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Envoyé spécial de FRANCE 24 à Damas, le journaliste Antoine Mariotti a sillonné les rues de la capitale syrienne. Les habitants ne croient pas à l'imminence des frappes aériennes mais redoutent le pire si cela arrivait.
Les Damascènes sont stoïques et résignés. Les éventuelles frappes aériennes de la communauté internationale ne semblent pas perturber la grande majorité des personnes interviewées à Damas par l’envoyé spécial de FRANCE 24, Antoine Mariotti. "C'est impossible que ça se passe chez nous. Grâce à Dieu, on n'a pas peur. Ça n'arrivera pas", assure un jeune homme interviewé dans la capitale syrienne.
Certes, la plupart des personnes interrogées soutiennent le régime, temporise Antoine Mariotti qui explique que son collègue de France 24 et lui-même étaient accompagnés par les autorités syriennes lors de leurs différents reportages dans le pays. "Mais ils ne semblent pas inquiets, poursuit-il. Les rues de Damas sont noires de monde. La plupart des Syriens sont résignés : ce serait un malheur de plus, mais ils vivent déjà avec des roquettes tous les jours, ça ne changerait pas grand-chose".
Certaines femmes osent cependant exprimer leurs craintes. Une habitante du centre de Damas admet ainsi être angoissée. "Bien sûr on a un peu peur mais quand on voit les gens marcher dans la rue normalement, c'est rassurant et ça donne le courage de sortir, de se promener", témoigne-t-elle. "Avec l'aide de Dieu j'espère que [les États-Unis] ne frapperont pas. Mais qu'est ce qu'on peut faire ? S'ils veulent frapper ça va être la Troisième Guerre mondiale", poursuit-elle. Beaucoup d’habitants partagent cet avis : si les Américains interviennent militairement, le conflit syrien prendra une autre ampleur puisque la Russie et l’Iran répliqueront nécessairement, selon eux.
itNi travail ni argent
Dans les faubourgs de Damas, à Jaramana, où quatorze roquettes peuvent tomber quotidiennement, les populations subissent tous les jours des coupures d’électricité et ne trouvent ni travail ni argent. Cela les inquiète davantage encore. "C’est la tragédie silencieuse qui se joue en Syrie, celle de l’effondrement économique", analyse Antoine Mariotti.
L'envoyé spécial de la Ligue arabe et de l'ONU, Lakhdar Brahimi, a déploré, mercredi 28 août, l'usage d'une "substance" lors de l'attaque du 21 août en Syrie.
"Il semble qu'une sorte de substance ait été utilisée tuant beaucoup de personnes, sans aucun doute plus de 100, certains parlent de 300, certains parlent de 600, peut-être 1 000, peut-être plus de 1 000", a-t-il déclaré, lors d'une conférence de presse à Genève.
L'envoyé spécial a également déclaré qu'un feu vert du Conseil de sécurité de l'ONU était nécessaire pour intervenir en Syrie.
Avec AFP
"Il n'y a pas d'électricité. Elle est coupée deux fois par jour, explique une habitante de Jaramana. Tout est cher maintenant. Je ne suis pas capable de faire vivre ma famille. On doit payer un loyer de 10 000 livres. Et en plus je n'ai même pas de bail. À n'importe quel moment le propriétaire peut me chasser. Il m'appelle tous les deux jours pour me dire qu'il veut son argent. On n'a même pas à boire et à manger".
Le scénario irakien
Quant aux officiels du régime, ils mènent une guerre de communication, rapporte l’envoyé spécial de FRANCE 24. "Nous n’avons jamais autant entendu les hommes forts du régime que ces trois derniers jours. Bachar al-Assad s’est exprimé dans un média russe, le ministre des Affaires étrangères a donné une grande conférence de presse, lui qui est habituellement avare de paroles…", explique Antoine Mariotti.
L’argument principal avancé par le régime : le parallèle avec la guerre en Irak. "Les officiels affirment que la communauté internationale renouvelle la même erreur qu’il y a dix ans. De la même manière qu’il n’y avait aucune preuve d’armes chimiques en Irak, il n’en existe pas plus en Syrie. Ils prédisent que les États-Unis et leurs alliés vont également perdre cette guerre", rapporte Antoine Mariotti.