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Une cantatrice japonaise virtuelle donne ses premiers concerts à Paris

Hatsune Miku a choisi Paris pour lancer, mardi, sa carrière internationale. Véritable phénomène de société au Japon, cette adolescente virtuelle n’existe pas, mais son avatar remplit les salles de concert et ses tubes sont repris partout en Asie.

À seulement 16 ans, Hatsune Miku déplace les foules en Asie. Sauf que cette diva japonaise aux couettes bleu-turquoise n’est pas réelle. Elle est en fait un avatar, ou plutôt un "Vocaloid", une marque déposée par Yamaha pour désigner un logiciel de synthèse vocale créé en 2007, permettant de composer ses propres morceaux à partir de la voix d’Hatsune Miku. Pour parvenir à fabriquer le timbre singulier et mielleux de cette star digitale, une actrice a enregistré, un par un, chaque phonème de la langue japonaise, puis anglaise.

Son image appartient à tout le monde : elle a été conçue en "open source", ce qui signifie qu'elle peut être diffusée et modifiée : ses contributeurs peuvent développer son image et ses fonctions, paramétrer son élocution et son chant.

Quelque 100 000 morceaux interprétés par Hatsune Miku sont, à ce jour, répertoriés sur la plateforme Nico Nico Douga, le YouTube japonais, ainsi que des clips montés par ses fans qui se rendent à ses concerts réguliers.

Un expert en musique électro aux manettes

Pour la première fois de sa (jeune) carrière, Hatsune Miku se produit en dehors du Japon. Quatre écrans, sept projecteurs haute définition et 50 enceintes : c’est au prestigieux Théatre du Châtelet à Paris qu’elle va donner trois représentations de son opéra 2.0 intutilé “The End”, du 12 au 15 novembre.

"J'ai choisi Hatsune Miku parce que j'imaginais une sorte de voix qui circule, comme un fantôme, dans un opéra entièrement constitué d'images et d'installations sonores", explique Keiichiro Shibuya, concepteur du spectacle. Les images ont été créées par un prodige du jeu vidéo, YKBX. Keiichiro Shibuya interprète lui-même la musique sur scène. Spécialiste reconnu de musique électronique, ce quadra à l'allure juvénile, formé au conservatoire de Tokyo, est un fin connaisseur de la culture européenne. Venu à Paris pour la première fois après la mort de son père, il est "ébloui" par l'opéra Wozzeck mis en scène par Patrice Chéreau au Châtelet en 1992.

Au coeur du spectacle : le thème de la mort, inspiration directe du décès de l’épouse de Keiichiro Shibuya, Maria, il y a cinq ans. L'accident nucléaire de Fukushima a attisé au Japon "la conscience que le monde se dirige vers sa fin", constate-t-il. Son objectif est donc de concevoir une "musique de la fin" tout en étant porteuse d'espoirs nouveaux.

Prochaines étapes pour "The End" : le Canada et les États-Unis où des discussions sont en cours. Mais Keiichiro Shibuya se plait aussi à rêver de Berlin et Londres.

Avec dépêches