La 35e aventure d'Astérix, en librairie jeudi, se déroule chez les Pictes, un ancien peuple d'Écosse. Alors que cette nation se prononcera en 2014 sur son indépendance, les irréductibles gaulois s'immiscent dans le débat sur le référendum.
Après avoir rendu visite aux Normands, aux Belges, aux Helvètes ou encore aux Corses, Astérix et Obélix partent à la rencontre des Pictes, surnommés "les hommes peints". Dans le 35e tome des aventures des irréductibles Gaulois, qui sort le jeudi 24 octobre, les moustachus français les plus célèbres de la planète visitent la terre de cet ancien peuple qui dominait l’Écosse jusqu’au Xe siècle.
Même si très peu de détails ont été dévoilés sur l’intrigue de cette nouvelle aventure, la sortie de cet album suscite depuis plusieurs mois une vive curiosité chez les Écossais. Alors que cette nation britannique décidera de son destin le 18 septembre 2014, lors d'un référendum, certains voient déjà en Astérix un vif partisan de l’indépendance. Comme le rapporte la BBC, les responsables de la campagne favorable au "oui" n’ont pas manqué de saluer la sortie de cette BD : "Nous sommes reconnaissants d’avoir le soutien d’un personnage aussi célèbre, mais nous devons toutefois vérifier s’il a bien le droit de voter".
Un symbole de lutte
Interrogé à ce sujet lors de sa venue en terre écossaise en juin dernier, Jean-Yves Ferri, le nouvel auteur d’Astérix, n’a pas caché qu’il avait été inspiré par le référendum. "Il nous a dit qu’Astérix chez les Pictes parle de disputes entre clans et aborde ouvertement l’identité et la politique écossaise actuelle", raconte Laurence Grove, professeur à l’Université de Glasgow et président de la Société internationale de bande dessinée. "Il a également imité De Gaulle, et nous a dit 'Vive l’Écosse libre' !"
Pour ce spécialiste du "neuvième art", Astérix n’est pas seulement un héros populaire sur papier glacé, mais il représente surtout un symbole planétaire de résistance. "C’est le petit qui combat contre les plus grands. À l’époque de Goscinny et Uderzo, à travers lui, c’était la France qui luttait contre l’invasion culturelle américaine, et qui disait aussi non à l’Otan. […] Aujourd’hui, il va en Ecosse au moment du référendum. Ce n’est pas seulement l’avenir d’une nation qui est en jeu, mais aussi l’avenir de la politique mondiale. Quand Jean-Yves Ferri est venu, il y avait des Catalans qui étaient présents, car ils s’intéressent aussi à cette question d’indépendance".
Alors que le plus récent sondage, réalisé par TNS le 10 octobre, révèle que pour le moment le "non" l’emporte à 44 %, contre 25 % pour le "Oui", et 31 % d’indécis, Astérix pourrait devenir le coup de pouce utile aux pro-indépendance. "Les partisans du oui insistent sur le fait que les gens ne doivent pas avoir peur, et qu’ils doivent oser prendre leur indépendance. Astérix incarne ce type de courage", affirme Laurence Grove.
"Astérix n’est pas un politicien"
Auteur d’un article dans le "Times", intitulé "Astérix et la division des clans écossais", le journaliste écossais, Nick Drainey, est pour sa part plus mesuré. Selon lui, le guerrier venu d’Armorique "flirte" avec la question de l’indépendance, mais ne glisserait pas forcément un bulletin pour le "oui" : "il y a des similarités entre la Gaule et l’Écosse, mais Astérix n’est pas un politicien. Comme William Wallace [héros écossais qui a combattu contre l'occupation anglaise, incarné par Mel Gibson dans le film "Braveheart", NDLR], il se bat pour son indépendance, mais à titre personnel, il n’a pas de revendication politique". Ce reporter basé à Édimbourg s’amuse de voir que le petit Gaulois s’immisce dans la campagne sur le référendum, mais il n’y attache pas une réelle importance. "Ce n’est pas pris au sérieux, que ce soit du point de vue du oui ou du non. Je ne pense pas qu’Astérix va influencer le vote".
À défaut de changer l’avenir des Écossais, Astérix pourra se consoler avec ses futures ventes. Après avoir écoulé plus de 350 millions d’exemplaires à travers le monde, le Gaulois est promis à un nouveau succès. "Il est déjà très populaire en Écosse, mais cette histoire va considérablement augmenter les ventes", prédit Nick Drainey. Et pour faire plaisir à ces admirateurs en kilts, "Astérix chez les Pictes" sera édité en anglais, en écossais et en gaëlique.