Au lendemain de l'annonce du président égyptien Mohamed Morsi de rompre définitivement toute relation diplomatique avec le régime de Bachar al-Assad, Damas a réagi dénonçant un acte "irresponsable" du Caire.
Le régime syrien n'a pas tardé à réagir après les déclarations, samedi 15 juin, du président égyptien Mohamed Morsi qui annonçait vouloir rompre toute relation diplomatique avec la Syrie. Damas a accusé, dimanche, Le Caire d'acte "irresponsable". "La République arabe syrienne condamne la position irresponsable de Morsi (...) qui s'est joint à la clique des comploteurs menée par les États-Unis et Israël contre la Syrie", a indiqué un responsable syrien cité par l'agence officielle Sana.
La décision du chef de l’État égyptien "ne reflète pas la volonté du peuple égyptien frère, uni au peuple syrien par des relations solides, a assuré le responsable syrien ayant requis l'anonymat.
S'exprimant devant des dignitaires sunnites réunis au Caire, le président égyptien, issu des Frères musulmans, a déclaré : "Nous avons décidé aujourd'hui de rompre complètement les relations avec la Syrie et avec l'actuel régime syrien." L'ambassade de Damas en Égypte va être fermée, et le chargé d'affaires égyptien dans la capitale syrienne va être rappelé, a ajouté le chef de l'État égyptien.
Mise en garde au Hezbollah
Mohamed Morsi a aussi adressé une mise en garde au Hezbollah, mouvement chiite libanais combattant aux côtés des forces gouvernementales syriennes contre les insurgés cherchant à renverser Bachar al-Assad. "Nous nous opposons au Hezbollah dans son agression contre le peuple syrien", a-t-il dit. "Le Hezbollah doit quitter la Syrie et ce ne sont pas des paroles en l'air. Il n'y a pas de place pour le Hezbollah en Syrie."
Autre point fort du discours de Mohamed Morsi : il a exhorté la communauté internationale à instaurer une zone d'exclusion aérienne en Syrie afin de favoriser les rebelles contre les forces gouvernementales, qui disposent de la maîtrise des airs. Il a en outre affirmé que son pays avait "entamé des contacts avec des États arabes et musulmans afin d'organiser une réunion d'urgence de soutien" au peuple syrien.
Donner des gages aux Occidentaux, reprendre la main à domicile
Selon des analystes, l’annonce de Mohamed Morsi vise à donner des gages de solidarité aux pays arabes et occidentaux opposés au régime de Bachar al-Assad. "Le pouvoir de M. Morsi a adopté la position américaine dans le conflit en Syrie et tente de plaire à Washington en l'aidant au Proche-Orient", affirme ainsi à l’AFP Imane Ragab, du Centre al-Ahram d'études stratégiques et politiques. "Il espère qu'ainsi les Américains fermeront les yeux sur la manière dont le régime pourrait faire face" aux grandes manifestations de l'opposition attendues le 30 juin pour le premier anniversaire de son élection, assure-t-elle.
Ces déclarations rangent également l'Égypte encore plus fermement au côté des pays arabes les plus opposés à Damas, en particulier le Qatar, très proche du pouvoir de Mohamed Morsi à qui il apporte un soutien financier décisif pour faire face à une sévère crise économique.
Autre but recherché par le président égyptien : reprendre la main à domicile en invoquant un thème international, face à une contestation grandissante de sa politique. Une pétition lancée il y a quelques semaines réclamant sa démission aurait déjà, selon la presse, recueilli 15 millions de signatures.
"Le président cherche à attirer l'attention sur des questions extérieures pour s'assurer un soutien populaire", estime Amine Chalabi, du Conseil égyptien pour les relations extérieures. Toutefois, "la crise intérieure est si profonde qu'aucune question externe ne peut l'éclipser", nuance-t-il. Mohamed Morsi a d'ailleurs saisi l'occasion de son discours sur la Syrie pour évoquer la situation intérieure égyptienne, et affirmer qu'il agirait "avec détermination" contre ceux "qui veulent pousser le pays dans une spirale de violences et de chaos".
Avec dépêches