Afin de faire accepter par le Parlement chypriote la taxe sur les dépôts bancaires, Nicosie a décidé d’exonérer les comptes de moins de 20 000 euros. Un changement "symbolique et sans impact économique", affirme l’économiste Pascal de Lima.
Les autorités chypriotes ont décidé mardi 19 mars d’exonérer les comptes en banque de moins de 20 000 euros du projet de taxe très controversé sur les dépôts bancaires. Le gouvernement avait annoncé la veille son intention d’amender le texte original qui avait été vivement critiqué et menaçait d’être retoqué lors du vote au Parlement chypriote attendu mardi 19 mars en fin d'après-midi.
La nouvelle mouture de cette mesure met les plus petits épargnants à l’abri tandis qu’elle ne change pas la taxation des dépôts dépassant les 20 000 euros (6,75% en-dessous de 100 000 euros et 9,99% au-dessus). Nicosie espère que cette modification convaincra le Parlement d'adopter le projet en l’état.
Un vote positif est en effet crucial pour l'île car la taxation des dépôts bancaires est une condition sine qua none posée par la Troïka (Union européenne, Fonds monétaire internationale et Banque centrale européenne) pour débloquer une aide internationale de 10 milliards d’euros dont Chypre a cruellement besoin pour ne pas faire faillite.
"Très peu de Chypriotes concernés"
En annonçant cette nouvelle exemption, Chypre “entend dire au monde et à son opinion publique qu’il protége les plus petits épargnants”, souligne à FRANCE 24 Pascal de Lima, spécialiste du secteur bancaire et enseignant à Science-Po Paris. Mais pour l'expert, c’est une “modification purement symbolique” car elle ne concerne que très peu de Chypriotes. “La plupart des épargnants ont justement entre 20 000 et 100 000 euros”, affirme-t-il.
Cette nouvelle version de la taxe sur les dépôts bancaires devrait donc “n’avoir aucun impact économique”, assure le spécialiste - contrairement aux affirmations de la Banque centrale de Chypre qui craint que l'objectif de lever près de 6 milliards d'euros ne soit pas tenu. Mais d’après Pascal de Lima, si le FMI a pu rapidement apporter son soutien au texte amendé, c'est bien parce que l’exonération ne devrait pas changer grand-chose à la donne fiscale.
En revanche, selon Pascal de Lima, l’impact en terme d’image pour la zone euro est “très négatif”. Ce nouvel épisode de la valse-hésitation autour du plan de sauvetage de Chypre prouve “que la zone euro navigue à vue sur cette question sans avoir de plan clair”, note l'économiste. Un manque de fermeté qui risque de ne pas plaire du tout aux marchés financiers : “Ils risquent de se dire que si la zone euro peine à trouver la solution pour un petit pays comme Chypre qu’est-ce que ça va être s’il faut se pencher sur le cas de pays plus importants”, conclut-il.