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JMJ de Rio: "Face au succès évangéliste, la vraie réponse est chez le pape François"

Arrivé à Rio où il préside les Journées mondiales de la jeunesse, le pape François aura pour défi de donner un nouveau souffle à une Église catholique en perte de vitesse au Brésil au profit du courant évangéliste en plein essor.

Arrivé au Brésil le 22 juillet, le pape François a donné le coup d’envoi des Journées mondiale de la jeunesse (JMJ). Environ 1,5 million de catholiques sont attendus du monde entier pour ce "Woodstock catholique" qui doit prendre fin le 28 juillet, par la traditionnelle messe en plein air, point d’orgue du rassemblement.

Initiées par Jean Paul II en 1984, les JMJ sont célébrées alternativement tous les deux ou trois ans. Elles permettent à des jeunes catholiques du monde entier de se retrouver pour prier ensemble et réfléchir à leur foi autour du souverain pontife. Elles sont aussi l’occasion pour le pape lui-même d’aller à la rencontre de la jeunesse et d’accorder son attention au pays qui les accueille en particulier.

L’Église catholique en déclin au Brésil

Mais l'ancien archevêque argentin de Buenos Aires, âgé de 76 ans, devrait aussi avoir à cœur de tenter de redonner du souffle à une Église catholique en perte de vitesse sur le continent face à la poussée continue des églises évangéliques, un courant du protestantisme, depuis trois décennies. Car si le Brésil compte le plus grand nombre de catholiques au monde, 123 millions selon le dernier recensement de 2010, l’Église catholique y est paradoxalement en déclin. La proportion de catholiques est en effet passée de 91,8% de la population en 1970 à 64,6% en 2010. Ce phénomène concerne l'ensemble du continent latino-américain, qui concentre 40% du milliard de catholiques dans le monde, mais où 20% des chrétiens sont désormais évangéliques.

Ces derniers ne cessent de croître : ils représentent désormais plus de 22% de la population du Brésil. Caractérisées par leur dynamisme et leur approche chaleureuse de la religion, les églises évangéliques n’hésitent pas à user des moyens les plus modernes pour attirer les fidèles : elles possèdent des chaînes de télévison et sont très actives sur les réseaux sociaux.

Odon Vallet, historien des religions, tient à souligner que le courant évangéliste est d’abord en progression au détriment des autres Églises protestantes historiques, l’Église luthérienne, calviniste et anglicane. On peut notamment le constater en Afrique. "Mais en Amérique du Sud, cette montée se fait au détriment des catholiques, car il n’y a guère d’autres religions", observe-t-il. Selon lui, plusieurs facteurs expliquent leur succès. "Une bonne partie de l’Église catholique latino-américaine, est passée durant les 30 dernières années de l’extrême gauche à l’extrême droite, d’une théologie de la libération très progressiste voire révolutionnaire à des doctrines plus conservatrices, qui ont parfois toléré des dictatures", rappelle-t-il. Une attitude qui "a pu surprendre et déplaire à la population, et notamment au plus modestes", explique l’historien.

Il remarque par ailleurs que quand l’église catholique souffre d’une véritable crise des vocations, les églises évangéliques, elles, disposent de très nombreux pasteurs. Et leur formation ne nécessite que quelques mois, quand celle d’un prêtre catholique dure obligatoirement huit ans. Odon Vallet estime enfin que ce courant attire les fidèles en raison de certaines de ses caractéristiques propres.  "Les évangéliques font souvent des promesses rapides aux fidèles, de réussite, de guérison à court terme, via des bénédictions ou des prières", explique l’historien. Des pratiques appréciées des fidèles qui y voient des réponses rapides à leur difficultés quotidiennes, et auxquelles la religion catholique n’est que peu encline.

Le pape François : une réponse aux églises évangélistes ?

Face à une tendance qui dure depuis plus de 30 ans, que peut faire le pape François qui connaît bien le défi pour y avoir été confronté en Argentine ? Pour Odon Vallet, l’essor des évangélistes est à même de s’essouffler de lui-même. "Les réponses qu’ils apportent sont de l’ordre du court terme, et souvent le miracle de guérison ou de succès promis ne se produit pas. Les fidèles sont souvent déçus", constate l’historien qui estime également que le peu de formation des pasteurs ne peut que se faire ressentir.

Pour sa part Bernard Podvin, porte-parole des évêques de France, se montre optimiste. Il va même jusqu’à penser que le pape François est en lui-même une forme de "réponse". S’exprimant sur le plateau de FRANCE 24, l’évêque reconnaît que "la question de la montée du courant des évangélistes au Brésil est importante".

Mais selon lui, "leur succès équivaut à un appel des fidèles à plus de proximité et de chaleur de la part des Églises", analyse-t-il. À cet appel, Bernard Podvin estime que "la vrai réponse est chez le pape François". Et de rappeler : "Depuis son élection, François n’a eu de cesse d’insister sur l'importance de montrer le plus simple et le plus accessible possible. Il a rappelé que la place de l’Église était au près des plus pauvres. Nombreux sont les fidèles qui nous dise : 'Ce pape nous comprend'".

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Focus : Au Brésil, l'Église catholique veut redorer son blason face aux évangéliques
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