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Les Femen, des "blasphématrices" contre vents et marées

Neuf membres du mouvement Femen ont comparu vendredi 13 septembre devant la justice à Paris après une action coup de poing à Notre-Dame-de-Paris en février. Un procès de plus pour le mouvement féministe en mal de popularité.

Les activistes des Femen sont-elles de plus en plus isolées ? Visées par la justice tunisienne, russe et maintenant française, les militantes féministes, dont les poitrines dénudées sont plus célèbres que les causes qu'elles défendent, multiplient les provocations, quitte à déplaire. Vendredi 13 septembre, neuf d’entre elles ont comparu à Paris pour avoir, en février dernier, manifesté dans la cathédrale de Notre-Dame-de-Paris, seins à l’air.

Une manière bien à elles de fêter la démission de l’ex-pape Benoît XVI, mais pas uniquement. Lors de cette action, les jeunes femmes en avaient également profité pour fustiger "l’homophobie" de l’église catholique, alors que le débat sur la loi autorisant le mariage gay faisait rage. Une provocation qui avait choqué jusque dans les rangs des sympathisants au projet de loi. Le maire PS de Paris, Bertrand Delanoë, s'était ainsi joint au flot de critiques, déplorant un "acte qui caricature le beau combat pour l’égalité hommes femmes et choque inutilement de nombreux croyants."

"Nous voulons être entendues"

Cheveux ornés de couronnes de fleurs, poings levés et logos à la gloire de leur mouvement, les Femen n’ont pas fait mentir ceux qui les accusent de s’auto-caricaturer. Mais qu’importe, pour les concernées, l’essentiel c’est d’être entendues, pas soutenues. "Les soutiens, ce n’est pas la question !" martèle une activiste venue au tribunal en soutien aux prévenues. "On mène un combat et on ne compte pas se démotiver."

"On n’est pas là pour chercher le consensus général," explique, quant à elle, Pauline Hillier, l’un des fers de lance du mouvement en France. Selon elle, les Femen s'estiment comprises mais pas toujours soutenues, mais "ce n’est pas grave". "Ce que nous voulons, c’est être entendues, et pour l’instant c’est le cas," assure-t-elle.

"Une société où il n’y a pas de blasphème est malsaine"

Pas plus perturbée que cela par la procédure qui la vise, ainsi que ses camarades, Marguerite Stern, n’est, elle non plus, pas le moins du monde froissée par les avis négatifs. Au contraire, elle les accueille avec le sourire. "Avis positifs comme négatifs, tout est bon à prendre, l’essentiel c’est de créer le débat," affirme celle qui fut récemment libérée, tout comme Pauline, des geôles tunisiennes.

"Après notre action à Notre-Dame-de-Paris, par exemple, nous avons lu avec plaisir beaucoup d’articles dans la presse sur la religion catholique," illustre-t-elle, estimant que leur action a ouvert la discussion. "Nous sommes des blasphématrices, et c’est nécessaire que nous, ou des personnes comme les journalistes de "Charlie Hebdo", soyons là. Une société sans blasphème est une société malsaine," affirme-t-elle, précisant tout de même que leurs actions ne sauraient se limiter à la satire religieuse. "Nous véhiculons avant tout des valeurs d’égalité."

"L’affaire en Tunisie a rebuté certaines filles"

Des valeurs qui semblent cependant perdre de leur attractivité. Ces derniers mois, les Femen ont ainsi dû faire face à plusieurs coups durs, de la démission de la figure phare Amina, première manifestante tunisienne, à la cessation des activités des féministes en Belgique, en passant par des soupçons de financements occultes.

En mai, l’emprisonnement de plusieurs membres en Tunisie, à la suite d’une manifestation seins nus en soutien à Amina, a largement contribué à donner l’image d’un combat difficile à mener. "Je peux comprendre que de telles actions rebutent des filles à rejoindre le mouvement, ce n’est pas rien," concède Pauline, qui constate beaucoup de réticences : "À la fin d’une réunion avec 10 nouvelles filles, si juste l’une d’entre elles accepte de nous rejoindre, c’est déjà très bien."

Néanmoins, pas de signe de renoncement dans la troupe. Une fois l’audience levée, les filles enfilent à nouveau leur couronne de fausses fleurs, qu’elles avaient retiré le temps de la comparution, comme un symbôle de la reprise de leur combat. "Nous avons beaucoup d'autres idées d'actions à mener. Mais nous ne dirons pas lesquelles."