Depuis un an, un camp de réfugiés à Berlin abrite plus de 400 Africains, qui ont fui la Libye en gagnant Lampedusa, en Italie, où affluaient de nombreux migrants. Les exilés, mobilisés pour obtenir un emploi, ont bien du mal à se faire entendre.
“Si on est ici, c’est un peu à cause de Sarkozy”. Ousman, un Tchadien très remonté contre l’ancien Président français, résume l'état d'esprit de ses 450 compagnons africains installés dans un camp de réfugiés, construit en octobre 2012 à Orianenplatz, en plein cœur du très vivant quartier de Kreuzberg, à Berlin. Auparavant, la majorité d'entre eux habitait et travaillait en Libye. Mais, en 2011, ils ont dû quitter le pays en catastrophe, lorsque la guerre civile a éclaté entre le régime de Mouammar Kadhafi et les rebelles soutenus, notamment, par la France.
La quinzaine de tentes qui compose le camp ne forme qu’un abri très précaire contre le climat parfois rude à Berlin. À l’entrée, les passants sont accueillis par une grande banderole sur laquelle est inscrit : “Village de Lampedusa à Berlin”. Un rappel du périple que ces Africains ont dû effectuer pour arriver jusqu’à la capitale allemande. Ils font, en effet, partie des plus de 10 000 réfugiés de Libye qui ont transité par Lampedusa, au large de la Sicile, en 2011, dans des conditions humanitaires souvent déplorables.
“Après quelque temps, les Italiens nous ont donné 500 euros et nous ont fait comprendre qu’on ferait mieux de partir”, raconte Ali, un Malien qui, sous le règne de Kadhafi, a travaillé plusieurs années dans une tapisserie. Si certains sont allés à Munich (Bavière), d’autres à Hambourg, Ali et ses compagnons ont eux trouvé refuge à Berlin, où les conditions de vie sont très dures, selon lui. “Parfois on ne mange qu’un seul repas en trois jours." Pour pouvoir se nourrir, ils comptent sur la générosité des passants. Un état de dépendance très dur à accepter pour Ali, qui rappelle qu’il “gagnait bien sa vie en Libye”.
Partie du décor
“Tout ce que nous demandons, c’est un logement et d’avoir le droit de chercher un travail à Berlin”, explique Ali. Peu après leur arrivée à Oranienplatz, “un politicien est venu nous voir, on lui a expliqué ce qu’on voulait”, souligne Ali. Mais ils n’ont eu aucune nouvelle depuis.
En effet, si l’existence de ce camp a pu, un temps, étonner, voire susciter quelques élans de solidarité, il semble dorénavant faire partie du décor pour les habitants du quartier. Des jeunes à vélo slaloment entre les tentes comme si de rien n’était. Des panneaux pour tel ou tel candidat aux élections législatives du 22 septembre sont posés à même le sol, à côté des abris, se mélant avec les objets qui font office de mobilier.
Ali reconnaît qu’il ne voit pas comment faire évoluer les choses. “On va continuer à demander ce à quoi on a droit : un logement et un travail”, répète-t-il. En attendant de trouver un point de chute, le groupe de réfugiés s'apprête à affronter le rude hiver berlinois.