Le gouvernement tunisien doit se réunir ce lundi après que plus de 10 000 Tunisiens pro et anti-gouvernement islamiste ont manifesté dans la nuit sur la place du Bardo (ouest de Tunis) devant le siège de l'Assemblée nationale constituante.
Trois jours après l'assassinat du député d'opposition Mohamed Brahmi, et au lendemain de plusieurs manifestations opposant plusieurs milliers de Tunisiens pro et anti-gouvernement d'Ennahda, le gouvernement a prévu une réunion de crise lundi 29 juillet.
Entre 4 000 et 5 000 manifestants, dont plusieurs députés et dirigeants de l'opposition laïque, se sont ainsi rassemblés peu avant la rupture du jeûne du ramadan en un sit-in nocturne devant le siège de l'Assemblée nationale constituante (ANC) pour exiger la démission du gouvernement et la dissolution de la constituante. "Le peuple veut la chute du gouvernement", "Ghannouchi assassin", ont-ils scandé en dénonçant le chef d’Ennahda, tenu pour responsable du meurtre de Brahmi.
Séparé des partisans de l'opposition par des barrières métalliques et des fourgons de police, le camp pro-gouvernement islamiste s'est formé après la rupture du jeûne et la prière de la nuit pour atteindre quelque 5 000 personnes. "Le peuple est musulman et ne capitulera pas", scandaient les partisans du gouvernement qui, selon un message partagé sur Facebook, ont mobilisé pour un nouveau sit-in lundi sur la même place. "Ceux qui boycottent l'ANC trahissent la Tunisie, nous résisterons jusqu'à la réalisation des objectifs de la révolution et il n'y aura pas de coup d'État dans ce pays", a déclaré Fathi Ayadi, député et dirigeant d'Ennahda.
Dans un appel télévisé, le président de l'ANC, Mustapha Ben Jaafar, a prôné "la retenue" et a invité les députés à occuper leurs sièges pour "finir le travail sur la Constitution", avançant la fin du mois d'août comme date limite à son adoption.
"Gouvernement de salut national"
Mais depuis l’assassinat de Mohamed Brahmi, tué jeudi de 14 balles tirées à bout portant, de nombreux élus – plus d’une soixantaine sur les 217 députés - ont décidé de boycotter l’ANC. "Après l'assassinat de Mohamed Brahmi, le gouvernement incompétent doit démissionner et laisser la place à un gouvernement de salut national", a déclaré Samir Taïeb, figure connue de la contestation.
"Ce gouvernement a échoué à assurer la dignité et la sécurité aux Tunisiens, le meurtre de Brahmi en est bien la preuve", a encore déclaré Maya Jribi, secrétaire générale du Parti Républicain, appelant à un gouvernement de salut national.
Les autorités ont désigné les auteurs de l'assassinat comme étant des salafistes djihadistes proches d'Ansar al-Charia, une organisation dont des membres sont soupçonnés d'être liés à Al-Qaïda. Mais Ansar al-Charia a démenti dimanche toute implication, dans un communiqué publié sur sa page officielle Facebook, affirmant n'avoir "aucun lien avec cet assassinat politique qui fait partie de tentatives connues pour pousser le pays vers le chaos".
Le ministère de l'Intérieur avait publié vendredi une liste de 14 suspects impliqués selon lui dans le meurtre de Brahmi mais aussi dans celui en février de Chokri Belaïd, autre opposant de gauche, critique acerbe des islamistes.
Avec dépêches