Athènes occupe, jusque fin juin 2014, la présidence de l’Union européenne. Alors que le pays se porte économiquement un peu mieux, que peut faire la Grèce de ce passage à la tête de l’UE ?
C’est la première fois depuis le début de la crise de la zone euro, en 2010, que le pays par lequel tout a commencé assume la présidence de l’Union européenne (UE). De janvier à juin 2014, c’est en effet à la Grèce d'endosser ce rôle. Une situation d’autant plus incongrue que les Grecs, sauvés par deux fois de la faillite, en 2010 et 2012, par une aide internationale, tiennent en partie l’UE pour responsable de ses déboires économiques actuels.
Ce ressentiment, Evangelos Venizelos, vice-Premier ministre et chef de la diplomatie grecque, l’a exprimé en des termes diplomatiques lors du discours de prise de fonction à la tête de l’UE, mercredi 8 janvier. “Il n'est pas possible d'avoir la réduction des déficits comme seul horizon”, a-t-il affirmé en référence aux fortes cures d’austérité que Bruxelles, le FMI et la Banque centrale européenne ont imposé aux pays les plus endettés, dont le sien.
Des belles paroles qui ne présagent cependant pas une révolution politique impulsée par une Grèce habitée par un esprit revanchard, d’après Céline Antonin, spécialiste de l’économie grecque à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Tout d’abord, parce qu'à "l’exception notable de la France, les présidences tournantes de l’Union européenne n’ont jamais cherché à tout changer au sein de l’UE”, rappelle cette économiste.
Élections européennes à haut risque
Ensuite, la Grèce, après six ans de récession, reste le vilain petit canard de l’économie européenne. Cette année, le pays “devrait au mieux avoir une croissance nulle, ce qui est déjà bien mieux qu’avant”, prévoit Céline Antonin. À ce titre, Athènes n’est pas en position de force pour imposer une rupture avec la politique économique menée par la Commission européenne.
Encore faudrait-il, d’ailleurs, qu’Antonis Samaras, le chef conservateur du gouvernement grec, le veuille. Rien n’est moins sûr. “Son gouvernement a jusqu’à présent toujours appliqué les prescriptions de la Troïka [FMI, Union européenne et Banque centrale européenne, NDLR] et il est plutôt europhile”, rappelle Céline Antonin. En outre, d’après elle, le pays veut profiter de son passage à la tête de l’UE pour reconquérir sa respectabilité. “Certains thèmes comme le droit d’asile ou le chômage des jeunes seront probablement plus audibles pendant la présidence grecque, mais sur le fond, la construction économique européenne ne déviera pas de trajectoire”, prévoit Céline Antonin.
Athènes, tout au plus, pourrait profiter de sa présidence pour négocier un allègement des modalités de remboursement des deux plans de sauvetage. Si ces six mois à l’heure hellène “ne devraient pas avoir d’impact sur l’Union européenne, ils pourraient faire avancer les choses pour la Grèce”, reconnaît l’économiste de l’OFCE. Mais pour ce faire, le gouvernement grec devra réussir à convaincre les autres partenaires de la Troïka.
Antonis Samara a d’autant plus intérêt à y parvenir que 2014 sera l’année des élections européennes. L’euroscepticisme a le vent en poupe en Grèce et si l’actuel gouvernement apparaît comme incapable de défendre les intérêts de son pays, “les mouvements extrémistes grecs pourraient devenir les grands gagnants de cette présidence”, craint Céline Antonin.