Depuis dimanche soir, au moins 89 personnes ont péri dans une douzaine d’attentats a travers l’Irak en proie à une flambée de violence depuis plusieurs mois. Le Premier ministre a annoncé qu’il allait revoir sa stratégie sécuritaire.
Une nouvelle série d’attentats perpétrés contre la communauté chiite a tué au moins 89 personnes entre dimanche soir et lundi en Irak. Parmi les victimes, 24 policiers ont péri lors de heurts avec des hommes armés dans une région sunnite de l'ouest du pays, au cœur de la contestation antigouvernementale.
Face à la recrudescence des attaques, le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki a annoncé, lundi, un "changement" imminent de sa stratégie sécuritaire ainsi que des remaniements au sein du personnel chargé d'appliquer cette politique.
Ces incidents s'inscrivent dans la flambée de violences qui secoue l'Irak depuis quelques semaines et fait craindre le retour du conflit interconfessionnel dans lequel le pays avait sombré en 2006 et 2007. À l'époque, les troupes de la coalition internationale dirigée par les États-Unis étaient régulièrement prises pour cible et le nombre de morts dans des attentats dépassait allègrement le millier chaque mois.
Alors que l'Irak avait réussi à nettement infléchir les violences à partir de 2007, plus de 200 personnes ont péri chaque mois dans des attaques depuis le début de l'année, avec un pic à plus de 460 en avril, selon un décompte mensuel des victimes effectué par l’AFP.
Douze attentats quasi-simultanés
À Bagdad, huit attentats, commis pour la plupart à l'aide de voitures piégées, ont secoué des quartiers majoritairement chiites, à l'heure où les habitants se rendaient au travail. Au moins onze personnes sont mortes. Un autre a eu lieu quelques heures plus tard sur un marché du quartier de Chaab, dans le nord-est de la capitale, en pleine heure d'affluence. Selon une source médicale, trois femmes et deux enfants figurent parmi les quelque douze morts recensés.
À Bassora, la grande ville portuaire à majorité chiite du sud du pays, deux attentats à la voiture piégée ont fait 13 morts et 48 blessés, selon le chef des services médicaux municipaux, Riyad Abdelamir.
Près de Samarra, à 110 kilomètres au nord de la capitale irakienne, une voiture piégée a explosé à proximité d'un autocar qui transportait des pèlerins chiites venus d’Iran. Huit d’entre eux sont décédés, selon les autorités locales. Dans cette même zone, une autre attaque a tué deux miliciens des Sahwa (Le réveil, en arabe) et en a blessé douze autres. Les Sahwa sont une milice sunnite, fondée en 2006, dont la vocation est de lutter contre Al-Qaïda.
Dans la soirée, à Hilla, à 100 km au sud de Bagdad, 13 personnes sont mortes et 71 autres ont été blessées dans deux attentats visant deux mosquées chiites lors de la prière du soir. Des attaques ont aussi lieu à Mossoul (nord) et Routba, (ouest), faisant deux morts. Aucune de ces attaques n’a été, pour l’heure, revendiquée.
Policiers pris pour cible
À Al-Anbar, un haut lieu de la contestation situé à l'ouest du pays, un commando de l'armée et de la police a tenté de libérer, dimanche soir, des policiers enlevés la veille sur l'autoroute qui relie l'Irak à la Jordanie. Douze otages ont été tués et quatre autres blessés au cours de l’opération, a indiqué le lieutenant-colonel de police Majid al-Jlaybaoui à l'AFP.
Lors de deux autres incidents survenus tard dans la soirée de dimanche, des inconnus ont attaqué deux commissariats à Haditha, à environ 210 km au nord-ouest de Bagdad. Douze policiers ont péri dans ces attaques, selon un officier de police et une source médicale.
La situation sécuritaire s'est fortement dégradée dans la province d'Al-Anbar. Samedi, les forces de sécurité ont essayé d'arrêter Mohammed Khamis Abou Richa, le neveu de cheikh Ahmed Abou Richa, un puissant chef tribal qui soutient les manifestants sunnites dans la région. Peu après, des centaines d'hommes armés ont commencé à se rassembler devant le quartier général des forces de l'ordre à Ramadi, chef-lieu de la province, et deux membres de la tribu ont été tués.
Les protestataires sunnites exigent la démission du Premier ministre Nouri al-Maliki mais aussi que les autorités mettent fin à la stigmatisation dont ils s'estiment victimes, au travers notamment l'utilisation systématique de l'arsenal législatif antiterroriste à leur encontre.
Le gouvernement a fait quelques concessions, en libérant des prisonniers et en augmentant les salaires des Sahwa, mais le cœur du problème n'a pas été réglé pour autant et les manifestations se poursuivent.
Avec dépêches