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Rachat de SFR : les bons baisers de Suisse du patron de Numericable

Malgré les appels pressants du gouvernement français, le PDG de Numericable, Patrick Drahi, n'a pas l'intention de quitter la Suisse pour s’installer en France si les négociations avec Vivendi pour le rachat de SFR se concrétisent.

L'opérateur télécom français SFR sera-t-il dirigé depuis Genève ? Cette perspective déplaît au gouvernement français. Après l’annonce, vendredi 14 mars, de l’ouverture de négociations exclusives entre Numericable et Vivendi pour le rachat de SFR, la ministre déléguée à l’Économie numérique Fleur Pellerin a trouvé “logique” que Patrick Drahi, le PDG du câblo-opérateur, revienne s’installer fiscalement en France.

“Si Patrick Drahi devient le deuxième opérateur de télécoms en France, il serait logique qu'il rapatrie sa résidence fiscale en France et gère ses affaires depuis Paris”, a déclaré la ministre lors d'une interview accordée, dimanche 15 mars, au “Journal du dimanche”.

L’homme d’affaires franco-israélien, résident Suisse depuis 1999, a déclaré, lundi 17 mars, qu’il ne comptait pas faire cet “effort” tout en promettant des “investisssements massifs” en France . En clair, si les négociations avec Vivendi aboutissent, le PDG de Numericable ne compte pas plier bagage et quitter dare-dare Genève, ses enfants sont scolarisés sur place, pour venir gérer son nouvel empire des télécoms à Paris.

“Déclarations 100 % politiques et médiatiques”

“Il n’y a aucune contradiction fiscale ou légale à diriger depuis l’étranger un grand groupe ayant des intérêts en France ou qui y est domicilié”, affirme Frédéric Naïm, avocat fiscaliste parisien. S’il existait des dispositions légales obligeant un dirigeant d’entreprises françaises à résider dans le pays “il n’y aurait plus beaucoup d’entreprises en France”, s’amuse de son côté Christophe Codet, un autre avocat fiscaliste.

Le seul cas où le lieu de résidence peut poser un problème est pour les dirigeants de très petites entreprises. “Il serait difficile pour un 'petit patron' de contrôler tous les aspects de la vie d’une petite société française tout en étant domicilié à l’étranger”, note Frédéric Naïm.

Mais dans le cas des grands groupes comme Numericable et SFR, il n’y a pas qu’un dirigeant pour tout contrôler. “La déclaration de Fleur Pellerin est 100 % politique et médiatique”, affirme Christophe Codet. Pour lui, l’idée du gouvernement est de s’emparer d’un thème porteur, le patriotisme fiscal, et de faire du bruit médiatique autour de l’affaire. Il faut dire que Patrick Drahi est la cible idéale : il vit à Genève et Altice - la holding qui chapote ses activités - est immatriculée au Luxembourg et côtée à la bourse d’Amsterdam...

Pour Frédéric Naïm, les déclarations de la ministre française, sans fondement juridique, sont plutôt une “réaction politique” au fait que Numericable a réussi à s’imposer face Bouygues, “le poulain du gouvernement” dont la candidature avait été poussé par le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg. Une manière, en somme, pour Fleur Pellerin de soutenir, dans les paroles, son ministre de tutelle.