance. Tout est programmé pour que le pseudo-candidat [Bouteflika, NDLR] passe. Il est malade, grabataire, cela fait deux ans qu’on ne l’a pas vu. Ce pouvoir est un ramassis de mafieux. L’Algérie a du potentiel, beaucoup de gens pourraient participer à une transition politique. Pour le moment, l’opposition est pacifique mais la répression a déjà démarré. On risque d’aller vers l’affrontement et il y aura des dommages collatéraux."