En raison de la paralysie budgétaire qui frappe les États-Unis, des familles de soldats tués en Afghanistan n'ont pas reçu d'indemnisation pour les funérailles. Le Pentagone a fait appel à une fondation privée pour verser normalement cette aide.
Le secrétaire d’Etat américain à la Défense ne se déplace qu'occasionnellement sur la base de Dover aux États-Unis pour accueillir les dépouilles des combattants tombés au combat. Chuck Hagel était pourtant bien là mercredi 9 octobre pour saluer à la sortie de l’avion les cercueils de quatre soldats et un marine tués la semaine dernière en Afghanistan. Le chef du Pentagone a voulu marquer sa solidarité avec les familles de ces militaires qui ont appris qu’elles ne seraient pas indemnisées pour leur perte en raison de l’impasse budgétaire qui frappe le pays depuis le 1er octobre.
"J’ai honte et je suis scandalisé de voir que la paralysie budgétaire a empêché le département de la Défense de remplir cette responsabilité des plus importantes en un temps décent", a ainsi déploré Chuck Hagel dans un communiqué.
Les familles de soldats tués en mission reçoivent normalement dans les trois jours 100 000 dollars, des facilités de logement ainsi que des frais pour payer les funérailles. Mais faute d'un accord sur le budget au Congrès entre démocrates et républicains à l'origine du "shutdown", ces fonds ont été suspendus depuis le 1er octobre dernier. Le président américain avait bien promulgué le 30 septembre une loi assurant le versement des salaires des militaires, même en cas de paralysie de l’Etat fédéral, mais ce texte n’inclut pas les indemnisations versées aux proches des militaires morts au combat.
Le désarroi des familles
Meurtries par la disparition de leur père, leur frère ou leur mari, les familles de soldats doivent aussi faire face désormais aux difficultés financières. "C’est rageant car mon époux est mort pour son pays, et maintenant on laisse sa famille dans l’inquiétude. Il me disait pourtant toujours que si quelque chose lui arrivait, on s’occuperait de nous", a ainsi témoigné sur NBC Ashley Peters, la femme de Joseph M. Peters, tué dimanche 6 octobre au cours d’une attaque dans la province de Kandahar.
Le père du jeune soldat Cody Patterson, mort au cours de ce même combat, s’est lui aussi emporté contre cette paralysie budgétaire qui frappe de plein fouet les familles. "Si les membres du Congrès étaient coincés dans une voiture qui coulerait dans une rivière, je nagerai jusqu’à la vitre et leur dirai en les regardant droit dans les yeux : 'Vous pouvez vous noyer'", s’est emporté Randall Patterson sur la chaîne américaine.
"J’ai honte"
Le désarroi de ces familles a touché de nombreux membres du Congrès qui se sont empressés de dénoncer ce blocage. Le sénateur démocrate Harry Reid a ainsi déclaré qu’il s’agissait d’une situation "honteuse et embarrassante" et que l’Amérique "laissait tomber les familles de ses héros". Même son homologue républicain John McCain a fait part de sa colère en pleine session : "Je suis honteux et vous devriez tous l’être !"
La chambre des Représentants a finalement adopté à l’unanimité mercredi une loi en faveur du rétablissement de ces indemnités, mais ce vote nécessite ensuite l’accord du Sénat et du président Barack Obama. En attendant une issue à ce blocage politique et pour éviter tout scandale, l’administration Obama a décidé d’accélérer les choses en faisant appel à une fondation privée, La Fisher House Foundation, qui vient en aide aux anciens combattants. Cet organisme a accepté de verser de l’argent aux familles concernées et sera remboursé quand un nouveau budget aura été voté.
Malgré cette mesure, la polémique risque de s’aggraver dans les prochaines semaines. Comme l’explique le Washington Post, le secrétaire d'État aux Anciens combattants a en effet prévenu que si le blocage budgétaire se poursuit, près de 3,8 millions de vétérans ne vont pas toucher leurs pensions au mois de novembre.