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À Calais, l’immigration clandestine au cœur des municipales

Chaque jour, des centaines de migrants tentent d’atteindre l’Angleterre depuis Calais. Critiquée ou acceptée, la présence des clandestins dans le port français est devenue un enjeu politique crucial à quelques jours des élections municipales.

À Calais (Nord de la France), l’immigration clandestine est devenue un enjeu majeur de la campagne municipale. Depuis le milieu des années 90, des migrants venus principalement d’Afrique transitent par la ville du Nord-Pas-de-Calais dans l’espoir d’une vie meilleure. Les migrants installés dans des tentes de fortune près du port attendent le jour où ils pourront gagner l'Angleterre par la Manche.

En attendant, ils sont des centaines à venir chercher chaque jour un repas chaud distribué par des associations caritatives locales. Mais leur présence incommode certains habitants. Pour faire face aux nuisances occasionnées et accueillir au mieux les clandestins, les solutions divergent selon les partis. Une équipe de FRANCE 24 est allée à la rencontre de plusieurs candidats calaisiens.

"Humanité et fermeté"

Natacha Bouchart, (UMP), la maire sortante profite de la "fête de la soupe", un événement local attendu des Calaisiens, pour convaincre les derniers indécis et asseoir son discours de campagne articulé autour de deux maîtres-mots, "humanité et fermeté". "Humanité pour améliorer le quotidien des migrants en ce qui concerne les douches, la distribution des repas. Mais je ne peux pas accepter que le bien public et les biens des Calaisiens soient squattés", explique l’élue.

Autre parti, autre discours. La candidate du Front national (FN) Françoise Vernalde, qui distribue des tracts sur un marché de la ville, insiste, elle, sur les nuisances venant des camps de voyageurs clandestins. "Les migrants boivent et parlent la nuit parce qu’ils sont en groupe. Les ouvriers qui se lèvent à 6 heures du matin pour aller travailler à l’usine de Dunkerque sont obligés de porter plainte au commissariat de Calais", déplore la militante frontiste.

La situation, qualifiée de "drame humanitaire" par les nombreuses associations d’accueil aux migrants, fait les choux gras du FN. À la dernière élection présidentielle, Marine Le Pen est arrivée ici en tête, loin devant Nicolas Sarkozy. De quoi nourrir bien des espoirs pour les membres de la liste frontiste et donner lieu à une triangulaire UMP-FN-PS au second tour.

"Ni un tabou ni un aimant des extrémistes"

Le candidat socialiste Yann Capet veut aussi y croire. Contrairement à ces deux principaux adversaires politiques, il ne souhaite pas privilégier le thème de l’immigration clandestine pour sa campagne. "Ce dont on me parle le plus, c'est du chômage qui est un des plus forts taux de France, les questions portant sur le logement, le cadre de vie, les problématiques du quotidien, résume-t-il. Et d’ajouter que la question des migrants "ne soit ni un tabou, ni un aimant des extrémismes", considérant que "la non-gestion publique crée la haine et la peur".

Alexandre Van Kerkhove, candidat divers droite (ex-UDI), n’a eu de cesse de répéter pour sa part sa volonté de créer un centre en périphérie de Calais, un projet qualifié de "centre de rétention" par ses détracteurs.

Reste Jacky Hénin, le candidat du Parti communiste qui attend sa revanche. L’ancien maire de Calais, de 2000 à 2008, entend quant à lui, poursuivre son projet de concentration de services aux migrants, abandonné, à son grand regret, par la municipalité de Natacha Bouchart.

Autant de propositions qui pourront peser lourd le 23 et le 30 mars prochains, jours des municipales. Qu’elle soit ou non exploitée par les partis politiques en période électorale, la situation des migrants clandestins de Calais reste critique. L'ONG Médecins du Monde déplore toujours "le manque de WC, de points d’eau potable, la région est bien en-deçà des normes d’urgence humanitaire qui sont respectées dans la plupart des pays". À titre d’exemple, trois WC seulement sont mis à la disposition des 300 à 400 migrants qui transitent en moyenne par jour à Calais, quand l’urgence humanitaire impose "un WC pour vingt personnes".