Le Premier ministre libanais, Najib Mikati, a annoncé vendredi sa démission, qui entraîne automatiquement celle de son gouvernement. Des divergences existaient au sein de son cabinet sur la préparation des législatives prévues en juin.
Au pouvoir depuis 2011, le Premier ministre libanais Najib Mikati a créé la surprise en démissionnant vendredi 22 mars en début de soirée. En cause : des divergences grandissantes au sein de son gouvernement quant à la préparation des législatives prévue le 9 juin.
"J'annonce la démission du gouvernement en espérant que cela fera prendre conscience aux principaux blocs politiques au Liban de la nécessité d'assumer leurs responsabilités et de faire preuve de cohésion pour éviter l'inconnu au Liban", a-t-il dit aux journalistes lors d'une conférence de presse au Grand Sérail pour justifier son choix.
Premier problème : la loi électorale en vigueur depuis 1960. Depuis plusieurs semaines, elle est au cœur de tous les débats et menace le fragile échafaudage confessionnel au pays du Cèdre. Plusieurs partis politiques, dont celui des chrétiens, estiment que l'actuel découpage électorale est défavorable à leur communuaté. Selon eux, les circonscriptions actuelles favorisent les musulmans qui, plus nombreux, peuvent choisir les députés chrétiens qui leur conviennent.
Pour Mikati, le plus important est que les élections se tiennent à la date prévue pour, dit-il, "donner du sang nouveau à la politique libanaise". Il est de fait favorable à la loi actuelle, "constatant qu'une nouvelle loi ne pourrait pas être rédigée dans les délais impartis". Pour ne pas prendre de retard dans l'organisation des élections, il a donc proposé vendredi la mise sur pied d'une commission de supervision des élections - proposition qui n'a pas été suivie par ses ministres.
Une démission qui ouvre une période d'incertitude
Deuxième point de désaccord ayant conduit au départ de Najib Mikati : le renouvellement du mandat du général Achraf Rifi, l’actuel directeur général des Forces de sécurité intérieures (FSI), soutenu par le Premier ministre démissionnaire. "Une grande institution militaire entre dans l'inconnu et j'ai trouvé que le plus convenable en cette période serait que son chef poursuive sa mission. Mais j'ai aussi remarqué que beaucoup de ministres au sein du cabinet n'ont pas l'intention d'approuver cette décision", a-t-il expliqué.
L’annonce de la démission de Najib Mikati ouvre une période d'incertitude à l'heure où la Syrie, ancienne puissance tutélaire, est ravagée par une guerre civile. Durant ses deux années au pouvoir, Najib Mikati s'est efforcé de protéger le Liban des débordements de la guerre en Syrie. Mais le conflit n’a eu de cesse d’attiser les tensions entre les différentes communautés du pays du Cèdre, provoquant notamment des violences dans les rues de Tripoli, la grande ville du nord du pays.
Échanges de tirs
Alors que sunnites et alaouites y avaient annoncé un cessez-le-feu quelques heures avant la démission du gouvernement, des échanges de tirs entre les quartiers rivaux de Bab el-Tebbaneh - à majorité sunnite et anti-Assad - et Jabal Mohsen - à majorité alaouite et pro-Assad - ont été rapportés (voir le reportage de FRANCE 24 ci-dessous). Même constat sur la route reliant Tripoli au Akkar tandis que certains médias parlent même de tirs d’obus.
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Situation tendue à Tripoli, au Liban, entre factions pro et anti Assad
À Washington, la porte-parole du département d'État, Victoria Nuland, a dit que les États-Unis "suivaient de très près" la situation au Liban. "Notre point de vue est que nous pensons que le peuple libanais mérite un gouvernement qui reflète ses aspirations et qui renforce la stabilité, la souveraineté et l'indépendance" du pays, a-t-elle déclaré, exprimant "la vive inquiétude" des États-Unis quant au rôle que joue le Hezbollah.
Ennemi juré d'Israël, le mouvement chiite libanais a qualifié vendredi Barack Obama de "simple fonctionnaire de l'entité sioniste" après l'appel du président américain à considérer le Hezbollah comme une organisation terroriste.
Avec dépêches