
Le ministère israélien des Transports a inauguré une ligne de bus pour les Palestiniens travaillant en Israël. Une solution pour décongestionner les transports selon certains, un retour inadmissible à la ségrégation pour d’autres.
Depuis le lundi 4 mars, Israéliens et Palestiniens de Cisjordanie disposent de lignes de bus séparées. Une mesure qui n’est pas sans rappeler les heures sombres de la ségrégation américaine ou encore de l’apartheid sud-africain.
Ces bus, destinés aux quelques milliers de Palestiniens de Cisjordanie travaillant chaque jour en Israël, circulent depuis le check-point "Eyal" au nord de la ville de Qalqiliya en direction de Tel Aviv.
"Créer des lignes de bus séparées pour Israéliens et Palestiniens est révoltant. C’est du pur racisme ! Une telle mesure ne devrait simplement pas pouvoir être appliquée au nom de la sécurité dans les transports", s’est exclamée sur la radio de l’armée, Jessica Montell, directrice de l’organisation de défense des droits B'Tselem.
Du même avis, le quotidien israélien de centre gauche Haaretz ne cache pas son indignation. En réponse à cette mesure, il publie ce lundi, un article cherchant à démontrer que la longue litanie, depuis 1896, des décisions de justice relative à la ségrégation aux États-Unis était encore d'actualité en 2013 en Israël. "Nous sommes de retour en 1955", tance le journal en référence à l'époque où Rosa Parks s'était érigée contre le racisme en refusant de céder son siège d'autobus à un passager blanc.
Améliorer le service public
Mais selon le gouvernement israélien, il ne s’agit en rien d’une mesure de ségrégation. Bien au contraire, ces nouvelles lignes de bus viseraient à améliorer la qualité des transports publics pour les Palestiniens qui entrent sur le sol israélien chaque jour afin de se rendre sur leur lieu de travail.
Un argument que partage Herzl Ben-Zvi, maire de la colonie de Karnei Shomron, qui estime que ces nouvelles lignes sont "une réponse au besoin de tous les usagers, Palestiniens et colons" empruntant les transports bondés.
Cette mesure devrait également permettre, selon Tel Aviv, de lutter contre les nombreuses lignes de bus "sauvages" qui concurrencent les transports en commun en proposant leurs services à des prix souvent exorbitants.
En outre, le ministère israélien des Transports a tenu à rappeler qu’aucune interdiction envers les Palestiniens n’a été mise en place et que, par conséquent, les autorités n’étaient en aucun cas autorisées à "empêcher un passager [qu’il soit Palestinien ou Israélien] de prendre les transports publics."
Tensions à bord des bus
Dans la pratique, en revanche, de nombreux témoins ont déjà rapporté des cas de discrimination à bord des bus laissant craindre que ces nouvelles lignes n’installent un climat de ségrégation.
Début décembre 2012, un témoin avait filmé, et relayé auprès de FRANCE 24, une scène à bord d’un bus durant laquelle un Palestinien se faisait éjecter arbitrairement par son chauffeur israélien. Ce type d’incident se produirait en moyenne deux à trois fois par semaine à en croire l’auteur de la vidéo.
Des affirmations corroborées par Checkpoint Watch, une ONG dédiée à la surveillance du traitement des Palestiniens aux zones frontalières, qui a également fait état, récemment, d’une série d’incidents similaires.