François Hollande se rendra, vendredi, aux célébrations organisées par Tunis pour l’adoption de la nouvelle Constitution. L’occasion pour le chef de l’État français de saluer le "succès" démocratique du pays pionnier des Printemps arabes.
Il a été le premier à officialiser sa venue. Le président français François Hollande se rendra, vendredi 7 février, à Tunis pour célébrer la nouvelle Constitution tunisienne et ainsi sceller le réchauffement des relations entre Paris et le pays pionnier du Printemps arabe.
François Hollande ne devrait pas être le seul dirigeant étranger à assister aux cérémonies tunisiennes. Nombre de chef d'État et de gouvernement africains, notmannet, ont été conviés à la cérémonie lors de laquelle ils doivent s'exprimer devant l'Assemblée nationale constituante. Parmi eux : le roi du Maroc, Mohammed VI, les présidents tchadien, gabonais, libanais, mauritanien et sénégalais, l'émir du Qatar, les Premier ministres algérien et koweitien. Tous n'ont pas encore confirmé leur présence.
Le dirigeant français sera le seul chef de l’État européen à assister à la cérémonie organisée en l’honneur d’une Loi fondamentale censée ouvrir la voie au processus démocratique (voir encadré). Venu en juillet dernier apporter "un message d'encouragement" dans un pays alors en crise dominé par les islamistes d'Ennahda, François Hollande affirme faire le déplacement pour "célébrer un succès, un évènement positif et important".
Adoptée le 26 janvier dernier au prix de deux années d’houleux débats, la nouvelle Constitution est considérée comme un texte progressiste. Outre qu’elle consacre un exécutif bicéphale et accorde une place réduite à l'islam, la Loi fondamentale introduit l’objectif de parité hommes-femmes dans les assemblées élues. Une première dans le monde arabe.
L’Élysée n’est pas non plus insensible au fait que la Tunisie se soit récemment dotée d’un gouvernement d'indépendants après que les islamistes d'Ennahda ont décidé de passer la main. Dirigée par l’ancien ministre du Tourisme, Mehdi Jomaa, cette nouvelle équipe dirigeante fait aujourd'hui office de brevet de respectabilité pour Paris qui craignait de voir le pays définitivement céder aux sirènes islamistes.
Solder l’ère Ben Ali
Le chef de l'État français devrait ainsi profiter de sa visite pour affirmer la volonté de la France "de coopérer avec la Tunisie sans ingérence, dans le cadre du partenariat renouvelé qu'il lui avait proposé en juillet", selon l’Élysée. Cette coopération comprend, entre autres, un engagement financier de la France de 500 millions d'euros pour des projets de développement en Tunisie. "Notre espoir est que la Constitution et la formation d'un gouvernement permette de donner plus d'ampleur à la coopération bilatérale", souligne Paris qui entend rester le premier partenaire commercial de la Tunisie.
Mais pour François Hollande, cette visite est également l'occasion de conforter la réconciliation franco-tunisienne après les dégâts provoqués par les relations troubles de la France avec l’ancien homme fort de Tunis, Zine el-Abidine Ben Ali, notamment sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
La présence de nombreux dirigeants étrangers "montre l'intérêt accordé à l'expérience tunisienne notamment de la part de la France, où le pouvoir socialiste est soucieux d'amortir le déficit laissé par la droite qui a soutenu le président déchu jusqu'au bout", affirme à l’AFP le politologue tunisien Slaheddine Jourchi. Le grand raout tunisien, estime ce dernier, est également un moyen de "redorer l'image" du pays "qui a souffert d'une longue crise politique et de la déstabilisation terroriste".
Reste que, pour beaucoup, cette nouvelle Constitution ne garantit en rien la fin des tensions politiques. Le président tunisien, Moncef Marzouki, a lui-même pris la pleine mesure du chemin qui reste à parcourir. "En ce jour exceptionnel, nous célébrons la victoire contre la dictature... Mais il reste un grand travail à faire pour que les valeurs de notre Constitution fassent partie de notre culture", a-t-il affirmé après l’adoption du texte. Un signal envoyé aux islamistes d’Ennahda avec qui il a partagé le pouvoir.
"La Constitution adoptée, qui fait la fierté des Tunisiens et leur vaut des éloges, n'est pas celle que ses alliés islamistes d'Ennahda auraient voulu imposer aux Tunisiens, rappelle dans un éditorial Béchir Ben Yahmed, directeur de l’hebdomadaire "Jeune Afrique". Avant d’ajouter : "Il sera très difficile d'empêcher Ennahdha, si elle revenait au pouvoir et avait la latitude de l'exercer plus librement, de s'abstenir d'appliquer la Constitution qu'on vient d'adopter. Ou de la modifier pour revenir à celle que la conjoncture ne lui a pas donné la possibilité de faire prévaloir."
Avec AFP