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Au moins 50 morts en Guinée après trois jours de violences inter-ethniques

Les autorités guinéennes ont déployé des renforts dans le sud-est du pays pour tenter d'endiguer les violences qui ont fait plus de 50 morts depuis dimanche entre les communautés rivales Konianké (musulmans) et Guerzé (chrétiens).

Des renforts des services de sécurité guinéens se sont déployés mercredi 17 juillet dans plusieurs villes du sud-est du pays pour tenter d’endiguer les violences qui ont fait en trois jours au moins 54 morts, ont rapporté les autorités.

Ces violences, qui ont principalement touché la deuxième ville de Guinée, N’Zérékoré, près de la frontière ivoirienne (à environ 1 000 km de Conakry), ont opposé plusieurs communautés rivales, à la suite du lynchage dimanche 14 juillet de trois hommes accusés de vol dans une station-service, à Koulé (40 km au nord de N’Zérékoré).

Ces trois jeunes Konianké ont été battus et torturés par des gardiens d'une station-service qui les avaient pris pour des voleurs. Deux d'entre eux sont morts quelques heures plus tard des suites de leurs blessures, donnant lieu à une spirale de représailles entre Konianké (musulmans) et Guerzé (chrétiens). Les violences se sont ensuite étendues à N'Zérékoré et à Beyla, à une centaine de kilomètres au nord de N'Zérékoré, selon des témoins et le porte-parole du gouvernement guinéen, le ministre Albert Damantang Camara.

En trois jours, plus de 50 personnes ont perdu la vie dans ces combats. D'après différentes sources, les membres des communautés konianké et guerzé se sont affrontés à l'aide de coupe-coupe, haches, pierres et bâtons, mais aussi d'armes à feu. Des églises et des mosquées ont été brûlées.

Certains corps "n’ont pas de têtes"

À l'hôpital central de N'Zérékoré, les autorités ont déjà "comptabilisé 54 corps identifiés, [en train d’être] restituer aux deux communautés". Mais ce premier décompte devrait être d'ores et déjà plus lourd "parce qu'il y a des corps non identifiés à la morgue" de l'hôpital. Certaines dépouilles "n'ont pas de tête, d'autres n'ont pas de papiers d'identité. Pour les 54 corps identifiés, nous nous sommes basés sur les papiers d'identité, ça nous a beaucoup aidés", a ajouté un médecin de N’Zérékoré. "Avec la Croix-Rouge, nous avons parcouru beaucoup de quartiers, des corps sont encore dans des caniveaux, d'autres avec leurs familles", a-t-il précisé

"En ce moment, nous sommes débordés à l'hôpital. (...) À chaque fois, il y a la gendarmerie, la Croix-Rouge ou des volontaires qui déposent des corps de victimes, parfois sans membres ou sans tête, ou encore éventrés", a-t-il ajouté.

Le porte-parole de l'opposition, Aboubacar Sylla, a appelé à "une véritable politique de réconciliation entre les communautés" dans ces régions, frontalières du Liberia et de la Côte d'Ivoire. "L'Etat doit assumer ses responsabilités et ramener le calme. Il doit restaurer son autorité", a-t-il dit à l'AFP.

"Petite détente"

À N'Zérékoré, "un calme précaire règne, on sent une petite détente" depuis mercredi. Contrairement aux dernières 48 heures durant lesquelles la plupart des habitants s'étaient calfeutrés chez eux, les rues étaient animées, a affirmé un résident contacté par téléphone depuis Conakry. Un autre habitant et une source sanitaire ont également évoqué une accalmie fragile dans la zone.

Dans une déclaration à la Nation mardi, le président guinéen Alpha Condé avait exhorté les populations au calme et affirmé que "toutes les dispositions" avaient été prises "pour assurer la sécurité des personnes et de leurs biens".

En dépit de l'explosion de violences, Alpha Condé a quitté Conakry mercredi matin pour Abuja où se tient le 43e sommet ordinaire des dirigeants ouest-africains prévu jusqu'à jeudi, a annoncé la présidence.

Avec dépêches