
Le jeudi 9 avril, des élections générales se déroulent en Indonésie sur fond de crise économique. Les observateurs s'attendent à ce que le président Susilo Bambang Yudhoyono sorte renforcé de ce scrutin.
AFP - L'Indonésie se rend aux urnes jeudi pour des élections générales qui devraient renforcer le président Susilo Bambang Yudhoyono en dépit des incertitudes liées à la crise économique.
Fiers d'appartenir à "la troisième démocratie au monde" après l'Inde et les Etats-Unis, 171 millions d'électeurs sont appelés à élire, le même jour, leurs députés, leurs représentants régionaux et leurs élus locaux.
Cette journée électorale, considérée comme "la plus complexe au monde" dans un archipel de 5.000 km de long et de 6.000 îles habitées, préparera le terrain pour le scrutin présidentiel du 8 juillet.
Le centriste Yudhoyono, un ex-général de 59 ans qui bénéficie d'une bonne image sur la scène internationale, est donné favori pour un second mandat de cinq ans.
Mais son avenir dépend en bonne partie du score que réalisera jeudi sa formation, le Parti démocratique (PD), qui pourrait devenir, si les sondages se confirmaient, le premier parti indonésien, huit ans seulement après sa création.
M. Yudhoyono "est l'homme à battre de ces élections", résume Jeffrey Winters, spécialiste de l'Indonésie à l'université de Chicago.
Les Indonésiens lui savent gré d'avoir stabilisé le pays après les années houleuses ayant suivi la chute en 1998 de Suharto, qui l'a dirigé d'une main de fer durant 32 ans.
"Sans que le monde ne le remarque, l'Indonésie est devenue un pays presque normal, apparaissant même particulièrement calme par rapport à ses voisins comme la Thaïlande, la Malaisie ou les Philippines", souligne un diplomate à Jakarta.
Les foyers de tensions séparatistes, à Aceh ou en Papaousie, se sont apaisés tandis que le respect de la diversité religieuse a été préservé, malgré des crises sporadiques, dans le plus grand pays musulman du monde.
Membre du G20, l'archipel a bénéficié d'une croissance supérieure à 6% en 2007 et 2008 grâce notamment à ses immenses ressources naturelles, comme le gaz, le nickel ou l'huile de palme. L'économie devrait se ralentir à 4% cette année à cause de la crise économique, dont l'impact, notamment social, reste jusqu'à présent limité.
Sur le plan politique, la liberté d'expression est désormais bien établie et la société civile très active. "Le pays a gagné en maturité et nous sommes désormais très attachés à faire vivre la démocratie", explique Dewi Fortuna Anwar, professeur de politique à l'Institut des Sciences.
"Mais elle reste encore brouillonne et il y a encore du chemin à faire", ajoute-t-elle, en regrettant notamment la vacuité du débat politique.
Quels sont les programmes des différents partis sur la crise économique, la pauvreté, l'accès à l'eau potable ou l'éducation? "Personne n'est en mesure de le dire, car la campagne s'est résumée à un concours de personnalités", se désole Mme Anwar.
Les électeurs sont également déboussolés par la présence de 38 partis aux législatives et les multiples dysfonctionnements dans leur organisation. Le nombre d'abstentionnistes pourrait ainsi atteindre 30 à 40% contre moins de 20% en 2004.
Fléau du pays, la corruption reste endémique malgré une succession d'affaires qui a vu tomber des hommes d'affaires, des élus, l'ex-gouverneur de la Banque d'Indonésie et même le père de la belle-fille de M. Yudhoyono.
Et, plus que jamais, l'argent a miné la campagne car tout, ou presque, s'achète, des "militants" remplissant les meetings aux électeurs, attirés par un billet de banque ou des promesses.
Petra Oderbrecht, la première candidate d'origine étrangère à se présenter en Indonésie, en a fait l'amère expérience. Durant la campagne, une question lui a souvent été posée: "Madame, si vous voulez que je vote pour vous, qu'allez-vous me donner?".