Abdulbaki Todashev affirme que son fils Ibragim, ami de Tamerlan Tsarnaev, auteur présumé de l'attentat de Boston perpétré le 15 avril, a été "abattu" par le FBI, le 22 mai, parce qu’il s’apprêtait à faire des révélations.
Il brandit la photo de son fils, allongé sur la table d’autopsie. Abdulbaki Todashev, le père d’Ibragim Todashev, le jeune homme de 27 ans d’origine tchétchène tué le 22 mai en Floride lors d'un interrogatoire, a accusé, jeudi, le FBI d’avoir assassiné son fils pour le "faire taire", selon le Washington Post. Ibragim Todashev avait été interrogé sur ses liens présumés avec Tamerlan Tsarnaev, l’aîné des deux frères accusés d'avoir fomenté l'attentat de Boston qui a fait trois morts et 264 blessés, 15 avril dernier.
"Je réclame justice. Je veux qu’une enquête soit ouverte", a affirmé Abdulbaki Todashev jeudi, lors d’une conférence de presse à Moscou où il réside. "Ils viennent chez vous comme des malfrats et après ils vous abattent", a accusé le père de famille.
"Peut-être que mon fils savait quelque chose que la police ne voulait pas ébruiter", a insisté Abdulbaki Todashev en précisant que son fils s’apprêtait à rentrer en Tchétchénie. "Ils l’ont fait taire. J’en suis convaincu".
"Mon fils n’a pas pu les attaquer"
Ibragim Todashev a été abattu après deux heures d'interrogatoire par les agents fédéraux dans son appartement d'Orlando. Selon le FBI, cette connaissance de l’aîné des frères Tsarnaev, aurait tenté, armé d’un couteau, d’agresser l’un de ses agents afin de se saisir de son arme. L’enquêteur aurait alors ouvert le feu.
Une version déjà mise à mal par deux représentants des forces de l'ordre dans les colonnes du "Washington Post" mercredi. Selon eux, Ibragim Todashev a été abattu après plusieurs heures d’interrogatoire et il n’était pas armé.
"Mon fils n’était sûrement pas armé parce qu’il n’a jamais eu d’arme à feu", a expliqué Abdulbaki Todashev dans une interview accordée jeudi à CNN depuis Moscou. "Il n’a pas pu les attaquer ou se battre avec eux (les agents du FBI, NDLR). Deux hommes pouvaient largement le maîtriser", a-t-il encore argumenté en avançant que "quatre ou cinq policiers", tous "armés" étaient présents lors de son interrogatoire. "Mon fils n’a pas pu les attaquer. Il n’est pas fou".
"Un meurtre commis de sang-froid"
Autre détail troublant pour le père de famille, Ibragim Todashev a reçu sept balles : six dans le corps, une à "l’arrière de la tête".
"C’est la preuve qu’il s’agit d’un meurtre commis de sang-froid", a argumenté le journaliste et membre d’une organisation de défense des droits de l’homme russe Maxim Shevchenko, dans le "Washington Post".
"C’est une exécution extra-judiciaire", a renchéri l’avocat tchétchène Zaurbek Sadakhanov, qui assure la défense de la famille Todashev mais aussi celle de Djokhar Tsarnaev, l'autre suspect des attentats de Boston emprisonné à Fort Devens, dans le Massachusetts. "Pourquoi Ibragim a-t-il été interrogé à trois reprises sans l’assistance d’un avocat ? Pourquoi ces interrogatoires n’ont-ils pas été enregistrés ? Pourquoi sept tirs ? Pourquoi devrais-je croire à la version du FBI ? Les policiers américains pensent qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent en toute impunité".
D’après le père d’Ibragim Todashev, ce n’était pas la première fois que le FBI s’intéressait à son fils. Installé en Floride depuis deux ans, le jeune homme avait été interrogé deux fois auparavant. Le premier interrogatoire portait sur l’attaque du marathon de Boston, le second concernait un triple meurtre commis le 11 septembre 2011 avec Tamerlan Tsarnaev à Walthram, dans la banlieue ouest de Boston. Un triple assassinat qu’Ibragim Todashev aurait reconnu avant sa mort.
Face à la polémique, le porte-parole du FBI, Paul Bresson, a indiqué dans un communiqué publié mercredi soir qu'une enquête interne était en cours.