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Marseille : les pouvoirs publics prônent l'unité pour endiguer la violence

Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a appelé à un pacte national pour lutter contre les trafics de drogue à l'origine des règlements de comptes meurtriers à Marseille. Pouvoirs publics et élus locaux semblent prêts à jouer le jeu.

"Un pacte national". L'expression est du ministre français de l'Intérieur, Manuel Valls, et se traduira dès ce samedi 7 septembre par une table ronde de l'ensemble des élus en préfecture pour "échanger sur la mise en œuvre d'un pacte pour Marseille, sur la sécurité et son développement futur".

À la suite des deux homicides commis en 24 heures à Marseille et à La Ciotat, Manuel Valls a demandé "au préfet de région et au préfet de police de recevoir très vite l'ensemble des élus pour définir ce travail en commun". Et d'ajouter : "Il faut maintenant que tout le monde se mette autour de la table pour redonner un espoir aux Marseillais". Depuis le début de 2013, 15 personnes ont été tuées dans des règlements de compte dans les Bouches-du-Rhône.

"Unir leurs efforts"

L'appel a, semble-t-il, été entendu. Le maire UMP (droite) de Marseille, Jean-Claude Gaudin, qui n'avait cessé, ces dernières semaines, de renvoyer le gouvernement devant ses responsabilités, exhortait dans la soirée de jeudi "tous ceux qui aiment cette ville" à "prendre leurs responsabilités et unir leurs efforts". Les candidats aux primaires socialistes pour la municipale marseillaise tempéraient eux aussi leur discours, prêts à se mettre autour de la table pour tenter de trouver une solution au casse-tête sécuritaire de la cité phocéenne.

Seule voix discordante : celle du Front national. "Les autorités ont laissé l'hyperviolence se développer et l'ont niée, à l'image de Gaudin qui, aujourd'hui, est enfermé dans son bureau d'office de tourisme. Avec les responsables qui se réunissent demain, les responsables de la catastrophe, il n'y a rien à espérer", a réagi, vendredi, sur les ondes de France Bleu-Provence le secrétaire départemental du parti, Stéphane Ravier, qui brigue la mairie.

"Travail de longue haleine"

Depuis 2012, le gouvernement a amorcé une "stratégie de reconquête" de la sécurité dans la ville. Quarante cités sensibles identifiées dans les deux zones de sécurité prioritaires (ZSP) de la ville font l'objet d'opérations spéciales, "de la répression à l'amélioration du cadre de vie".

Le gouvernement, venu en force le 20 août à Marseille, fait état de "résultats", les policiers d'un recul de la délinquance et d'un "bon" taux d'élucidation des règlements de comptes (à hauteur de 40 %), par ailleurs moins nombreux que l'an passé à la même époque.

Mais démanteler les réseaux de drogue est un "travail de longue haleine", répètent enquêteurs et ministres. Un travail qui, selon eux, ne s'accorde pas avec le temps médiatique et politique. "Ces chiffres, pour encourageants qu'ils soient, ne pèsent pas bien lourds devant le tsunami médiatique qu'entraîne inexorablement une rafale de kalachnikovs ou un nouveau règlement de comptes", déplorait, jeudi, le nouveau procureur Brice Robin lors de l'audience solennelle de son installation qui s'est tenue au même moment du second règlement de comptes de la journée.

"Politique d'abandon des secteurs populaires depuis 18 ans"

Marseille, déjà décrite comme "la cité des mauvais coups" en 1926 par le journaliste Albert Londres, voit émerger un "néo-banditisme" de cités, loin des rivalités du passé entre "parrains" du milieu, auquel s'ajoutent des bagarres banales se terminant à l'arme de guerre. Comme la fusillade qui a fait trois blessés, dimanche, dans le centre de la ville après une simple altercation.

Mais police et justice ne pourront à elles seules endiguer la violence, note le député Patrick Mennucci, candidat aux primaires socialistes pour les municipales, dénonçant "une politique d'abandon des secteurs populaires depuis 18 ans qui aujourd'hui arrive à son paroxysme".

Pas d'équipements sportifs et culturels, des centres sociaux fermés l'été... La jeunesse est laissée sans perspective, ajoute l'élu, dans des quartiers ghettoïsés, où le taux de chômage frôle parfois les 40 %, et une ville pauvre où moins de la moitié des foyers fiscaux est imposable. 

Avec dépêches