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"Les Allemands sont perçus comme les bons citoyens du monde"

Un récent sondage montre que l’Allemagne est le pays le plus aimé au monde malgré les critiques à l’égard de la politique européenne d’Angela Merkel. Sam Mountford, en charge de cette enquête, explique pourquoi ce résultat n'est pas surprenant.

Surprise : l’Allemagne est le pays le plus aimé au monde devant le Canada et la Grande-Bretagne. C’est ce qui ressort d’un sondage publié jeudi 23 mai par la BBC et réalisé par GlobeScan et PIPA, deux cabinets britanniques d’études. Malgré les critiques récurrentes adressées à la première puissance européenne pour son dogmatisme économique en faveur d’une austérité tous azimuts, la majorité des quelque 26 000 personnes interrogées dans 25 pays trouve que l’Allemagne a l’influence la plus positive au monde.

Même les Espagnols ou les Italiens, qui souffrent pourtant particulièrement sous l’effet de la rigueur inspirée des préceptes d'Angela Merkel, mettent l’Allemagne sur un piédestal. Seuls les Grecs - qui lors de plusieurs manifestations contre la politique économique de leur pays ont comparé la chancelière allemande à Adolf Hitler - ne participent pas à cet engouement.

Sam Mountford, directeur de GlobeScan et responsable de ce sondage réalisé tous les ans depuis 2005, explique à FRANCE 24 pourquoi ces résultats ne sont pas si étonnants.

N’êtes-vous pas surpris que l’Allemagne, souvent critiquée pour son "arrogance", soit le pays le plus aimé au monde ?

Sam Mountford : Pas du tout. Il faut bien comprendre que ce résultat ne reflète pas une approbation de la politique d’Angela Merkel. La question posée est de savoir quel est le pays qui a l’influence la plus positive. Les réponses tiennent davantage compte d’éléments comme le rayonnement culturel, la stabilité politique, le niveau de démocratie dans un État et plus généralement le mode de vie.

Dans nos précédents sondages, l’Allemagne a toujours figuré dans le peloton de tête des pays à avoir une image positive. Ce n’est donc que la confirmation d’une tendance à long terme qui montre que les critiques à l’égard de la politique d’Angela Merkel sont largement contrebalancées par d’autres éléments.

Quels sont, selon vous, ces autres éléments qui jouent autant en faveur de l’Allemagne ?

S.M. : On ne demande pas aux sondés de justifier leur choix, donc je ne peux que spéculer sur ce point. Mais, en résumé, je pense que les Allemands sont perçus comme les bons citoyens du monde.

L’Allemagne a adopté une approche résolument multilatéraliste des relations internationales. Le pays joue collectif et coopére avec toutes les institutions internationales. Il y a clairement une prime à ce genre de diplomatie assez neutre. Les États qui se lancent seuls dans des campagnes militaires, que leurs intentions soient louables ou non, sont souvent sanctionnés pour ça. C’est particulièrement flagrant dans le cas des États-Unis. D’ailleurs ces derniers progressent dans notre classement depuis que Washington se montre moins unilatéraliste, redorant ainsi son blason terni par la guerre en Irak.

Berlin profite aussi d’une baisse généralisée des opinions favorables pour les autres pays. Dans le contexte de crise économique actuelle, l’Allemagne apparaît comme le seul pays, ou presque, à avoir un leadership fort et efficace. Les résultats de ce sondage montrent qu’il y a un important désenchantement des personnes interrogées à l’égard de leur gouvernement. Le vote en faveur de l’Allemagne reflète ce désir des sondés d’avoir des responsables politiques qui savent où ils vont.

Si la cote favorable dont l’Allemagne bénéficie ne vous étonne pas, est-ce qu’il y a des surprises dans les résultats de ce sondage ?

S.M. : La principale surprise vient du Japon. Il était en top de notre classement en 2012 et il a dégringolé de quatre places en un an. C’est une très importante chute que j’ai du mal à m’expliquer. Peut-être est-ce du aux tensions actuelles en Asie. L’image japonaise s’est ainsi particulièrement dégradée aux yeux des Chinois interrogés. Les Sud-Coréens ont également une opinion beaucoup plus défavorable de Tokyo, ce qui provient probablement du renouveau du discours nationaliste au Japon.

L’autre enseignement caché de ce sondage est que pour la première fois depuis que ce classement est établi, il y a davantage de Britanniques qui ont une image défavorable de l’Union européenne que l’inverse. Une évolution à souligner alors que le gouvernement de David Cameron envisage un référendum sur la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne .