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Nucléaire iranien : un nouveau cycle de négociations semble se profiler

À Genève, diplomates occidentaux et iraniens tentent de parvenir à un accord sur le programme nucléaire de Téhéran. Mais la position de la France, qui se montre particulièrement exigeante, suscite des critiques parmi les Occidentaux.

Les diplomates s'efforçaient toujours samedi 9 novembre au soir à Genève de lever les obstacles à un accord sur le programme nucléaire iranien, mais l'éventualité d'un accord semblait s'éloigner sur fond de divergences entre Occidentaux. L'Iran a de son côté déjà évoqué l'hypothèse de nouvelles négociations en cas d'échec.

De Téhéran, le président Hassan Rohani, dont la nouvelle politique a permis une reprise et une intensification du dialogue direct entre Iraniens et Américains, a appelé à ne pas manquer cette "occasion exceptionnelle" d'avancer après dix ans de confrontation sur ce programme soupçonné par les Occidentaux de comporter un volet militaire en vue de la fabrication de l'arme atomique.

"J'espère que les parties qui négocient avec l'Iran au sein du groupe 5+1 mettront à profit l'occasion exceptionnelle créée par la nation iranienne pour arriver à un résultat positif en un temps raisonnable", a affirmé M. Rohani, selon l'agence officielle de presse Irna.

L''Iran a prévenu, par la voix de son ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif, que faute d'accord dans la soirée, au troisième jour des pourparlers, un nouveau cycle de discussions devrait être organisé dans sept à dix jours et que la négociation ne se prolongerait pas dimanche.

L'intransigeance de la France critiquée

L'insistance du chef de la diplomatie française Laurent Fabius à demander un engagement plus fort de l'Iran sur certains volets de son programme nucléaire, susceptibles d'avoir une vocation militaire, commençait à être nettement critiquée parmi les autres négociateurs occidentaux et à Téhéran.

"Les Américains, l'Union européenne et les Iraniens ont travaillé de façon intensive pendant des mois sur cette proposition et ce n'est rien de plus qu'une tentative par Fabius de se donner de l'importance tardivement", a déclaré à des journalistes un diplomate occidental.

Après un entretien avec son homologue iranien, Laurent Fabius a estimé à nouveau que "des questions importantes subsistent, en particulier sur le réacteur d'Arak, ainsi que sur le stock et l'enrichissement de l'uranium".

Face aux critiques, les diplomates français restent fermes. "Nous voulons éviter l'euphorie du verre à moitié plein", dit-on dans la délégation française, en rappelant qu'en 2003, un accord avait été conclu et qu'il avait avait échoué.

De leur côté, des députés iraniens ont critiqué samedi l'intransigeance de la France lors de ces négociations, accusant Laurent Fabius de défendre "les positions" d'Israël qui dénonce l'accord en discussion.

"L'attitude du représentant de la France montre que ce pays fait du chantage", a réagi Hossein Taghavi, porte-parole de la Commission des Affaires étrangères du parlement iranien, cité par l'agence Fars. "Alors que la population française veut une amélioration des relations entre Paris et Téhéran, le gouvernement français préfère malheureusement défendre la position du régime sioniste", a-t-il ajouté.

Des "progrès déjà accomplis"

L'attente d'un accord à Genève est à la mesure des espoirs suscités par l'élection de M. Rohani, au ton plus mesuré, qui a fait depuis plusieurs gestes d'ouverture vers l'Occident et exprimé sa volonté de régler rapidement le contentieux sur le nucléaire afin de lever les sanctions internationales qui accablent l'économie iranienne.

"Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour saisir le moment et l'opportunité afin de parvenir à un accord que le monde n'a pas réussi à obtenir pendant longtemps", a rappelé le chef de la diplomatie britannique William Hague, qui paraît engagé à rapprocher les points de vue parmi les Occidentaux.

Il s'est cependant voulu prudent et a expliqué qu'il était impossible pour le moment de dire qu'il "y aura(it) un accord ce soir". "Mais s'il n'y en a pas, nous devrons continuer dans les prochaines semaines, construisant sur les progrès déjà accomplis".

Depuis jeudi d'intenses consultations se sont poursuivies, sous la houlette de Catherine Ashton, la diplomate en chef de l'UE, mandatée par l'ONU. Les discussions à deux ou à trois se succèdent. Les Etats-Unis, la France, l'Allemagne, la Grande-Bretagne, la Chine et la Russie négocient avec l'Iran un "accord intérimaire" sur le programme nucléaire iranien avant de passer à un accord permanent. Les six puissances soupçonnent l'Iran de vouloir acquérir l'arme atomique sous le couvert d'un programme civil, ce que Téhéran dément.

L'accord en projet, avec une expérimentation sur six mois, porterait sur un allègement de sanctions avec un engagement en contrepartie de l'Iran de suspendre en partie ou totalement l'enrichissement d'uranium, un processus qui permet, poussé à 90%, de fabriquer une bombe nucléaire.

Le réacteur à eau lourde d'Arak (deuxième filière pour obtenir une arme atomique avec cette fois du plutonium), évoqué par Laurent Fabius, doit entrer en service l'été prochain. Une fois qu'il fonctionnerait, il serait très difficile de l'arrêter, selon des experts.

Parmi les autres questions à régler figure celle de l'avenir du stock d'uranium enrichi à 20%. Selon certains médias, Téhéran pourrait accepter de geler pendant six mois l'activité de ses centrifugeuses les plus performantes, dans un geste de bonne volonté.

Israël a très vivement mis en garde contre un éventuel accord avec l'Iran qui ne permettrait pas de démanteler son programme nucléaire.

Avec dépêches