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Chris Froome, début de règne pour le "Kenyan blanc"

, envoyé spécial sur les Champs-Élysées – Le Britannique Christopher Froome a remporté, dimanche, la 100e édition du Tour de France. Pourtant, rien à l’origine ne laissait présager un tel destin au natif de Nairobi, au Kenya, qui a grandi en Afrique du Sud. Portrait.

Christopher Froome peut sourire. Il est le vainqueur du 100e Tour de France. Après sa 2e place l’an dernier, il monte, dimanche 21 juillet, sur la plus haute marche du podium sur les Champs-Élysées, dos à l’Arc de Triomphe qui a revêtu pour l’occasion ses habits d’apparat.

À 28 ans, Christopher Froome réalise donc le rêve de tout cycliste. Pourtant, rien dans son parcours ne laissait présager un tel destin. "La première fois que j’ai réalisé que je pouvais gagner le Tour de France, c’était en 2011 lors du Tour d’Espagne [il finit 2e, ndlr]. Avant, j’avais des performances fluctuantes mais là, je me suis dit qu’un jour, je pourrais gagner un grand Tour", a-t-il expliqué, samedi 20 juillet, lors de sa conférence de presse.

Froome charmeur de serpents

Christopher Froome naît le 20 mai 1985 dans une banlieue résidentielle de Nairobi, au Kenya. Son père, anglais, travaille dans l’organisation de safaris tandis que sa mère, fille de paysans locaux, est physiothérapeute.

Les Froome vivent dans un quartier aisé de la périphérie de la capitale kenyane, à quelques kilomètres du bush sauvage. Une nature luxuriante qui attire particulièrement le jeune "Froomey" qui parcourt la vallée du Rift avec le VTT que sa mère lui a offert à l’âge de cinq ans. Sur les pistes, il côtoie souvent des animaux sauvages. "Pour nous, rouler avec des éléphants, des lions, des hippopotames, ça faisait partie du truc", assure-t-il. Christopher, dernier d’une fratrie de trois, a alors pour meilleurs amis quelques scorpions et des serpents qu’ils tentent d’apprivoiser.

Par ailleurs, Christopher Froome occupe son temps à Kikuyu avec David Kinjah, le Kenyan qui a participé aux championnats du monde de Plouay en 2000. Il est, depuis, devenu un entraîneur à dreadlocks qui enseigne les rudiments du cyclisme à quelques jeunes du coin.

Froome apprend le cyclisme en Afrique du Sud

Mais voilà qu’à 14 ans, un revers de fortune familial envoie le père de Christopher, reconverti en organisateur de congrès, à Johannesbourg. Ses parents divorcent et pensent que Christopher doit suivre une éducation de qualité. Il accompagne donc son père en Afrique du Sud et intègre un lycée privé, la St. Andrew’s School, avant de rejoindre, plus tard, la prestigieuse université St. Andrew’s School pour suivre des études d’économie.

C’est à cette période qu’il va découvrir sa vocation. "Je devais avoir 17 ans, c’était la première fois que je voyais le Tour à la télé. C’était le duel Armstrong - Basso. J’ai trouvé ça magnifique", se souvient-il. C’est décidé, Christopher Froome veut aller courir en Europe.

En Afrique du Sud, il apprend donc le cyclisme sur route avec Robbie Nielsen. Le Sud-Africain dirige une petite académie de cyclisme. Il a 19 ans et pas mal de lacunes. Il rentre souvent au Kenya voir sa mère et en profite pour continuer de s’entraîner avec David Kinjah.

En 2006, l’enfant de Nairobi, alors âgé de 21 ans, va connaître ses premières victoires en représentant le Kenya avec l’équipe du Centre mondial du cyclisme. Il remporte notamment l’étape qui arrive au sommet du volcan endormi du Trou-aux-Cerfs sur le Tour de Maurice. La même année, la Fédération kenyane lui apprend qu’aucun coureur ne disputera le championnat du monde Espoirs. Un obstacle qui ne fait pas peur à Froome qui s’inscrit lui-même pour l’épreuve après avoir piraté la boîte mail du président de la fédération.

Froome, victime d'une infection parasitaire

L’année suivante, il signe son premier contrat pro chez Konica-Minolta, l’équipe continentale qui lui permet de courir en Europe. Il prend alors une année sabbatique pour se consacrer pleinement au vélo. Il enregistre des bons résultats qui lui permettent de signer dans l’équipe Barloworld. Avec l’équipe sud-africaine, il entre dans le grand monde du cyclisme et découvre des courses mythiques comme Liège-Bastogne-Liège, Paris-Roubaix ou la Flèche wallonne. En 2008, Christopher Froome dispute même le Tour de France sous pavillon kenyan. Une Grande Boucle qu’il termine à une anonyme 82e place. Deux mois plus tard, Christopher Froome prend la nationalité britannique.

Son passage chez Sky en 2010, qui voit en lui “un diamant brut, à tailler et polir” va changer sa vie. Pourtant, tout semble s’arrêter pour lui cette même année. Lors d’un voyage en Afrique du Sud, Froome contracte la bilharziose, une infection parasitaire qui s’attaque aux globules rouges. Une maladie qui tue 280 000 personnes chaque année. "Je ne pouvais enchaîner que quelques semaines d’entraînements, après je tombais malade, j’attrapais un rhume. Trouver la motivation devenait très difficile."

Mais un traitement va faire disparaître sa maladie en juillet 2011, à cinq mois de sa fin de contrat avec Sky.

Christopher Froome va se révéler en pleine lumière lors du Tour d’Espagne 2011. Il termine 2e d’une Vuelta qu’il aurait dû gagner, si l’équipe Sky n’avait pas privilégié - déjà - la carte Bradley Wiggins. Cette performance va toutefois convaincre sa formation de poursuivre avec lui, notamment sur le Tour 2012.

Carton plein cette saison pour Froome

La dernière Grande Boucle va révéler Christopher Froome au grand public notamment lors de l’étape de La Toussuire, où il apparaît aux yeux de tous plus fort en montagne que le futur vainqueur Bradley Wiggins. Froome s’en tient toutefois au plan de l’équipe britannique et permet à Wiggins de devenir le premier Anglais à gagner le Tour de France.

Ce ne sera que partie remise pour Froome qui, après avoir empoché cette année le Tour d'Oman, le Critérium international, le Tour de Romandie et le Critérium du Dauphiné s’adjuge donc le 100e Tour de France.

Christopher Froome devance au classement général de 5’03’’ le Colombien Nairo Quintana. Depuis 2004, aucun vainqueur du Tour de France n’avait compté autant d’avance sur son dauphin. De quoi augurer d’une nouvelle dynastie Froome sur le Tour.